Aux origines du gaming : à quand une vraie industrie ?

Aux origines du gaming : à quand une vraie industrie ?

Après avoir exploré l’histoire du gaming au Maroc, la montée en puissance de l’e-sport et les défis techniques du secteur, ce quatrième volet s’intéresse à deux éléments fondamentaux qui structurent l’avenir de l’industrie vidéoludique : le streaming et le financement.

 

Par K. A.

Ils sont des dizaines de milliers à allumer leur webcam, lancer un live et espérer bâtir une communauté. Pourtant, derrière les écrans, les streamers marocains font face à une réalité bien plus rude. Monétisation compliquée, sponsoring inexistant, infrastructures limitées et financements quasi-absents… Le streaming au Maroc peut-il réellement devenir une industrie viable, capable d’attirer des investisseurs et de générer des revenus durables ? Le streaming de jeux vidéo poursuit son ascension à l’échelle mondiale, et le Maroc tente progressivement de s’inscrire dans cette dynamique. D’ici 2025, le secteur devrait générer 15,32 milliards de dollars de revenus, un chiffre qui pourrait atteindre 18,41 milliards en 2029.

À l’échelle nationale, selon Statista, le marché du streaming est estimé à 37,49 millions d’euros, signe d’un potentiel encore en développement. Les plateformes comme Twitch, YouTube Gaming et Kick attirent de plus en plus de créateurs. Certains parviennent même à fédérer des milliers de spectateurs par live, preuve que la demande existe. Pourtant, le streaming reste peu viable économiquement pour la majorité des streamers marocains. Contrairement aux streamers européens ou américains, les créateurs marocains peinent à générer des revenus via les abonnements et les dons.

«J’ai une communauté fidèle qui me suit tous les jours, mais entre Twitch qui prend une grosse commission sur les abonnements et l’absence d’un vrai système de paiement local, c’est très compliqué d’en vivre», explique Amine «Skyzen» streamer spécialisé dans les FPS. «Le vrai problème, c’est que les annonceurs ne s’intéressent pas encore au gaming. On a un public, mais pas de sponsors locaux prêts à investir», ajoute Sara «GameQueen», une streameuse qui diffuse principalement des jeux narratifs et du Just Chatting. En l’absence de partenariats et d’investissements publicitaires, la majorité des streamers doit cumuler plusieurs activités pour maintenir leur passion.

Un écosystème en quête de maturité

Si le streaming souffre d’un manque de monétisation, le financement global du secteur du gaming au Maroc est lui aussi en difficulté. Studios de développement, événements e-sportifs, infrastructures de streaming : tous font face à une frilosité des investisseurs. Le gaming est encore perçu comme un marché de niche au Maroc. «Les investisseurs en capital-risque ne voient pas l’intérêt d’investir, estimant que l’écosystème n’est pas assez mature», souligne Khalid Saouni, consultant en financement numérique.

Certains fonds de capital-risque comme Maroc Numeric Fund s’intéressent timidement aux startups technologiques, mais peu d’entre eux misent sur le gaming. Pourtant, la tendance mondiale prouve que l’industrie vidéoludique représente un secteur rentable. Pour pérenniser cette dynamique, plusieurs leviers de financement pourraient être activés. «La création de fonds spécialisés, l’instauration d’incitations fiscales pour les investisseurs, ainsi que l’élargissement des programmes de subventions et de prêts à taux préférentiels sont des pistes à exploiter pour dynamiser l’écosystème», poursuit Saouni.

Des initiatives timides, mais encourageantes

Si les financements privés restent rares, quelques initiatives commencent à émerger. Tout récemment, un programme de formation dédié aux métiers du jeu vidéo a été lancé en partenariat avec Isart Digital et l’Université Internationale de Rabat (UIR). Les jeunes marocains bénéficieront d’une prise en charge complète des frais de scolarité, habituellement élevés pour ce type de formation, grâce à la coopération des partenaires. Aussi, le Maroc a investi 360 millions de dirhams dans la création d’une zone dédiée au gaming à Rabat (RGC).

Ce projet ambitionne de créer un environnement favorable à l'innovation technologique. À terme, il est prévu que cette zone génère 5.000 emplois et près de 5 milliards de dirhams de revenus d'ici 2030. En parallèle, le Royaume met en place des plateformes dédiées au soutien de l'industrie du gaming. Ces plateformes servent de points de rencontre entre les développeurs, les startups, les investisseurs et les institutions. Le gaming est à un tournant : s’il parvient à structurer son financement et à mieux exploiter le streaming comme levier économique, le Maroc pourrait enfin s’imposer sur la scène africaine et au-delà. Mais pour cela, il faudra un réel engagement des acteurs publics et privés pour transformer le pays en une véritable nation du gaming.

 

 

 

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