Par Fatima Ouriaghli, directrice de la publication
Le coronavirus ne tue pas seulement. Il révèle aussi d’autres facettes de nos Etats. En effet, les masques sont tombés quand s’est déclarée la «guerre des masques».
Les règles de bienséance internationales et les convenances ont volé en éclats. La diplomatie économique est piétinée. La notion de «pays ami et frère» est reléguée aux calendes grecques.
Tout cela n’a pas sa place dans cette crise sanitaire qui, au demeurant, a montré le vrai visage des Etats. Des Etats «pirates», «braqueurs», «brigands», comme en témoignent les accusations qui se multiplient à l’international, sur fond de brouille diplomatique.
La France accuse les Etats-Unis d’avoir détourné sa cargaison de masques sur le tarmac d’un aéroport en Chine en triplant le prix d’achat. La Suède a accusé la France d’avoir saisi pas moins de 4 millions de masques qui lui étaient destinés. Les tensions diplomatiques extrêmes ont finalement ramené la France à la raison.
L’Allemagne, de son côté, accuse les Américains d’avoir intercepté leur commande de 200.000 masques à Bangkok, qualifiant cela d’«acte moderne de piraterie». «Même en temps de crise planétaire, les règles du Far-West ne devraient pas s’appliquer», s’offusque Berlin.
Et quand ce ne sont pas des masques, ce sont des médicaments qui sont détournés, voire saisis. C’est ce qu’a fait l’Espagne, qui a réquisitionné des médicaments destinés au Maroc, selon El Mundo.
Deux enseignements principaux ressortent de tout cela. Le premier est que la Chine, d’où est venu le coronavirus, s’en met plein les poches en fourguant ses masques au monde entier et aux plus offrants. Très cocasse avec le recul.
Le second est que l’égoïsme a pris le dessus sur les principes de solidarité qui doivent régir les relations internationales. Chacun prêche désormais pour sa paroisse.
Cela peut-il néanmoins se comprendre ? A certains égards, oui. Car tous ceux qui sont au pouvoir actuellement répondront de leurs actes une fois la pandémie passée. Ils seront jugés par rapport aux décisions prises pour gérer la crise sanitaire et économique, mais surtout par rapport à tout ce qu’ils ont fait pour protéger leurs populations. C’est de cela que se souviendront les citoyens.
Le choix est donc vite fait : mieux vaut se coltiner les critiques des autres et avoir la reconnaissance de ses citoyens que l’inverse.
Tout cela laissera cependant des séquelles : le monde ne sera plus pareil et les relations internationales seront forcément régies par d’autres dogmes.