La «multirisque climatique» vise à garantir les investissements des agriculteurs afin d’atténuer les effets des aléas climatiques sur leur production.
Par D. William
Le secteur agricole marocain prête le flanc à de multiples risques. Ils vont de la sécheresse aux maladies et ravageurs, en passant par le Chergui, les hautes températures, le stress hydrique, la gelée, les inondations et excès d'eau ou encore la grêle. Les risques les plus saillants actuellement concernent cependant ceux générés par les changements climatiques. Lesquels ont pour conséquence des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents et de plus en plus sévères, qui mettent en péril l’agriculture marocaine.
Déjà, en 2019, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) tirait la sonnette d’alarme. Selon lui, «la situation de pénurie hydrique au Maroc est alarmante, puisque ses ressources en eau sont actuellement évaluées à moins de 650 m3/habitant/ an, contre 2.500 m3 en 1960, et devraient baisser en deçà de 500 m3 à l’horizon de 2030». Par ailleurs, «des études internationales indiquent que les changements climatiques pourraient provoquer la disparition de 80% des ressources d'eau disponibles au Royaume dans les 25 prochaines années».
La gestion de ces différents risques impose donc la mise en place de produits d’assurance adaptés afin de réduire la vulnérabilité des agricultures face aux aléas climatiques. C’est pourquoi l’Etat, en partenariat avec la Mutuelle agricole marocaine d'assurances (MAMDA), a décidé d’instaurer un produit d’assurance «multirisque climatique». Objectif : garantir les investissements des agriculteurs, quelle que soit leur taille et dans l’ensemble du pays, afin d’atténuer les effets des aléas climatiques sur leur production et de les soutenir en assurant la stabilité financière de leur trésorerie.
Cette assurance vise ainsi à couvrir les agriculteurs contre une multitude de risques agricoles, notamment la sécheresse, les inondations et les problématiques liées aux grandes cultures telles que les légumineuses, les céréales et les graines oléagineuses. A l’issue d’une rencontre avec le chef de gouvernement, Aziz Akhannouch, le 18 février 2022, Mahmoud Oudrhiri, Directeur général délégué de la MAMDA, faisait savoir que, depuis 2011, cette convention a permis le versement d'une «indemnisation d'un montant de 3,8 milliards de dirhams», précisant que «les cotisations des agriculteurs ne dépassent pas 32 dirhams par hectare, alors qu’ils ont reçu, en moyenne, un montant de 406 dirhams durant cette période, ce qui confirme l’importance de cette convention».
Ainsi, selon Oudrhiri, au titre de l’année 2022, un million d’hectares a été souscrit, dont 80% consacrés à 4 régions, à savoir Marrakech-Safi, Casablanca-Settat, Fès-Meknès et Rabat-Salé-Kénitra. Multiplication des soutiens aux agriculteurs Les changements climatiques s’accompagnent d’une augmentation considérable des sinistres dans le domaine agricole. Et le Maroc n’y échappe pas.
Le 23 février 2022, la MAMDA, avec un capital assuré de plus d’1 milliard de dirhams (pour 1.000.000 d’hectares assurés), a dû déployer un dispositif spécifique pour accompagner et soutenir les agriculteurs face à la sécheresse. Quatre mesures ont été prises : le report des échéances de paiement des primes d’assurance agricoles dues au titre de 2021, l'accélération du processus d’indemnisation, la mise en paiement exceptionnelle de ristournes de mutualité au profit de ses agriculteurs sociétaires au cours du second trimestre 2022 et la mise en œuvre d’un dispositif spécifique pour encourager et développer l’assurance multirisque climatique pour l’arboriculture fruitière.
En avril 2020, la Mamda, dont le montant global assuré se chiffrait à 1,1 milliard de dirhams pour la campagne (2019-2020), a dû déployer avec 2 mois d’avance le dispositif d’indemnisation et de paiement des sinistres aux agriculteurs, à cause notamment du contexte particulièrement difficile lié au Covid-19 et à la sécheresse. Début juin de la même année, 9.100 hectares au niveau de 27 communes rurales de la région Fès-Meknès ont été touchés par une tempête de grêle.
La plupart des cultures touchées bénéficiaient, selon le ministère de l’Agriculture, du programme d'assurance multirisque climatique pris en charge par la MAMDA. La multiplication des sinistres devrait pousser à adapter davantage les produits d’assurance proposés au monde agricole. C’est pourquoi les exploitants souhaitent que des packages multirisques soient mis en place à la fois pour les cultures, les locaux, le matériel et le personnel.