Cryptomonnaies: la guerre en Ukraine divise le monde

Cryptomonnaies: la guerre en Ukraine divise le monde

Après le début de la guerre en Ukraine et l’imposition de sanctions économiques contre la Russie, les projecteurs ont été braqués sur la cryptomonnaie, alimentant la spéculation selon laquelle son utilisation pourrait aider Moscou à contourner le blocus économique de l'Occident.

 

Par K. A.

Des pays comme la Chine et le Salvador ont déjà commencé à mettre en œuvre différentes options réglementaires. Certaines juridictions, comme l’Inde, ont modifié les lois existantes, d'autres, comme le Liechtenstein, ont proposé des modèles sur-mesure.

Une autre approche, apparemment favorisée par l'Union européenne et les Émirats Arabes Unis, propose de mettre en place des régulateurs entièrement nouveaux pour traiter avec l'industrie de manière globale. L'Ukraine, qui mène une défense acharnée contre l'invasion russe, affirme avoir été la pionnière d'une nouvelle forme de soutien financier.

Depuis le 26 février, lorsque les responsables ukrainiens ont commencé à tweeter des appels aux dons de cryptomonnaie, le gouvernement ukrainien a déclaré avoir encaissé près de 67 millions de dollars sur son objectif de 200 millions de dollars. «La crypto joue un rôle important dans la défense de l'Ukraine», a écrit Alex Bornyakov, vice-ministre du pays chargé de la Transformation numérique, sur le site Web de dons du pays.

Au moment où l'UE envisage de nouvelles mesures contre la Russie, les législateurs américains et britanniques ont fait part de leurs inquiétudes quant au fait que les transactions cryptographiques pourraient devenir une porte dérobée pour transférer de l'argent vers et depuis la Russie. Dans ce sens, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, a alerté sur la «menace» que représentent les cryptomonnaies obtenues en échange de Roubles pour tenter de contourner les sanctions des pays occidentaux envers la Russie. Parmi toutes les catégories d'actifs numériques, «les crypto-actifs me préoccupent le plus dans le contexte russe», a déclaré la banquière centrale lors d'un forum sur l'innovation de la Banque des règlements internationaux. Et de souligner que les cryptomonnaies échappant au système bancaire traditionnel sont «certainement utilisées comme moyen de contourner les sanctions qui ont été décidées par de nombreux pays à travers le monde contre la Russie et des acteurs spécifiques». Particuliers ou entreprises russes «essaient évidemment de convertir leurs Roubles dans les crypto-actifs», a relevé Lagarde.

 

Est-ce vraiment efficace ?

«L’invasion de l’Ukraine par la Russie pourrait accélérer l’adoption des monnaies numériques par les Banques centrales», selon Larry Fink de BlackRock. Le PDG du gestionnaire de fonds de 10.000 milliards de dollars l’a qualifié de l’un des résultats «les moins discutés» de la guerre, qui a commencé il y a un mois, dans une lettre adressée aux actionnaires. Pour la Banque d'Angleterre (BoE), «la valeur potentielle des cryptoactifs a été multipliée par dix entre début 2020 et novembre 2021, pour atteindre 2.900 milliards de dollars à son plus haut».

Aujourd'hui, il existe 18.142 cryptomonnaies, 460 cryptoéchanges et la capitalisation boursière des cryptomonnaies s'élève à 1,7 billion de dollars. Toutes les 24 heures, 91 milliards de dollars de cryptos sont échangés, la plupart étant des bitcoins ou des Ethereum. Début mars, le président Biden a signé le décret exécutif tant attendu sur la garantie d'un développement responsable des actifs numériques. Ce décret engage la Maison Blanche à participer à la recherche sur les cryptomonnaies et à engager les départements du gouvernement à collaborer à la création d'un cadre réglementaire pour les actifs numériques. Il décrit également une «approche pangouvernementale pour faire face aux risques et exploiter les avantages potentiels des actifs numériques et de leur technologie sousjacente».

À l'échelle mondiale, les Banques centrales et les régulateurs ont déjà les yeux sur cette tendance croissante. Au Maroc, Bank Al-Maghrib (BAM), aux côtés d'autres Banques centrales européennes, est en pourparlers avec le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) sur l'établissement d'un cadre réglementaire régissant les cryptomonnaies. Lors de la dernière conférence de presse tenue à l’issue du Conseil de BAM, Abdellatif Jouahri a déclaré qu’«étant donné l'absence d'un cadre juridique régissant les cryptomonnaies au niveau national et international, nous ne pouvons pas encore adopter les cryptomonnaies». Compte tenu de la taille de l'industrie et de la poussée réglementaire imminente, ne convient-il pas maintenant pour le Maroc de s’intéresser davantage à ce qui pourrait être la monnaie de demain ? 

 

 

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