L’énergie s’échange à un coût prohibitif au Maroc. Réduire la facture énergétique devient dès lors un enjeu de compétitivité de taille pour les entreprises marocaines encore peu engagées dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables.
A l’heure où les préparatifs pour l’organisation de la COP22 dans la ville ocre en novembre prochain vont bon train, les sujets inhérents au développement durable et au green business suscitent un engouement ascencionnel à l’échelle nationale. C’est dans cette mouvance que la Banque Centrale Populaire a pris la balle au rebond en organisant récemment une rencontre sous le thème : «Efficacité énergétique et énergies renouvelables, leviers de compétitivité des entreprises». D’emblée, faudrait-il rappeler que l’enjeu est de taille au Maroc, pays qui affiche un prix énergétique deux fois supérieur à celui de l’Egypte, par exemple. Partant, force est d’admettre que la réduction de la facture énergétique constitue un véritable relai de compétitivité pour les entreprises nationales, dont certaines, notamment celles évoluant dans l’industrie du ciment, peuvent consacrer près de 14% de leur chiffre au poste énergétique. Cette rencontre était l’occasion pour Mamoun Bouhdoud, ministre délégué chargé des Petites entreprises et de l’Intégration du secteur informel, de rappeler les défis écologiques des entreprises marocaines ainsi que le dispositif public mis en place pour leur permettre de rationaliser la consommation d’énergie. «60 entreprises marocaines ont bénéficié de l’audit énergétique, programme mis sur pied par Maroc PME», assure le ministre. Cela dit, du côté du patronat marocain, les mesures incitatives à même de renforcer la culture de l’efficacité énergétique et celle des énergies renouvelables du tissu entrepreneurial sont insuffisantes. «Nos entreprises ont besoin de plus d’accompagnement technique, financier et en formation dans les domaines de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables», martèle Miriem Bensalah-Chaqroun, présidente de la CGEM, qui s’empresse d’ajouter: «Les chefs d’entreprise doivent d’être guidés par les industriels afin de prendre de bonnes décisions lors des achats de matériels. Cela limiterait le recours aux équipements énergétivores». Pour sa part, Mohamed Benchaâboun, PDG de la BCP, reste persuadé que l’organisation de la COP22 sensibilisera les entreprises aux gains de productivité et de rentabilité induits par la recherche de l’efficacité énergétique et l’utilisation des énergies propres. La manifestation d’envergure internationale qui a enregistré la participation de plusieurs experts étrangers, a révélé des entreprises marocaines pionnières qui ont réalisé d’importants gains de productivité et de rentabilité en recourant aux énergies renouvelables. A ce titre, l’exemple de la Coopérative agricole Copag est édifiant. A en croire son président Moulay M’hamed Loultiti, l’entité située à Taroudant a réduit de plusieurs millions de dirhams sa facture énergétique en investissant dans les énergies renouvelables (photovoltaïque, centrale thermosolaire, etc.).
Paroles de pro
Mamoun Bouhdoud,
ministre délégué chargé des Petites entreprises et de l’Intégration du secteur informel
«Il faut savoir que l’industrie nationale s’accapare près de 30% de l’énergie consommée au Maroc. Aujourd’hui, avec les nouvelles exigences en matière de durabilité, il est clair que la compétitivité de nos entreprises passe indubitablement par le respect des standards écologiques. L’usine de Renault Tanger démontre que l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables et la compétitivité peuvent aller de pair. Ce fleuron de l’industrie automobile de notre pays, qui est autosuffisante en matière de production énergétique, est l’usine la plus compétitive du constructeur français à l’échelle mondiale. Et pourtant, l’énergie qui y est consommée est issue de l’éolien et de la biomasse. Avec les nombreux accords commerciaux conclus par le Royaume, les entreprises marocaines ont accès à un marché commercial de plus d’1 milliard de consommateurs. L’efficacité énergétique et les énergies renouvelables constituent de véritables leviers de compétitivité pour l’industrie nationale, qui doit faire face à une concurrence de plus en plus ardue».
Infos pratiques
L’offre de financement écolo de la BCP
L’engagement de la Banque Centrale Populaire (BCP) en faveur des entreprises ambitionnant de recourir à l’efficacité énergétique et aux énergies renouvelables pour limiter leur facture énergétique, tout en améliorant leur compétitivité, est quelque part reflété par le produit bancaire «Eco Energy Invest». Cet instrument financier de la Banque du cheval est mis en place avec le concours de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), l’Agence française de développement (AFD) et la Banque allemande KWF dans le cadre de la ligne de financement Morseff. Eco Energy Invest est un financement flexible, doté d’une subvention d’investissement de 10 à 15% du prêt éligible, via des dons de l’Union européenne. L’autre avantage est que les entreprises peuvent également bénéficier d’assistance technique à titre gratuit. Au chapitre des critères d’éligibilité, il faut savoir que les entreprises sollicitant ce produit bancaire doivent, entre autres être détenues à plus de 50% par des entités ou opérateurs privés au niveau de leur capital. Les branches d’activité concernées sont les industries de la transformation (agro-industrie, textile, mécanique, etc.), le secteur minier, l’hôtellerie, l’agriculture et la construction commerciale. Autres conditionnalités, les investissements financés, notamment les achats d’équipements doivent permettre de réaliser au moins 20% d’économie d’énergie et de réduire les émissions de CO2 d’au moins 20%. L’installation de technologies d’énergies renouvelables est aussi requise.
Momar Diao