Inflation: la flambée des prix n'aura pas lieu

Inflation: la flambée des prix n'aura pas lieu

Ni marchés financiers, ni économistes, ni institutions officielles n'adhèrent à la thèse du retour de l'inflation au Maroc.

 

Par A. Hlimi

 

Bank Al-Maghrib, puis le HCP, à quelques jours d'intervalle, ont donné des messages rassurants sur l'inflation, confortant les marchés financiers dans leur hypothèse dominante du moment. Mais il en faudra plus pour convaincre les citoyens qui perçoivent continuellement un renchérissement du coût de la vie. Aux Etats-Unis, les anticipations d'un retour à l'inflation à court terme, porté par le plan de relance budgétaire et la distribution d'aides directes aux citoyens, ont fait décaler les taux sans risque à la hausse durant tout le premier trimestre.

Un événement similaire (hausse des taux) aurait eu des impacts néfastes sur notre marché des capitaux, où les investisseurs font le pari, depuis plusieurs années, d’une tendance baissière durable du coût de l'argent. Mais, heureusement, ni Bank Al-Maghrib ni le HCP font de telles prévisions pour le moment.

La Banque centrale estime qu'après la déflation de 2020, émanant de la demande, la reprise de l’activité et l’augmentation des cours internationaux du pétrole et de certains produits alimentaires devraient pousser les prix à la hausse, tout en demeurant à un niveau modéré, passant de 0,7% en 2020 à 0,9% en 2021, puis à 1,2% en 2022. La composante fondamentale de l'inflation connaîtrait une évolution similaire, s’établissant à 1,2% en 2021, après un taux de 0,5% en 2020, puis s’accélérant à 1,5% en 2022. Le HCP a, quelques jours plus tard, conclu que l'inflation devrait continuer à évoluer à des niveaux «relativement» contenus au cours de l'année 2021.

La hausse des matières premières contrée par un Dirham fort

Le HCP fait remarquer que les hausses des prix des huiles de table et des autres produits alimentaires tels que les céréales sont réelles. Mais l'huile de table ne représente que 1,7% des dépenses de consommation dans l'indice global, contre 7,07% pour le pain et les céréales. Heureusement, l’appréciation du Dirham par rapport au Dollar (-6,3% en janvier 2021, au lieu de-1,3% en 2020) et la perspective d’une bonne année agricole seraient de nature à maintenir le taux d’inflation au cours de l'année 2021 à des niveaux toujours modérés.

La hausse des prix des matières premières risque de s'étendre, cela dit, à la viande rouge, fait remarquer le HCP, ajoutant que près de 87% de l'alimentation et l'engraissement animal sont composés de maïs, d'orge et de tourteau de soja, des produits totalement importés de l'étranger. Les œufs et les viandes blanches risquent aussi de subir les conséquences de cette hausse des matières premières car, à l'instar de la filière des viandes rouges, l’alimentation de la volaille dépend de produits composés importés pour la plupart.

La revanche du consommateur n'aura pas lieu

Frustré après le confinement et muni de l'espoir d'un chèque gouvernemental conséquent, le consommateur américain prend sa revanche et rattrape le temps perdu, provoquant des impacts réels sur les prix des services et des biens de consommation. Mais ce phénomène ne s'observe pas pour le moment dans d'autres pays, et nous en faisons partie.

D'ailleurs, le HCP ne table pas sur une reprise de la demande intérieure au premier trimestre, d'autant plus que les restrictions sont toujours présentes et les frontières fermées, gardant des pans entiers de l'économie à l'arrêt. Les citoyens n'ont pas retrouvé leur pouvoir d'achat d'avant-crise et ne sont pas encore confiants dans l'avenir.

Dans son enquête sur le moral des ménages, menée en janvier, le HCP avait conclu que 73,1% des répondants à l'enquête estiment que la conjoncture est peu favorable pour acheter un bien durable, alors que 46,6% des ménages participants à l’enquête ont témoigné d’une dégradation de leur situation financière au cours des 12 derniers mois.

Enfin, 67,5% s’attendent à une hausse des biens alimentaires. Et tant que ce climat de défiance règne, les consommateurs vont retarder leurs actes d'achat et auront une perception négative sur l'évolution des prix. Un cercle vicieux que le gouvernement doit rompre avec des mesures encore plus fortes en faveur de la demande.

 

 

 

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