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Maroc/UE : Les lignes de financement abondent, mais sont moins accessibles !

Maroc/UE : Les lignes de financement abondent, mais sont moins accessibles !

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Les lignes de financement de l’Union européenne (UE) destinées aux PME sont nombreuses et diversifiées. Mais les PME ont toujours du mal à en bénéficier. Les banques intermédiaires exigent des garanties dispro­portionnées par rapport aux capacités et à la taille des entreprises ciblées.

 

Destinés au finance­ment des PME au Maroc, des cen­taines de millions d’euros sont mobilisées chaque année auprès des institutions financières euro­péennes. Provenant, entre autres, de la Banque euro­péenne pour la reconstruction et le développement (BERD), de l’Agence française de développement (AFD), de la Banque européenne de l’in­vestissement (BEI) ou encore de la banque allemande KFW, ces ressources, aussi consé­quentes soient-elles, viennent élargir et renforcer la palette des financements dédiés aux PME/TPME, qui constituent plus de 90% du tissu éco­nomique et entrepreneurial national. Mais pour pouvoir bénéficier de cette gamme étendue de fonds alimentés par les banques, agences et institutions européennes, le passage par le système bancaire marocain (chez les banques intermédiaires) s’avère indispensable. Rares sont les PME qui parviennent à décrocher le sésame à l’issue d’un parcours, s’ac­corde-t-on à le dire, semé d’embûches. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui explique le niveau faible du taux d’uti­lisation des lignes de finance­ment européennes.

Partage des risques

«Les fonds européens sont certes disponibles, mais les PME ont du mal à en béné­ficier car les banques exigent des cautions sans aucune commune mesure avec leur taille et leurs capacités», estime Yasmine Bennis, Vice-présidente de la Commission grandes entreprises-PME à la CGEM, qui s’exprimait lors d’un débat sur l’accès des PME au financement euro­péen, organisé récemment en marge de la deuxième édition du «Forum de la PME et de ses partenaires». Quand bien même l’argent coule à flot, encore faut-il s’assurer qu’il arrive à bon port. Les mécanismes d’octroi de ces financements d’ori­gine européenne sont conçus dans le sens d’une consé­cration du principe de par­tage des risques entre, d’une part, l’institution européenne concernée et, d’autre part, la banque commerciale intermé­diaire. «Nous acceptons les premières pertes, mais jamais 100% des pertes. Il reste tou­jours une part de risque à la charge de la banque intermé­diaire», affirme Eric Baulard, directeur du bureau de l’AFD à Rabat. «La banque commer­ciale va continuer à chercher des garanties additionnelles, mais notre appui reste décisif pour boucler le schéma de la garantie», ajoute-t-il. De son côté, le directeur de la BERD au Maroc, Laurent Charbier, confirme le constat ambiant de résilience qui se fait au détriment de la petite entre­prise, face à des pratiques bancaires généralement conservatrices. «Les banques classiques financent un nom et un patrimoine au détriment des projets. Elles ne financent pas un cash flow», laisse remarquer Laurent Baulard, plaidant au passage pour un changement des mentalités en amont, lequel passe, dit-il, par une modification du dispositif réglementaire enca­drant les hypothèques et les enchères, en s’inspirant des pratiques adoptées par les pays de l’Union européenne.

Transparence

Une chose est sûre, les prêts émanant des institutions de l’UE sont adossés à des conditions, notamment tari­faires (taux, etc), largement avantageuses en comparai­son avec les prêts classiques des banques commerciales. L’AFD, à titre d’exemple, tient à mobiliser des ressources destinées à financer des pro­jets de longue durée, chose rarissime en ces temps mar­qués par le repli du crédit bancaire.

Notons aussi que la plupart des agences et banques européennes bénéficient d’une notation élevée (AAA) et n’ont pas vocation à générer des profits.

Mais chaque ligne de finan­cement provenant d’une ins­titution européenne se trouve encadrée par des objectifs précis et des critères d’éli­gibilité minutieusement choi­sis. «Nous mettons deux ans à débattre et à discuter en interne avant de concevoir un produit de financement. Nous n’acceptons pas les filiales des grands groupes et nous gardons un droit de regard sur la rétrocession des prêts», souligne le représentant de la Banque européenne d’inves­tissement (BEI) à Rabat, en réponse au reproche condam­nant l’octroi de ces finance­ments aux entreprises «non méritantes» qui pourraient se financer aisément auprès des banques classiques. Du côté de l’AFD, explique le direc­teur de son bureau à Rabat, «dans un premier temps, il est question d’analyser les secteurs et les besoins non couverts. Puis, nous définis­sons les critères d’éligibilité et nous tenons, au moment convenu, à communiquer sur l’identité des entreprises bénéficiaires».

La communication, notam­ment autour de l’identité des entreprises bénéficiaires, est un élément-clé de tout pro­gramme de financement. Elle lui apporte de la crédibilité et de la transparence. C’est le seul moyen qui permet de vérifier si l’argent de l’UE est tombé entre les mains des PME qui en ont vrai­ment besoin, et non pas chez certaines filiales de grands groupes industriels !

Wadie El Mouden

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