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Colloque : La gouvernance financière des villes en question

Colloque : La gouvernance financière des villes en question

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Les dépenses des communes locales dépendent essentiellement des transferts de l’Etat et des établisse­ments publics. Les participants au neuvième Colloque sur les finances publiques s’accordent sur la néces­sité de revoir le mode de gouvernance financière des villes.

‘‘La gouvernance financière des villes», le thème choisi pour la neuvième édition du Colloque international sur les finances publiques, tenue les 11 et 12 septembre à Rabat, vient à point nommé, au moment où les Marocains élisent les ins­tances qui auront la charge de gérer les différentes collecti­vités territoriales (communes, provinces, préfectures et régions). L’événement inter­vient dans un contexte marqué par une soutenabi­lité de plus en plus faible des finances locales, aussi bien au Maroc qu’à l’étranger (en lien avec la crise économique et financière de 2008); ce qui se traduit par une tendance à la baisse des dépenses des communes (-1,9% en France). Dans ce contexte précis, sou­ligne le nouvel ambassadeur de France, Jean-François Girault, qui marquait sa pre­mière sortie à l’ouverture du Colloque de Rabat, il est important de savoir comment concilier gestion rigoureuse et investissement. «Les villes grossissent. Le phénomène métropolitain prend une nou­velle dimension», constate Michel Bouvier, président fon­dateur de l’Association pour la Fondation internationale des finances publiques (Fondafip). Le défi, selon lui, ne se limite pas au seul rapport Etat/Région. Il s’étend jusqu’aux rapports associant les métro­poles aux entreprises et aux associations. Cheville ouvrière de l’organisation du colloque, Noureddine Bensouda, reste convaincu que «le futur de l’humanité s’écrira dans les villes, et que celles-ci conti­nueront à gagner en influence et en responsabilité», illus­trant son propos par l’exemple de New York, dont le poids économique est plus impor­tant que celui des écono­mies combinées de 46 pays d’Afrique subsaharienne. Les villes marocaines bénéficient aujourd’hui de leurs propres ressources, mais également de l’apport du Budget de l’Etat et des établissements publics. «L’essentiel des dépenses des communes, notamment en matière d’infrastructures, est réalisé par l’Etat et les entreprises publiques», rap­pelle Bensouda, en se réfé­rant à la situation des finances publiques à fin 2014. Selon le directeur de la TGR, il est nécessaire d’avoir une vision consolidée de toutes les recettes et dépenses qui révèlent une forte dépen­dance vis-à-vis des finances de l’Etat.

Les recommandations de Bensouda

L’intervention du Trésorier général du Royaume a proposé une stratégie globale de gouvernance financière de nos villes. Elle s’articule autour de sept axes:

- le renforcement de la mobilisation des recettes propres des communes urbaines (valorisation de l’impact foncier, etc.) ;

- une meilleure coordination entre les acteurs, avec plus de cohérence dans la mise en oeuvre des politiques publiques urbaines;

- une participation plus active du privé dans le financement et la production de la ville (contrats de concession, gestion déléguée et PPP; copro­duction comme règle du jeu, mécénat, etc.) ;

- le management par la performance dans les stratégies de développement des villes (les transferts financiers de l’Etat aux collectivités pourraient être conditionnés par des contrats- programmes;

- le renforcement des capacités de management des gestionnaires de la ville (formation continue);

- les gestionnaires des villes devraient capi­taliser sur l’expérience de l’Etat (augmentation continue de la masse salariale);

- adéquation du temps du politique avec celui de la ville et du citoyen ( intégrer la dimension tem­porelle dans la politique de la ville et veiller au respect du temps dans l’exécution des marchés..

38 millions d’habitants à l’horizon 2030

L’intervention du sociologue, Mohamed Cherkaoui, a été l’un des temps forts du Colloque interna­tional sur les finances publiques. Auteur de plu­sieurs ouvrages scientifiques de référence, il a bien voulu partager les aspects démographiques de son analyse rétrospective et prospective de l’urbain au Maroc (ce travail fera l’objet d’un ouvrage en cours de rédaction). Premier constat frappant : l’essoufflement de la croissance démographique, dû notamment à la forte baisse du taux de fécon­dité des femmes au Maroc (celui-ci passe de 8 à 1,75 entre 1960 à 2014). Seul l’exode rural compense cette «saignée démographique», accentuée par l’utilisation massive de la contraception, l’allongement des années d’étude, le recul de l’âge moyen du premier mariage (33 ans chez les hommes et 25 ans chez les femmes). Ce qui surprend le plus, aux yeux du sociologue, c’est que l’effectif de la population n’a augmenté que de près de 3,8 millions en dix ans, et pis encore, la baisse du taux de fécondité a été plus rapide que la hausse du taux d’urbanisation. Ce dernier devrait, selon le même auteur, atteindre 65% à l’issue des deux prochaines décennies. «La population du Maroc comptera 38 millions d’habitants à l’horizon 2030, contre 34 millions en 2014, dont 23 millions seront âgés entre 18 et 59 ans. Et 6 millions âgés de plus de 60 ans, sachant que l’espérance de vie atteindra 77 ans en 2030», estime Mohamed Cherkaoui. La baisse de 7 à 8% de l’effectif des enfants âgés de moins de 15 ans constitue une chance pour repenser le système de formation», ajoute-t-il. Ces mutations démographiques devraient se traduire par de profonds changements, face auxquels il va falloir, dès à présent, anticiper les réponses nécessaires. Cela implique une nouvelle planification urbaine (logement, circulation, transition nutritionnelle).

Wadie El Mouden

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