Des éleveurs redoutent l’annulation de cette fête à cause de la crise sanitaire.
La perte d’emploi et la baisse de revenu de milliers de Marocains risquent de peser sur la demande.
Par C.J
Plus que deux mois nous séparent de Aïd Al-Adha. Les préparatifs vont bon train dans le monde rural en prélude à cet événement très suivi par les Marocains. Chaque saison a ses propres spécificités; l’actuelle se déroule dans un environnement très particulier marqué par la crise sanitaire qui a généré une crise économique.
En effet, les éleveurs, qui ont déjà commencé les opérations d'engraissement des moutons depuis un à deux mois, ne cachent pas leurs inquiétudes. Plusieurs incertitudes planent cette année. Ils craignent une interdiction pure et simple de Aid Al Adha du fait qu'il a été à l'origine de la forte propagation du virus l'année dernière. Il faut rappeler cependant que la fête du sacrifice a un rôle important sur le plan socioéconomique. La vente des bêtes assure le transfert de pas moins 9 milliards de DH des villes vers les campagnes.
C'est une bouffée d'oxygène pour les exploitants afin d'améliorer leur trésorerie impactée par le renchérissement de la flambée du coût de l'aliment de bétail sous l'effet de la sécheresse. Certes, les performances de l'actuelle saison ont eu un effet déterminant qui a permis d’absorber la flambée des cours. Mais cette situation ne sera réalisable dans les faits qu'à partir de la fin des moissons et le début de la commercialisation des récoltes.
L’autre fait majeur relaté par les exploitants concerne les interdictions de déplacement et les restrictions sur la commercialisation qui risquent de perturber les transactions.«L'année dernière, nous avons beaucoup souffert de ces contraintes. L'interdiction de déplacement deux jours avant Aid Al Adha a porté un coup fatal à notre activité», souligne Mohamed Maskini, marchand de bétail dans la région de Chaouia. Les éleveurs et les commerçants d'ovins et de caprins évoquent un autre facteur qui pèse sur la filière. Il a trait notamment à la diminution du pouvoir d'achat des citoyens impactés par la crise économique.
«Même si la plupart des Marocains sont très attachés à observer le rituel, certains seront dans l'incapacité de le faire cette année, parce qu'ils ont soit perdu leur emploi soit leur revenu a beaucoup baissé. Ce phénomène a été constaté l'année dernière et il est probable qu'il le sera encore cette année. Plusieurs éleveurs ont décidé de réduire leurs achats afin de ne pas se retrouver avec un stock important de bêtes à écouler par la suite, avec tout ce que cela représente comme surcoût et marges perdues», explique Redouane Haddaj, éleveur dans la région de Benslimane.