Bank Al-Maghrib résolue à accompagner l’émergence de cet écosystème.
A l’échelle africaine, les Fintech marocaines sont à la traîne.
Par D. William
La révolution numérique est en marche et touche tous les domaines, en particulier le secteur financier. Les besoins d’autonomie et d’indépendance des consommateurs font qu’ils demandent de plus en plus des services moins coûteux et plus efficaces. Le business model de l’industrie financière est donc en train de changer et changera encore davantage à la faveur notamment de l’avènement des technologies disruptives. Ce boum technologique oblige ainsi tous les acteurs qui évoluent dans l’écosystème de la finance à sortir de leur zone de confort pour innover et être créatifs, afin de s’adapter à ce nouvel environnement. En effet, aujourd’hui, ils sont bousculés par les sociétés de technologie financière, appelées aussi Fintech, qui ont révolutionné les codes de la finance classique
Réputées pour leur agilité et pour leur rapidité en termes d’innovation, les Fintech ont réussi à mettre l’innovation technologique au service de la finance pour réinventer profondément les services bancaires et financiers. Les Fintech ont rapidement compris que tous les types de services financiers (transferts d'argent, prêts, investissements, paiements, transactions boursières...) devaient s'intégrer de manière transparente dans la vie des clients férus de technologie pour rester pertinents, dans un univers où les affaires et la vie privée deviennent de plus en plus numérisées. «L’agilité des start-up leur permet d’être proactives au changement de mœurs, pousser pour l’adoption de technologies, faire preuve de créativité, déployer des Minimum Viables Products (MVP) rapidement et capitaliser sur le «time to market». Bref, tout ce qui est essentiel pour servir un marché jeune, principalement non bancarisé», souligne Yacine Faqir, consultant pour les Fintech/start-up désireuses de se développer au Maroc et sur le continent africain (www.fnh.ma).
Dès lors, les acteurs de cet écosystème ne se voient pas comme des concurrents de l’industrie bancaire, mais plutôt comme des opérateurs complémentaires. Pour les experts d’ailleurs, tous ces acteurs gagneraient à s’inscrire dans une démarche de co-création pour tirer mutuellement profit des compétences des uns et des autres afin de pouvoir développer leurs activités. Les établissements financiers dits classiques sont donc contraints de cohabiter avec ces nouvelles venues, voire d’en faire des partenaires privilégiés. Au Maroc cependant, les Fintech peinent encore à s’exprimer en raison d’une réglementation bancaire qui ne donne pas forcément une large fenêtre de tir à l’innovation par des acteurs non bancaires
Toutefois, Bank Al-Maghrib reste disposée à accompagner l’émergence des Fintech sur le marché marocain. Intervenant dans un séminaire en mai dernier, Fadwa Jouali, responsable du service Fintech et Développement des paiements au sein de la Banque centrale, a laissé entendre que BAM a opté pour la mise en place d’une disposition d’accompagnement légal et réglementaire, en vue d’aider ces entreprises technologiques œuvrant dans le service financier à intégrer les marchés et à leur donner la possibilité d’être en contact avec les acteurs de la place qui pourront les soutenir et signer des contrats avec elles. Ainsi, l’objectif de BAM est de promouvoir un cadre légal et réglementaire propice au développement des innovations financières. Et ce, à travers le renforcement du cadre juridique pour accompagner l’essor des paiements électroniques, l’introduction de nouvelles catégories de services de paiement et la consolidation du cadre réglementaire régissant la protection du consommateur via l’utilisation saine des moyens de paiement sécurisés.
Cette démarche s’inscrit pleinement dans la stratégie d’inclusion financière du Maroc. Il s’agit notamment pour BAM, en ce qui concerne les Fintech, d’un côté, de développer des modèles alternatifs permettant d’atteindre les populations les plus exclues à moindre coût et qui soient adaptés aux spécificités de ces dernières. D’autre part, l’objectif est de créer les conditions d’un plus grand usage des produits financiers en accélérant la dématérialisation des paiements, en particulier ceux entre l’État et les usagers, pour ancrer l’inclusion financière dans les comportements des ménages et renforcer l’éducation financière. Cette volonté est illustrée par l’institution des établissements de paiement, tremplin au développement des Fintechs au Maroc. En attendant, le Maroc reste à la traîne par rapport aux autres pays africains. Selon Faqir, «les start-up Fintech sur le continent africain ont levé plus de 335 millions d’USD sur la première moitié de 2021, ce qui est en soi deux fois plus que toute l’année précédente». Si l’on y trouve des Fintech de l’Afrique du Sud, de l’Ouganda, du Rwanda ou encore du Kenya, «aucune Fintech marocaine n’apparait dans ce palmarès», déplore Faqir, tout en soulignant que «ce n’est pas pour autant que rien ne se passe au Maroc»