Si 2017 fut l’année de la médiatisation des cryptomonnaies, 2020 pourrait être celle de leur institutionnalisation à grande échelle.
Après les entreprises, c’est au tour des Etats de se lancer dans l’aventure et d’adapter leur réglementation en la matière.
Par K.O
Les géants du net ont quasiment tous développé des services basés sur la blockchain, et les exemples sont nombreux: Amazon dispose désormais d’une offre de services autour de la blockchain, Microsoft développe des applications identitaires basées sur la même technologie, sans parler de Facebook et du projet Libra.
Après les entreprises, ce sont désormais les gouvernements qui s’y mettent, conscients que cette technologie, au-delà de l’enjeu économique, présente également un enjeu stratégique et de souveraineté de premier ordre.
Ainsi, dernièrement, la Nouvelle-Zélande vient de passer un cap, et sera le premier pays à légaliser le paiement des salariés en cryptomonnaie.
Le Japon est lui le premier pays à reconnaître le Bitcoin comme monnaie à part entière. La Suède a, elle aussi, mis en place une réglementation adaptée, qui permet notamment d’échanger des cryptomonnaies (E-krona ou le Fedcoin) sur la Bourse nationale.
La Chine n’est pas en reste. La Banque centrale a annoncé, mi-août, que la cryptomonnaie d’État chinoise était proche de son lancement, afin de préparer l’arrivée prochaine de la cryptomonnaie de Facebook, considérée comme une menace économique et géopolitique pour la deuxième économie mondiale.
En Amérique du sud, le gouvernement du Venezuela a développé une cryptomonnaie stable (la Petro) qui est basée sur l’évolution du prix du baril de pétrole. Cette initiative avait pour but de proposer une alternative à la monnaie nationale, qui a perdu la confiance de la population.
L’Iran a franchi également le pas en approuvant le «minage» de bitcoin et en offrant désormais un cadre légal à cette activité.
Au Maroc, la situation est tout autre. On se souvient qu’en 2017, l’Office des changes avait sévèrement mis en garde contre l’utilisation de ces «monnaies», rappelant que de telles transactions constituent une infraction à la réglementation des changes, et sont passibles de sanctions et d’amendes prévues par les textes en vigueur.
Aujourd’hui, l’utilisation de cette «monnaie virtuelle» se limite à un petit cercle d’initiés qui voit en elle un potentiel important d’enrichissement, bien qu’elle ne soit approuvée par aucune autorité compétente, et présente, de fait, d’importants risques pour ses utilisateurs.
En réalité, interdiction ou pas, le Maroc n’a jamais cessé d’être actif sur les transactions en cryptomonnaie. Selon le rapport publié par Local Bitcoins en août 2018, le Maroc figure tout de même à la 36ème place mondiale avec un volume de transactions de plus de 6 millions de dollars, depuis l’apparition du Bitcoin. Il est aussi le troisième pays arabe, derrière les Emirats Arabes Unis (34 millions de dollars) et l’Arabie Saoudite (24 millions de dollars). Au niveau du continent africain, le Maroc arrive à la quatrième place, derrière le Nigéria (258 millions de dollars), l’Afrique du Sud (98 millions de dollars), et le Kenya (25 millions de dollars).
La position ferme des autorités marocaines est partagée par les principales institutions multilatérales mondiales comme le Fonds monétaire international (FMI), qui voit dans l’émergence des cryptomonnaies une menace au système financier et aux Banques centrales.
Depuis, ces institutions qui ne voulaient pas entendre parler de «cryptos», ont mis de l’eau dans leur vin. Aujourd’hui, en collaboration avec la Banque mondiale, le département du FMI a mis au point une cryptomonnaie d’expérimentation intitulée «Learning Coin».
Celle-ci ne sera pas mise à disposition du grand public, mais elle devrait permettre aux deux organismes de mieux comprendre les enjeux autour de ces devises virtuelles et de la blockchain. Il n'est jamais trop tard... ◆