Echanges commerciaux : cap vers l’Afrique

Echanges commerciaux : cap vers l’Afrique

La nouvelle feuille de route du commerce extérieur 2025-2027 présente une promesse de réalisation de 84 milliards de dirhams supplémentaires dans le secteur de l’export. La réalisation de cet objectif passe, entre autres, par une diversifi cation des marchés, notamment en ciblant davantage l’Afrique.

Longtemps arrimée aux flux commerciaux européens totalisant plus de 70% de ses échanges, Rabat cherche à rééquilibrer cette dépendance en misant sur d’autres zones géographiques à fort potentiel, à l’instar de l’Afrique. Les exportations marocaines vers ce continent progressent au fil des années mais à un rythme lent en comparaison à d’autres zones. Selon les données de l’Office des changes, au cours des dix dernières années (2015- 2024), elles sont passées de 21,39 à 31,62 Mds de DH, en hausse de 47,82%.

Une progression significative, mais encore modeste par rapport au potentiel continental. Omar Hejira, secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur, a réaffirmé, lors de la présentation de la feuille de route du commerce extérieur 2025-2027, que le Maroc perdait chaque année un potentiel inexploité d’exportations estimé à 120 milliards de dirhams, dont 12 milliards au niveau de l’Afrique. Conscient de ce potentiel inexploité, le Royaume collabore à la mise en place effective de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), dont il en est signataire depuis 2018, en vue d’élargir son marché d’export.

«Avec 53 pays et près de 1,5 milliard d’habitants, l’Afrique offre un potentiel considérable. Au moyen de la ZLECAf, le Maroc peut bâtir des ponts commerciaux solides et durables. Cette intégration Sud-Sud est d’autant plus stratégique qu’elle permet de réduire la dépendance aux marchés matures et de renforcer l’influence du Royaume à l’échelle continentale», affirme Ahmed El Maghribi, expert en commerce international. Et d’ajouter que «ces accords de libre-échange entrés en vigueur en janvier 2021, permettent d’installer une base commerciale durable, notamment pour les véhicules, les engrais, les produits agroalimentaires et les textiles. La demande y est croissante, et le potentiel encore largement sous-exploité».

Cette réalité est d’autant plus perceptible que les exportations marocaines sont concentrées sur un nombre limité de partenaires africains, nous précise El Maghribi. Il cite ces quelques partenaires : Djibouti, premier client africain (plus de 500 millions de dollars), suivi par la Côte d’Ivoire, la Mauritanie, le Sénégal, la Guinée, la Tunisie, le Bénin, le Mali et le Nigeria, avec des volumes en nette progression. Mais le Maroc ne baisse pas pour autant les bras, malgré des défis d’ordres tarifaires et logistiques. Il multiplie les rencontres et les missions économiques de haut niveau avec d’autres pays africains. En juin dernier, l’Association marocaine des exportateurs (Asmex) a organisé une mission économique de haut niveau en Angola. Et ce, pour valoriser les opportunités de partenariat stratégique entre les deux pays, notamment dans les secteurs prioritaires comme l’agro-industrie, les infrastructures et les énergies renouvelables.

L’Angola, en pleine diversification économique et membre influent de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), représente une porte d’entrée stratégique pour les exportateurs marocains en Afrique australe. Cette mission s’inscrit dans la continuité des actions menées par l’Asmex au Ghana et en Égypte dont les exportations devraient enregistrer une hausse significative, passant de 755 MDH actuellement à 5 Mds de DH à horizon 2027. L’Association entend continuer les négociations avec des pays comme l’Ethiopie, la RDC, etc.

 

L’exemple OCP 

Le Maroc gagne déjà du terrain en Afrique dans certains secteurs stratégiques. En premier lieu, l’agroalimentaire. Grâce à la puissance de l’OCP et à une industrie agroalimentaire en pleine expansion, le Maroc est bien positionné pour répondre aux besoins croissants de sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest et du Centre. En 2023, plus de 35% des exportations agroalimentaires marocaines à destination de l’Afrique concernaient les engrais, les produits transformés, les semences et le sucre raffiné. Le groupe OCP, avec ses projets industriels au Nigeria, en Côte d’Ivoire et au Ghana, incarne ce modèle de coopération Sud-Sud par l’investissement productif.

Dans le secteur de l’industrie automobile, les exportations marocaines vers l’Égypte sont passées de 400 à 3.000 véhicules actuellement, avec une perspective d’atteindre 5.000 unités en 2025 et 8.000 à l’horizon 2026. Pour d’autres niches, les opportunités sont à la portée du Royaume. C’est le cas du secteur pharmaceutique marocain, qui regroupe plus de 40 unités de production, couvrant 70% des besoins nationaux et cherche de nouveaux débouchés. Le déficit chronique d’accès aux médicaments dans plusieurs pays subsahariens offre une fenêtre de tir importante.

La relance du secteur textile passe aussi par la conquête de nouveaux marchés africains. Avec des coûts compétitifs et une capacité de réactivité accrue (notamment via les unités de Tanger, Kénitra et Casablanca), le Maroc peut proposer des produits adaptés à la classe moyenne africaine émergente, en particulier dans les pays d’Afrique de l’Ouest comme le Bénin, le Sénégal ou la Côte d’Ivoire. À travers Masen, Nareva et d’autres opérateurs, le Maroc développe aussi une expertise croissante dans l’ingénierie énergétique. La coopération énergétique avec des pays comme le Nigeria (gazoduc Atlantique) ou encore le développement de projets solaires intégrés en Mauritanie et au Niger peuvent faire émerger des chaînes de valeur régionales dans les ENR.

De plus, le secteur de l’ingénierie, de la planification urbaine et de l’expertise technique représente une niche d’exportation de services en forte croissance. La diversification des exportations vers l’Afrique est non seulement possible, mais souhaitable pour réduire la dépendance aux marchés européens et stimuler l’industrialisation régionale. Encore faut-il lever les freins structurels, investir dans la formation, fluidifier les procédures douanières, et penser les projets d’exportation non comme des flux sortants, mais comme des leviers d’intégration économique durable et équilibrée. Le futur du commerce marocain se joue autant dans les ports que dans les usines africaines.

 

 

 

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