Outre les dossiers chauds auxquels le gouvernement devra s’attaquer dès le début de l’année prochaine, à savoir la retraite, la compensation, la flexibilité du Dirham, le déficit budgétaire, la dette intérieure et extérieure…, 2018 sera également celle des défis environnementaux. En effet, le Maroc s’est engagé à travers ses CDNs (Contribution déterminée au niveau national) à s’attaquer à l’une des menaces les plus redoutables du XXIème siècle, à savoir le changement climatique.
Il s’est fixé comme objectif dans le cadre de l’Accord de Paris de réduire ses émissions de GES de 42% à l’horizon 2030, dont 25% conditionnées par un appui substantiel de la communauté internationale. Au total, 85 Mds de dollars (35 Mds pour l’adaptation et 50 Mds de dollars pour l’atténuation) sont nécessaires pour réaliser cet engagement.
Mais en attendant que l’aide internationale prenne forme, le Maroc devra continuer sur sa lancée et réaffirmer sa détermination à jouer un rôle, aussi minime soit-il, dans la lutte contre le changement climatique.
Surtout que 2018 sera le moment de vérité à plusieurs niveaux, comme l’a affirmé Nicolas Hulot, ministre français de la Transition écologique. La COP24, qui se tiendra en décembre 2018 à Katowice en Pologne, est la rencontre climatique la plus attendue après celle de Paris en 2015 qui s’est soldée par l’accord historique.
Il sera question d’identifier ceux qui continuent le combat et ceux qui ont rebroussé chemin. Ceux qui vont honorer leurs engagements (environnementaux et financiers) et ceux qui se désisteront. Ceux qui joueront le jeu lors de la COP24 en réévaluant leurs ambitions et ceux qui se contenteront de ce qui a été décidé dans l’Accord de Paris.
En gros, rien n’est gagné. Cela n’empêche pas des pays, à l’instar du Maroc, de garder espoir et de ne rien lâcher, étant convaincus que la lutte contre le réchauffement climatique est une menace imminente. Toutefois, malgré toutes les bonnes volontés, sans un appui financier international, les engagements pris dans le cadre des CDNs resteront lettre morte. Ce qui n’est pas sans conséquence pour les pays en voie de développement qui sont les plus vulnérables aux effets du changement climatique.
La COP24 sera donc un rendez-vous climatique décisif dans la concrétisation de l’Accord de Paris. Les 196 pays signataires devront évaluer leurs émissions de gaz à effet de serre et dresser un bilan d’étape à fin 2018. Il ne s’agit pas de faire figure de bons élèves mais de passer aux actes.
Conscient de l’enjeu, le Maroc prend ses engagements très aux sérieux. Plusieurs actions sont prévues en 2018 par le département du Développement durable pour accélérer la cadence de réalisation des projets d’urgence de requalification environnementale, mettre en œuvre la Stratégie nationale du développement durable tant au niveau régional que territorial et préserver la diversité biologique.
Au menu, figurent également des programmes de protection et valorisation de l’environnement ainsi que l’économie verte. Le budget 2018 du Secrétariat d’Etat chargé du Développement durable est de 1,5 Md de DH, dont 911 MDH seront consacrés à l’investissement, notamment dans l’assainissement liquide et le traitement des eaux usées, la gestion et la valorisation des déchets, ainsi que l’amélioration de la qualité de l’air.
Le 4C au cœur des défis du changement climatique en 2018
Gagner la guerre climatique ne suppose pas de mobiliser des moyens financiers uniquement mais de décliner des actions concrètes. Pour cela, le renforcement des compétences des différents intervenants est nécessaire. «C’est une question vitale et structurante pour réussir la lutte contre le changement climatique», précise Abdelhadi Bennis, président du Club environnement, association Ribat Al Fath.
Et d’ajouter : «dans ce domaine, le Maroc a pris une excellente initiative. Il a créé le Centre de compétence changement climatique (4C) dédié à l’appui et à la formation des cadres sur les thèmes particulièrement pertinents pour la mise en oeuvre de l’Accord de Paris et des contributions déterminées au niveau national (NDC) pour limiter le réchauffement de la planète à un seuil inférieur à 2°C».
Le 4C a déjà franchi les étapes administratives relatives au statut, au règlement intérieur, au cahier des procédures et au financement. Il est actuellement mobilisé pour mettre au point les programmes et projets ainsi que les modalités de mise en œuvre.
Au niveau international, le 4C assurant déjà le secrétariat du groupe de Paris sur le renforcement de capacités, compte jouer le rôle de plateforme de référence et de moteur pour l’élaboration et la mise en œuvre des NDC.
Au niveau africain, il a pris des engagements pour soutenir plusieurs pays, en particulier ceux du bassin du Congo.
Quant au niveau national, il est arrivé au stade de fixation d’objectifs chiffrés. D’ici 2023, des milliers de cadres des administrations publiques, du secteur privé, des collectivités territoriales et des ONG seront formés sur tous les thèmes en relation avec le changement climatique, notamment sur la planification et le suivi/évaluation, la transparence et le financement.
«Le 4C est une excellente initiative, qui a déjà franchi plusieurs étapes et qui arrivera à dépasser celle de l’opérationnalisation. Mon espoir est que le démarrage puisse avoir lieu en 2018 afin de donner la preuve, lors de la COP24, que le Maroc tient ses promesses», souligne Abdelhadi Bennis.
Des centaines de projets seront soutenus au niveau de la conception et bénéficieront d’une assistance et d’un accompagnement de proximité. Les projets les plus performants, constituant des «initiatives d’excellence», seront modélisés et feront l’objet d’une promotion intensive aux niveaux nationaux, africains et internationaux. ■
L. Boumahrou