L'appel de Tanger des pays africains: dehors la «rasd» !

L'appel de Tanger des pays africains: dehors la «rasd» !

La qualité de membre de la prétendue «RASD» au sein de l'Union africaine (UA) doit être réglée. Il s'agit de corriger une situation qui n'a que trop duré depuis quatre décennies. Des pays africains entendent œuvrer activement dans ce sens. Ainsi, pas moins de 16 anciens Premiers ministres et ministres des Affaires étrangères africains avaient lancé, voici trois mois, à l'issue d'une table-ronde organisée dans le cadre du Forum MEDays (2-5 novembre), tenu dans la capitale du Détroit, l' «Appel de Tanger».

Un Appel qui prône fermement la nécessité de mettre fin à «l'anomalie historique, l'aberration juridique et le contresens politique qu'est l'admission illégale et illégitime, puis le maintien injustifié au sein de l'organisation continentale de la pseudo-RASD». Tout est là. C'est une entité fantoche, artificielle, imposée à l'UA. Elle ne réunit aucun des éléments constitutifs d'un Etat, à savoir un territoire - ses camps de réfugiés ou plutôt de séquestrés se trouvent à Tindouf, en territoire algérien-, une population et un pouvoir effectif. Aucune souveraineté ni indépendance; pas davantage, elle n'a quelque responsabilité juridique internationale. Une entrave au bon fonctionnement de l'UA.

Une menace de surcroît pour l'unité africaine, l'intégration politique du continent ainsi que pour la stabilité et la sécurité régionales. L’initiative des signataires de l’«Appel de Tanger» était appelée à se prolonger dans deux directions. La première portait sur la création d'un «Groupe de contact» devant porter cet Appel auprès des Chefs d'Etat africains et des décideurs de l'Union africaine. La seconde, elle, était la préparation et la publication d'un «Livre Blanc» dont un résumé a été présenté à Marrakech, samedi 28 janvier, sous l'égide du think tank marocain Amadeus, initiateur du Forum MEDays. C'était là une première réunion de suivi de l'Appel de Tanger.

 

Un prérequis

Trois anciens ministres des Affaires étrangères de Madagascar, du Lesotho et de la Gambie ont d'ailleurs signé à cette occasion cet Appel. Avec ces nouveaux pays, le nombre des signataires est désormais de 19 pays. L'exclusion de la «RASD» s'insère ainsi activement dans une dynamique continentale et internationale favorable; le réalisme et le pragmatisme doivent prévaloir. Il s'agit là, estiment les signataires, d'un préequis, une exigence d'impartialité et de crédibilité de l'UA sur la question du Sahara marocain. L'organisation continentale ne peut se satisfaire d'une situation ou une entité non-étatique siège comme membre; pas davantage, le statu quo n'est encore tenable parce qu'il s'agit de sortir l'UA de ce  «péché originel» et de cette flagrante contradiction.

Le Livre Blanc, qui a été remis officiellement au ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, lors d'une cérémonie officielle à Rabat, le lundi 30 janvier, souligne qu'un processus exclusif et inclusif est mené par les Nations unies et qu'il encourage la recherche d'une solution politique négociée et mutuellement acceptable, basée sur le réalisme et le sens du compromis. Toutes les résolutions du Conseil de sécurité, depuis une quinzaine d'années, ont consacré ces principes, lesquels prennent en compte la prééminence de l'Initiative marocaine en date du 11 avril 2007 soumise au Conseil de sécurité.

 

Violation de la Charte

Ce document a été préparé et débattu, sur la base des cinq séminaires sousrégionaux et de la table-ronde de Tanger du 4 novembre 2022. Il invite instamment à des solutions concrètes offertes à l’UA pour rééquilibrer définitivement sa position sur la question du Sahara marocain en soutenant le processus onusien exclusif. Il faut rappeler à cet égard que le sommet de Nouakchott de juillet 2018 a adopté la Décision 693 (XXXI) qui a consacré le rôle exclusif du Conseil de sécurité dans la recherche d'une solution. Le «Livre Blanc» considère que s'impose désormais «la suspension définitive, l'exclusion ou l'expulsion de la «RASD» de l'  «UA». Il retient pas moins de «dix considérations factuelles» qui ne peuvent que pousser l'organisation continentale à une décision responsable et conséquente.

La «RASD» n'est pas un Etat, mais une entité fantoche, installée en territoire algérien et soumise à la souveraineté de l'Algérie. Elle ne dispose d'aucune responsabilité juridique internationale; elle n'est pas partie- en dehors du seul cadre de l'UA- à aucun instrument juridique ou conventionnel international. Elle est un «membre» de l'UA qui n'est pas égal ni en droit ni en obligations aux autres membres de cette organisation panafricaine. Son admission en novembre 1984 a été un coup de force juridique en violation flagrante de la Charte de l'OUA et des dispositions de l'article 4 de celle-ci sur l'admission de «tout Etat africain indépendant et souverain». Le maintien de la «RASD» est en violation des objectifs de la Charte de l'UA et des objectifs qu'elle s'est assignés: défendre la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance des Etats membres; promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité sur le continent; promouvoir et protéger les droits de l'homme. La «RASD»  ? N'est-ce pas des milices armées avec des connexions extrémistes, séparatistes, terroristes et de criminalité transnationale (trafics d'armes, contrebande, immigration clandestine, drogue,...) sévissant aussi au Sahel ? La «RASD» ?

C'est aussi une violation constante des principes de la Charte définis par le même article 4 : interdiction de recourir ou de menacer, de recourir à l'usage de la force entre les Etats membres; non-ingérence dans les affaires intérieures d'un autre Etat membre; coexistence pacifique entre les Etats membres et leur droit de vivre dans la paix et la sécurité. Cette entité fantoche viole le cessez-le feu instauré en septembre 1991 par une résolution du Conseil de sécurité -tous les rapports annuels de la Minurso en font état-. Pis encore, depuis plus de deux ans, précisément depuis le 20 novembre 2020, elle a décidé de ne plus respecter le cessez-le-feu. Lors du XVIème congrès du mouvement séparatiste, elle a décidé par la voix de Brahim Ghali - réélu à sa tête - de «continuer la guerre»... Elle est hors sol, rejetant le processus de négociation consacré par le Conseil de sécurité sous l'égide de l'Envoyé personnel du Secrétaire général de l'ONU, le diplomate Staffan de Mistura. L'«Appel de Tanger» doit se concrétiser au sein de l'UA. L'exclusion de la «RASD» traduit une normalisation institutionnelle et politique. Elle va conforter l'UA et assurer sa prémunition en consolidant sa crédibilité et sa neutralité. Enfin, elle sera un facteur de soutien au processus d'intégration régionale -on voit sa paralysie dans l'UMAet continentale avec la mise en œuvre de la Zlecaf. Alors ? Dehors la «RASD»!

 

 

Par Mustapha SEHIMI

Professeur de droit, Politologue (UM5, rabat)

 

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