L’activité économique tourne à plein régime. Pour s’en convaincre, il suffit simplement de se pencher sur les prévisions économiques qui tablent sur une croissance oscillant entre 4,8 et 5% du PIB. Et pourtant, cette bonne dynamique n’arrive toujours pas à enrayer le fléau du chômage, qui a enregistré un taux de 9,9% au premier trimestre 2015.
Un gouvernement est toujours très confronté à l’épreuve de son bilan économique, qui d’une certaine manière, accroît ou écorne sa popularité. L’actuel gouvernement n’échappera pas à cette règle. C’est d’ailleurs ce qui a induit le Chef de gouvernement à mener des réformes courageuses mais souvent impopulaires. Toujours sous cet angle économique, la réalité des chiffres montre que presque tous les indicateurs économiques de l’année 2015, ont substantiellement viré au vert. En effet, pour cette année, la croissance devrait se situer à 4,8% (contre 2,4% en 2014), sous l’effet d’une bonne production céréalière (110 millions de quintaux). Même son de cloche pour le déficit commercial qui recule, enregistrant une diminution de 25,3% à fin mai 2015. Pour sa part, le déficit budgétaire, qui était de 15 Mds de DH à fin avril 2015, s’est atténué de près de la moitié par rapport à la même période de l’année dernière. L’autre bonne nouvelle est que l’inflation a été confinée autour de 1,7% lors des quatre premiers mois de l’année. Au-delà de ces indicateurs reluisants, il est toutefois utile de rappeler que toute politique économique a pour objectif majeur d’endiguer le chômage, surtout celui des jeunes qui demeurent encore les parents pauvres du marché du travail. Or, il se trouve qu’en dépit des mesures déployées, ça et là, et malgré les bonnes performances de l’économie nationale, force est d’admettre que les résultats escomptés sur le front de la lutte contre le chômage ne sont pas toujours au rendez-vous. Chiffres à l’appui, le taux de chômage frôle la barre des 10% (9,9% au premier trimestre 2015). A noter qu’au cours du premier trimestre de cette année, le marché du travail, qui a connu une légère baisse du taux de chômage (-0,3 point), a enregistré une création limitée de postes de travail (27.000 contre 89.000 à la même période de l’année dernière). Ce qui montre clairement que le tonus de l’activité économique a eu peu d’incidence sur la création d’emplois. Cela dit, en décortiquant les dernières données rendues publiques par le HCP, il est assez aisé de s’apercevoir que le caractère structurel des dysfonctionnements du marché du travail persiste.
Les jeunes continuent de trinquer
Comme cela a été précisé plus haut, le taux de chômage a reculé de 0,3 point pour se situer à 9,9% au premier trimestre 2015. En effet, celui-ci a été de 14,3% en milieu urbain, et 4,7% en zones rurales. Les atténuations les plus notables ont concerné la tranche d’âge des 35-44 ans et les non-diplômés. En revanche, le taux de chômage chez les jeunes citadins (15-24 ans) s’est de nouveau aggravé de 2,4 points à 21,3%. A noter que ce taux est le plus élevé à l’échelle nationale, suivi de celui des titulaires d’un diplôme (17,3%). Il est indéniable que ces chiffres sont de nature à relancer le débat sur les perspectives d’avenir des jeunes et la problématique de l’inadéquation entre les formations et les besoins du marché du travail. Autre donnée édifiante, le taux d’activité a poursuivi son repli pour se situer à 47% au premier trimestre 2015. Par ailleurs, il est utile de préciser que les 27.000 postes d’emploi créés au premier trimestre 2015 sont la résultante d’une création de 45.000 postes en milieu urbain et d’une perte de 18.000 en zones rurales. Autre information importante qui reflète la structure économique du pays, le secteur primaire a été le premier pourvoyeur d’emplois avec une création de 14.000 postes, suivi par l’industrie (y compris l’artisanat), avec 9.000 postes et les services, avec 4.000 postes, sachant que la moyenne de postes créés était de 88.500 au cours des trois dernières années.
Cette comparaison atteste, une fois de plus, de la faible propension des secteurs susmentionnés à générer des emplois en dépit d’une conjoncture économique jugée favorable par toutes les institutions du pays en charge des prévisions économiques et financières. De plus, la question de la qualité des postes de travail reste posée car l’agriculture pourvoit des emplois instables et très souvent non rémunérés. Les postes dans la branche industrielle sont réputés être plus pérennes et de meilleure qualité que ceux de l’agriculture. Toutefois, selon le HCP, en termes de composition des emplois créés dans l’industrie du textile, une part de 70% des actifs occupés ne dispose pas d’une couverture médicale et est constituée principalement d’actifs saisonniers, occasionnels ou non-rémunérés. Concernant les salariés de cette branche, qui représente près de 42% de l’emploi industriel, plus de 3 employés sur 5 ne disposent pas d’un contrat de travail. En définitive, les caractéristiques et les dysfonctionnements du marché du travail demeurent toujours les mêmes en dépit des multiples programmes mis en place (Idmaj, Taehil, Moukawalati). A l’évidence, cela remet en selle le débat sur la restructuration de l’économie nationale.
M. Diao