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Changement climatique, digitalisation, géopolitique : les nouveaux enjeux de la finance africaine

Changement climatique, digitalisation, géopolitique : les nouveaux enjeux de la finance africaine

La fragmentation géoéconomique, le protectionnisme, la digitalisation, l’intelligence artificielle et les dynamiques démographiques exacerbent les vulnérabilités de la finance africaine.

 

Par Y. Seddik

Rabat a accueilli le mardi 26 novembre le 4ème Symposium régional de haut niveau sur la stabilité financière sous le thème : «La stabilité financière en Afrique face aux incertitudes géoéconomiques et aux risques émergents», qui a réuni des experts de renom et des responsables de premier plan des institutions financières africaines et internationales.

Lors de son allocution d’ouverture, Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, a dressé un tableau des multiples chocs ayant marqué l’Afrique ces dernières années : pandémie Covid19, conflits géopolitiques, changements climatiques extrêmes et pressions inflationnistes. Avec une inflation moyenne de 16,2% en 2023 pour l’Afrique subsaharienne, selon le FMI, le fardeau est lourd, particulièrement pour les ménages aux revenus limités.

En parallèle, la dette publique africaine atteint des sommets préoccupants, représentant 60% du PIB en Afrique subsaharienne et 77% en Afrique du Nord. Ces pressions économiques coexistent avec des transformations structurelles, notamment l’essor de l’intelligence artificielle, la digitalisation et les défis liés à la cybersécurité. Jouahri a souligné que ces facteurs redéfinissent les priorités des décideurs, tant sur le plan national qu’international, et nécessitent des réponses coordonnées et innovantes.

Collaboration internationale

Dans son intervention, Martin Moloney, secrétaire général adjoint du Financial Stability Board (FSB), a mis en avant l’interdépendance croissante des systèmes financiers mondiaux. Il a rappelé que la stabilité d’un marché local, qu’il soit à New York ou à Casablanca, a des répercussions globales. «Un agriculteur au Maroc et un trader à Wall Street sont connectés par les fils invisibles de l’économie mondiale», a-t-il affirmé. Cette interconnexion rend la collaboration entre régulateurs incontournable. À cet égard, la présidente de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), également présidente du Comité régional AfriqueMoyen-Orient de l’IOSCO (International Organization of Securities Commissions), a souligné l’importance des efforts conjoints pour atténuer les risques systémiques.

L’AMMC, avec ses homologues marocains et internationaux, travaille activement sur des initiatives de finance durable et sur l’intégration des risques climatiques dans les stratégies financières. Par ailleurs, le symposium a également été l’occasion de discuter des innovations financières et technologiques, souvent doublement perçues comme opportunités et menaces. La réglementation des crypto-actifs, par exemple, figure en bonne place dans les priorités de Bank Al-Maghrib, qui élabore une loi dédiée pour protéger les utilisateurs tout en encourageant l’innovation. Les risques climatiques et les cybermenaces ont également occupé une place centrale dans les débats. Le Maroc, pionnier dans l’intégration de ces dimensions dans ses cadres réglementaires, a partagé ses expériences, notamment l’obligation pour les entreprises cotées de publier des rapports ESG et les directives pour les banques sur la gestion des risques climatiques.

Une Afrique en quête de solutions autonomes

Face à ces défis, les intervenants ont insisté sur le potentiel immense de l’Afrique. Ses ressources naturelles, sa population jeune et dynamique, ainsi que des initiatives continentales comme la zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) sont autant d’atouts pour transformer ces risques en opportunités. Toutefois, comme l’a souligné Romain Paserot, de l’Association internationale des superviseurs d’assurance (IAIS), cela nécessite une gestion proactive des risques et une coopération accrue entre les autorités financières.

Selon les différents intervenants, le symposium a permis de jeter les bases d’une action concertée, où chaque acteur, du régulateur local aux organisations internationales, peut jouer un rôle clé. Alors que des défis majeurs persistent, notamment la fragmentation géoéconomique et la montée des risques climatiques, une approche collaborative demeure le levier essentiel pour bâtir un système financier résilient et inclusif.

 

 

 

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