- Depuis 2010, l’activité touristique connaît une stagnation qui appelle à investir de nouvelles pistes.
- Le digital bouleverse le businessmodel du secteur et certains acquis.
L’importance du secteur touristique pour l’économie nationale n’est plus à démontrer. Les chiffres disponibles le confortent amplement. En effet, le tourisme constitue la première source de devises du pays, avec près de 70 milliards de DH en 2017. A cela s’ajoute que ce secteur est le deuxième contributeur au PIB national et occupe le même rang en termes de création d’emplois. C’est dire sa centralité dans un contexte marqué par la nécessité de renforcer le matelas des réserves de change, le rééquilibrage de la balance des paiements et l’atténuation du chômage endémique des jeunes et des femmes.
Même si la branche a été dotée de deux plans stratégiques avec des objectifs chiffrés (Plan Azur, Vision 2020), aujourd’hui, force est d’admettre qu’on est encore bien loin des ambitions de la Vision 2020, pour ne citer que le doublement des arrivées de touristes (20 millions).
Pour rappel, en 2017, le Maroc a dépassé pour la première fois la barre des 11 millions de touristes. C’est dans ce contexte qui suscite une réflexion profonde autour des leviers à activer afin d’ériger la branche touristique en fer de lance de l’économie nationale que s’est tenu récemment, à Rabat, un Symposium international dédié.
Cette manifestation organisée par le Conseil du développement et de la solidarité (CDS) en partenariat avec le patronat marocain et rehaussée par la présence entre autres, de Mohamed Sajid, ministre du Tourisme, du Transport aérien, de l’Artisanat et de l’Economie sociale, Miriem Bensalah-Chaqroun, présidente de la CGEM, et Luc Chatel, ancien ministre français du Tourisme, était l’occasion de faire le bilan des différentes stratégies touristiques. Il était aussi question de mener la réflexion autour des solutions à même d’élever le secteur au rang de véritable moteur de l’économie nationale.
Perte de vitesse depuis 2010
Si Mohamed Benamour, président du CDS, reste convaincu que le tourisme national a toutes les potentialités de se positionner comme le remède idoine d’une partie des maux dont souffre le Maroc (disparités régionales, taux de chômage élevé, etc.), Miriem Bensalah-Chaqroun a pour sa part, focalisé son allocution sur les points qui fâchent.
«Faute d’Assises nationales depuis des années, cette rencontre tombe à point nommé. Le manque de concertation entre l’Etat et les professionnels suscite un grand étonnement, d’autant plus que ce domaine d’activité transverse est névralgique pour le Maroc», s’offusque la patronne des patrons, qui pointe du doigt l’inertie de l’activité depuis 2010. «Nous avons gagné 6 millions de touristes supplémentaires en 15 ans. Mais depuis 2010, l’heure est à la stagnation», relève-t-elle.
L’enjeu proéminent de la digitalisation
A l’échelle internationale, les perspectives sont prometteuses, puisque le nombre de touristes en 2030 devrait tourner autour de 2 milliards. Toutefois, les différentes destinations devront se livrer une bataille rude pour s’arroger les faveurs des touristes de plus en plus exigeants en termes de qualité de services, de diversité de l’offre, etc. D’où la place autrement plus cruciale de l’expérience «voyageur» qui constitue un critère stratégique dans le choix de la destination touristique.
A cela s’ajoute l’utilisation du digital, nouvelle donne qui bouleverse à la fois le businessmodel du secteur et certains acquis, avec l’entrée de nouveaux acteurs pour ne citer que Tripadvisor ou Airbnb.
L’ancien ministre français, Luc Chatel, est formel : les professionnels sont astreints à s’engager davantage sur la voie du digital pour ne pas être dépassés. Dans le même ordre d’idées, le chiffre rendu public par l’Observatoire marocain du tourisme est édifiant. En effet, 90% des touristes ont déjà eu recours à Internet pour réserver un hébergement.
Ceci dit, le ministre français juge qu’au-delà de la stabilité politique et de la tolérance dont fait montre le pays, il est nécessaire d’exploiter davantage les marques régionales. «Dans certains pays, la ville de Marrakech est plus connue que le Maroc», affirme-t-il. ■
M.D