- En situation de redressement, l'entreprise est déjà condamnée
- La force du nouveau projet de loi réside dans la prévention.
La mise en place des dispositions juridiques régissant les entreprises en difficulté remonte à plus de deux décennies. Au cours de ces dernières années, les pouvoirs publics tentent, tant bien que mal, de répondre aux sollicitations des organisations patronales et des différentes associations entrepreneuriales pour une meilleure prise en compte des réalités de l’entreprise.
Au regard des enjeux précités, le projet de loi n° 73-17 modifiant et complétant les dispositions du Code de commerce relatives aux difficultés de l’entreprise, a été adopté récemment en Conseil de gouvernement.
Ce nouveau dispositif juridique, qui devrait être avalisé par le Parlement au cours de cette année, a pour objectif la prévention et le soutien de l’entreprise lors d’une période pour le moins délicate, d’autant qu’il existe au Maroc une très forte corrélation entre dépôt de bilan et liquidation de l’entreprise.
Sur cet aspect, le témoignage de Amine Diouri, responsable études PME à l’Observatoire Inforisk entreprise, est édifiant (Voir ci-dessous).
Par ailleurs, la nouvelle procédure de sauvetage, consacrée par le projet de loi précité, se distingue par le fait qu’elle offre à l’entreprise, à la demande de son patron, le déclenchement de la procédure de sauvetage sans que la société en question ne soit en état de cessation de paiement. Cette procédure nécessite toutefois la présentation d’un plan de sauvetage.
Dans le même ordre d’idées, le saut qualitatif à relever a trait à la promotion d’une série de mesures de prévention des difficultés. En cela, les créanciers sont poussés à s’engager de manière effective dans la procédure de règlement amiable, tout en facilitant le financement de la procédure préventive. Ainsi, les actionnaires se voient accorder le droit de recouvrer leurs créances avant les autres créanciers.
Par contre, les créanciers non couverts par l’accord préventif doivent être informés des nouveaux délais accordés par le président du tribunal conformément à la loi.
De plus, le nouvel arsenal juridique apporte une dose de rééquilibrage des pouvoirs entre le gérant de l’entreprise et les créanciers. En outre, l’une des mesures-phares dans la phase préventive est relative au fait que l’entreprise peut prendre des décisions adéquates pendant la procédure de sauvetage sans avoir recours au syndic. ■
Paroles de pro : Amine Diouri, responsable études PME à l’Observatoire Inforisk Entreprise
«Il faut d’emblée noter que 90% des sociétés en situation de redressement finissent par être liquidées au Maroc. Cela montre qu’une fois que l’entreprise est en situation de redressement, il ne reste plus grand chose à faire. A mon sens, la grande nouveauté du projet de loi n°73-17 réside au niveau de l’aspect préventif. A ce titre, il est important de souligner qu’aux Etats-Unis, le chapitre 11 de la loi portant sur les faillites, qui en réalité met l’accent sur les mesures de sauvegarde, a permis à beaucoup d’entreprises en difficulté de remonter la pente, à l’instar de General Motors.
L’autre apport majeur est la définition du profil du syndic, qui a un rôle majeur dans le process du traitement des entreprises en difficulté. Avec le nouveau dispositif juridique, le syndic doit avoir un certain niveau d’expertise, à l’instar de celui existant dans les pays développés, pour ne citer que la France.
Pour rappel, il incombe au syndic de proposer entre autres le plan de continuation et le plan de cession en cas de redressement. D’ailleurs, un arrêté va ultérieurement fixer le profil-type du syndic dans notre pays. A la question de savoir si le nouveau traitement des entreprises en difficulté est de nature à réduire les défaillances des entreprises, je dirais plutôt que celui-ci pourrait avoir un impact positif marginal, en raison de l’exacerbation du problème de fond qui est l’allongement des délais de paiement». ■
M. Diao