La politique d’investissement est une problématique collective mobilisant gouvernement, institutions et secteur privé en vue de promouvoir ce secteur vital pour l’essor du Maroc. La récente rencontre entre le ministre délégué Karim Zidane et le conseil d’administration de la CGEM, a permis d’évaluer l’état des lieux de l’investissement au Maroc, tout en projetant les ambitions du pays pour les années à venir.
Par Désy M.
La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) a accueilli mardi 11 mars une réunion stratégique entre son Conseil d’administration et le ministre délégué chargé de l’Investissement, de la Convergence et de l’Évaluation des Politiques publiques, Karim Zidane.
Quatre points ont été à l’ordre du jour, notamment le bilan de la nouvelle charte de l’investissement, le dispositif des TPME, la réforme des CRI (Centres régionaux d’investissement) et des CRUI (Commissions régionales unifiées d’investissement) et la simplification et l’optimisation du parcours de l’investissement. Cette rencontre, placée sous le signe du dialogue et de la concertation, a permis d’évaluer l’état des lieux de l’investissement au Maroc, tout en projetant les ambitions du pays pour les années à venir.
Un bilan encourageant de la Charte de l’investissement
Publiée en 2022, la Charte de l’investissement, deux ans après, commence à porter ses fruits. Le ministre Zidane a rappelé que 191 projets ont été approuvés pour 326 milliards de dirhams d'investissements prévisionnels. Ces projets, validés par sept commissions nationales de l'investissement (CNI), devraient générer 150.000 emplois directs et indirects à travers le Royaume, a-til précisé. Et d’ajouter que 83% desdits projets ont déjà démarré, notamment dans des secteurs stratégiques comme les véhicules électriques et les gigafactories, ce qui démontre la concrétisation rapide des engagements pris et met en avant la dynamique positive confirmée en janvier 2025.
Le ministre a détaillé que sur les 191 projets approuvés, 177 relèvent du dispositif principal, représentant 248 Mds de DH et plus de 90.000 emplois, tandis que 12 projets stratégiques totalisent 78 Mds de DH et 60.000 emplois. Cette rencontre a été aussi l'occasion pour Karim Zidane d'insister sur l'équité territoriale, avec 50% des investissements prévus en dehors de l'axe Tanger-Casablanca, ainsi que sur la diversité des secteurs concernés. Il a noté aussi que 81% des projets sont portés par des entreprises marocaines, ce qui témoigne de l'efficacité de la Charte pour les investisseurs nationaux.
De son côté, Chakib Alj, président de la CGEM, a salué cette dynamique en soulignant que l’élargissement du dispositif de la Charte aux TPME devrait amplifier cette tendance et renforcer la résilience du tissu économique marocain à l’orée de grands événements sportifs qu’abritera le Maroc. Le pays se fixe un cap ambitieux avec 550 milliards de dirhams d’investissements privés d’ici 2026, un objectif qui semble désormais atteignable au regard des performances enregistrées en 2024, évalués à 120 milliards dirhams, une augmentation de 20% par rapport à 2023.
TPME : Un tournant décisif attendu
L’intégration d’un dispositif des TPME dans la nouvelle charte de l’investissement pour faciliter l’accès aux financements et encourager la création d’emplois est une décision très attendue par le secteur privé. Actuellement, seulement 17% des TPE marocaines accèdent au crédit bancaire, un chiffre bien en deçà des standards internationaux. Face à cette attente, le ministre a précisé que le décret permettant l’intégration de ce dispositif est d’ores et déjà sur la table des négociations du gouvernement, et son adoption sera effective courant l’année 2025.
De plus, l’enveloppe de 15 milliards de dirhams prévue dans la nouvelle feuille de route de l’emploi destinée à générer 350.000 emplois stables d’ici 2026, consacre 12 milliards de DH pour l’efficience de ce dispositif TPME, qui a pour pour axe prioritaire la création de ces emplois. Dans cette même optique, la réforme des CRI et la création des CRUI visent à fluidifier le parcours des entreprises en leur apportant un accompagnement de proximité. Maroc PME sera également mobilisée pour épauler ces entreprises dans leurs démarches.
Mais pour Chakib Alj, l’accès au financement demeure un enjeu majeur. Il a souligné la nécessité de démocratiser les lignes bancaires et d’encourager des financements alternatifs comme l’introduction en Bourse et les fonds d’investissement, encore sous-exploités au Maroc.
IDE et MDM boostent l’investissement
Avec 43 milliards de dirhams d’IDE en 2024, le Maroc confirme son attractivité, réalisant sa deuxième meilleure performance historique grâce à une diversification des investisseurs. Toutefois, le climat des affaires reste un défi, et le patronat plaide pour une simplification administrative via la réduction des autorisations remplacées par des cahiers des charges avec contrôle a posteriori. Par ailleurs, les Marocains du monde (MDM) jouent un rôle croissant dans l’investissement national, et le gouvernement cherche à orienter leurs transferts financiers vers des secteurs productifs. À cet effet, Karim Zidane a annoncé plusieurs initiatives, dont un desk MDM à l’AMDIE, une plateforme digitale dotée d’IA et des sessions dédiées lors de roadshows internationaux pour encourager leur engagement économique.
Au-delà de ces avancées, des choses restent à améliorer. Chakib Alj a insisté sur la nécessité de moderniser le Code du travail, qu’il considère comme un obstacle à l’investissement et à la formalisation du marché de l’emploi. L’énergie et le foncier sont également des chantiers cruciaux à améliorer. Enfin, la formation professionnelle doit être revue en profondeur. Avec seulement 1% des entreprises bénéficiant de la formation continue, il est urgent de réformer ce système qui ne répond plus aux besoins du marché.