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Orange Bank vise 25% de parts de marché dans 10 ans (Reuters)

Orange Bank vise 25% de parts de marché dans 10 ans (Reuters)

 

Orange lance sa banque sur mobile jeudi. Un lancement scruté par les banques et les autres opérateurs

 

 

Le numéro un français des télécoms Orange lance sa banque sur mobile jeudi avec l'ambition de croquer 25% du marché de la banque en ligne en France en pariant sur l'usage exponentiel des smartphones pour concurrencer les acteurs historiques.

Ce lancement s'inscrit parmi les tentatives diverses mises en œuvre par les opérateurs télécoms pour diversifier leurs sources de revenus sur des marchés matures et retenir des clients de plus en plus volages sur fond de guerre des prix.

Il aura valeur de test pour les autres opérateurs télécoms et pour le secteur bancaire, Orange étant le premier opérateur télécoms à lancer une banque en propre offrant, à terme, une gamme complète de services financiers dans un marché développé.

«Nous visons 2 millions de clients en dix ans. Cela devrait représenter à peu près 25% du marché mais j’espère que nous ne nous arrêterons pas à deux millions et que nous serons leader sur ce marché dans quelques années», a déclaré à Reuters TV le directeur général d'Orange Bank André Coisne, recruté l'an dernier après avoir supervisé les lancements des banques en ligne d'ING Direct et de BforBank (Crédit agricole).

Le projet a connu des ratés à l'allumage avec un lancement annoncé pour l'été avant d'être décalé à la rentrée puis au 2 novembre, à un mois d'une journée investisseurs clef pour le PDG Stéphane Richard dont le mandat est remis en jeu l'an prochain.

Mais il intervient à un moment propice en France, où 793,4 millions de paiements bancaires en ligne ont été réalisés l'an dernier selon les statistiques de la Banque centrale européenne, contre 586,2 millions en 2014.

Le cabinet Ernst & Young estime que le nombre de clients qui ouvriront un compte ou souscriront un prêt en ligne devrait être multiplié par six pour atteindre 17 millions dans les 10 prochaines années.

Le contexte réglementaire est également favorable avec l'entrée en vigueur l'an prochain d'une nouvelle directive européenne imposant aux banques de rendre accessibles des données sur leurs clients à condition que ces derniers y consentent. Elle facilitera la possibilité pour de nouveaux acteurs comme Orange de mieux cibler leurs clients et de leur proposer des offres plus intéressantes.

Quelque 25.000 personnes ont demandé à recevoir des informations sur Orange Bank, a indiqué André Coisne, un «bon début» selon lui, même si le chiffre ne représente qu'une fraction des 21 millions de clients mobiles de l'opérateur.

Orange, qui compte au total 263 millions de clients dans près d'une trentaine de pays, n'a cessé d'étoffer son offre de services financiers depuis une décennie à travers les marques Orange Cash, Orange Money et plus récemment Orange Finanse en Pologne en collaboration avec la banque mBank.

Le groupe vise un chiffre d'affaires de 400 millions d'euros dans les services financiers en 2018, dont la moitié en Afrique.

Le continent fait figure de pionnier en matière de banque en ligne. Environ 12% des adultes y ont un compte mobile contre 2% en moyenne dans le monde, selon une enquête de la Banque mondiale en 2014.

Les opérateurs télécoms tentent depuis longtemps de répliquer ce succès dans les économies développées mais en se reposant le plus souvent sur des partenariats avec des banques déjà existantes et pour un succès jusque-là limité.

L'espagnol Telefonica a notamment lancé O2 Banking en utilisant la plateforme technologique de l'allemand Fidor Bank mais il n'a pas communiqué d'objectifs pour ce segment.

Pour fidéliser leurs clients, beaucoup d'opérateurs ont jusqu'à présent misé sur les contenus en incluant dans certains forfaits l'abonnement à un service de musique en streaming comme Deezer, un kiosque presse ou une chaîne sportive, à l'image de l'offensive éclair menée par le géant Altice.

La banque est une stratégie de diversification plus efficace, estime toutefois un investisseur minoritaire d'Orange, en évoquant des barrières d'entrée élevées qui limitent la concurrence et le caractère captif d'un service essentiel dans la vie quotidienne des consommateurs.

«De mon point de vue, c'est plus intelligent que de dépenser des millions dans des droits sportifs qui arrivent à échéance au bout de deux-trois ans», estime cet investisseur.

L'absence de réel précédent sur les marchés occidentaux est ce qui rend l'initiative d'Orange si culottée, estime pour sa part Tom Levine, responsable mondial des dossiers télécoms chez Allen et Overy.

«J'espère que leur ambition va au-delà de retenir leurs clients à travers des offres croisées car il existe une vraie opportunité pour les telcos dans la banque de devenir une plateforme grâce à la confiance qu'ils inspirent, de la puissance de leur marque et de leur importante clientèle».

 

La riposte s’organise

 

Le projet devrait représenter un coût annuel de l'ordre de 100 millions d'euros pour Orange avant qu'il n'atteigne l'équilibre, attendu d'ici environ 5-7 ans, un montant modique au regard des 7,2 milliards investis au total cette année.

Orange, dont la précédente tentative de diversification dans les contenus a tourné court, pourra notamment s'appuyer sur son réseau déjà existant de boutiques et sur sa notoriété.

Pour séduire, la jeune banque, qui mettra à disposition un compte courant doté d'une carte de paiement gratuite, promet une interface simple et innovante -virements par textos, état du compte en instantané, paiements avec le smartphone via Apple ou Android Pay - avec en prime un cadeau de bienvenue de 80 euros.

«Nos coûts, c’est à peu près le tiers de ceux d’une banque traditionnelle donc on a besoin de moins de marge», souligne André Coisne, sans livrer d'objectifs financiers pour le projet.

Mais une fois le client appaté, le réel défi consistera à le convaincre d'utiliser à plein son compte et de souscrire à des produits lucratifs comme les prêts à la consommation.

«On ne peut pas dire quand le client a ouvert son compte c’est fait ; le travail commence», explique André Coisne, qui envisage pour plus tard de possibles offres croisées associant télécoms et banque.

Orange n'est pas le seul à tenter l'aventure. Les historiques BNP Paribas, Société générale et Crédit agricole doivent déjà compter avec de nouvelles banques en lignes low cost comme N26 ou des acteurs issus d'autres secteurs comme le distributeur Carrefour.

Plusieurs dirigeants de banques françaises ont fait part de leurs inquiétudes quant à l'impact de cette nouvelle concurrence sur leurs marges.

«C'est un cran supplémentaire d'intensité concurrentielle que nous allons devoir affronter», avait estimé en mai Philippe Brassac, le directeur général de Crédit agricole, selon lequel Orange pourrait s'avérer un rival «puissant dans le temps».

Pour préparer la riposte, les banques traditionnelles ont mis un coup d'accélérateur à leurs investissements dans la technologie tout en réduisant leur réseau d'agences.

BNP Paribas a ainsi recruté une ancienne cadre de Bouygues Telecom pour piloter sa banque en ligne Hello Bank! en France tandis que le Crédit agricole doit annoncer une nouvelle offre en novembre.

Si l'arrivée d'Orange suscite des sueurs froides dans le secteur, il est toutefois peu probable que l'opérateur se mue en banquier, souligne Bengt Nordstrom de la société de conseil Northstream. «Cela n'apportera qu'une petite source de revenus additionnels par rapport à la taille d'Orange», dit-il.

 

 

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