Transformation numérique : les grandes groupes livrent leur recette

Transformation numérique : les grandes groupes livrent leur recette

 

Les grands groupes se dotent d'usines digitales pour industrialiser leur transformation numérique.

Certains d’entre eux (OCP, CIH Bank, BCP ou encore Saham Assurance) ont accepté de livrer leur recette.

 

Ce sont des industriels, des banques et des compagnies d’assurances et font partie de la première vague d'entreprises à avoir entamé leur transformation digitale. Ils considèrent la data comme un actif à valoriser, ils ont la conviction que la transformation apporte de la valeur ajoutée, aussi bien à l'opérationnel (souvent oublié), qu'à la relation client, et veulent maintenant passer un cap. Ils internalisent jalousement les métiers de la transformation numérique.

L'Association des utilisateurs des systèmes d'Information au Maroc (AUSIM) les a invités à témoigner pour la première fois. Les grands comptes font le bilan de leur transformation digitale.

L'AUSIM a, en effet, profité des sorties médiatiques récentes des entreprises qui communiquent sur le sujet, pour leur demander de faire un retour d'expérience. Une table-ronde généreuse où l'OCP, CIH Bank, BCP ou encore Saham Assurance ont livré, pour la première fois, des données chiffrées sur ce que leur rapporte la transformation digitale. Yassine Sekkat, du cabinet Mckinsey, était là en témoin de cette mutation de plus en plus concrète pour nos entreprises. Il était temps !

 

Digital Factory

Littéralement usine digitale. C'est «LE» concept du moment chez les grands comptes. Tout le monde doit avoir sa Digital Factory. Si certains en font des filiales, comme la BCP avec sa filiale PCA, d'autres comme l'OCP et Saham Assurance en font une entité hybride, quelque part entre filiale et département interne.

CIH Bank a décidé de faire de son activité innovation une composante à part entière de sa direction système d'information, estimant que c'est le moyen le plus judicieux pour rester au contact des «métiers». Car ce sont les métiers qui dictent la transformation. Mais sur ce point, les entreprises sont toutes d'accord. Au sein de ces Digital Factory, on y pense transformation numérique, on y respire agilité et on y recrute des talents. L'environnement start-up y est important pour y retenir ces jeunes d'une génération qui n'est plus enchantée de travailler selon les normes classiques, dans des espaces classiques, à des horaires classiques et des fois sans intéressement. L'environnement de travail est un facteur clé de succès pour ces Digital Factory.

 

Retour d'expériences

L'OCP a complètement intégré la data comme un actif qu'il faut valoriser financièrement et économiquement et qui nécessite une gouvernance. L'Office fait partie des tout premiers grands comptes à s'être doté d'une Digital Factory et privilégie le «Test and learn». Chaque expérience de transformation réussie passe à la Digital Factory pour y être développée.

Adil Lahyane de CIH Bank décrit les facteurs clés de succès au sein de sa banque. Il s'agit tout d'abord d’une gouvernance digitale. La banque tient à cet effet un comité multicanal mensuel présidé par le PDG de la banque. Abdelkrim Hamane de Saham Assurance insiste à son tour sur le «sponsorship fort», c'est-à-dire sur le soutien des dirigeants, pour réussir la transformation. Dans sa stratégie, CIH Bank estime qu'il faut faire «du digital dans le digital» où l'entreprise fonctionne selon deux modes. Le premier est stable, disponible et résilient. Il est essentiel au bon fonctionnement de l'organisation. Le second est plus innovant, agile et permettant d'aller à l'aventure et tester de nouvelles choses.

Hassan Debagh, de la BCP, a pour sa part présenté les apports concrets de la transformation sur son organisation. Sur le parcours «Entrée en relation», que la banque a transformé il y a 18 mois, 200.000 opérations ont été enregistrées dont 150.000 en 2018. Il permet d'économiser 27 pages non imprimées par opération et réduit de moitié le temps nécessaire à l'ouverture d'un compte passant de 30 à 15 minutes. Ce processus a l'avantage d'être mobile et peut être déployé dans des salons, forums d’étudiants, à l'international...Sur un autre parcours qui est le crédit immobilier, la banque a pu interfacer 10 applications sur son site dédié et revendique 800 demandes traitées.

Du côté de Saham Assurance, l'on insiste sur les nouveaux profils recrutés dans les Digital Factory. Rares et volatils, il faut savoir les retenir. On parle de Product Owner, Data Scientist, Proxy-p ou de Data Engineer, pour ne citer que ceux-là. Ceci demande, de l'avis de tous les intervenants, une gestion spécifique des ressources humaines, parfois bien différente de la gestion classique au sein des organisations.

 

L'étape d'après

Si au départ la transformation digitale se résumait à des interfaces utilisateurs plus esthétiques, les organisations passent un cap en se dotant de Digital Factory. Cela rend la transformation digitale plus industrielle et permet d'aller en profondeur.

Yassine Sekkat du cabinet Mckinsey n'a pas manqué de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : cette transformation se fait généralement dans la douleur. Paradoxalement, les blockages viennent en premier des DSI qui ne souhaitent pas changer de méthodes. La prochaine étape, selon lui, serait que les organisations subissent des mutations dans leur ADN pour que toutes les lignes métier pensent digital. Avant d'aller vers une étape plus poussée dans «quelques années», dix ans peut-être, où les organisations deviendront Full Digital et où l'agilité sera le mode de fonctionnement privilégié à tous les étages de l'organisation et dans tous ses métiers. ■

 

A.H

 

 

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