En 2025, la pénétration de la Data mobile devrait se rapprocher de 100%.
Cette croissance fulgurante nécessite des investissements lourds par les opérateurs.
Par Y. Seddik
Si la tendance est connue, son ampleur n'en reste pas moins impressionnante. Au cours des dernières années, le trafic des données mobiles a véritablement explosé. Sur la période 2011-2017, le parc Internet mobile a été multiplié par 8. Il est passé de 2,6 à 20,8 millions d’utilisateurs, soit un taux de pénétration de près de 60%. En même temps, celui d’Internet ADSL a plus que doublé, passant de 0,59 à 1,33 million d’utilisateurs.
«A l’analyse de l’évolution du secteur des télécoms au Maroc durant les cinq dernières années, même les plus optimistes n’auraient pas prédit la croissance spectaculaire de la Data mobile et de l’Internet haut débit», ont noté les analystes d’ Attijari Global Research dans un papier de recherche sur le secteur.
Ceux de CDG Capital abondent dans le même sens et élargissent l’observation : «le segment 4G a affiché un dynamisme particulier, qui s’est traduit par l’explosion de son taux de pénétration, passant de 13,5% au T3-2013 à 63,4% au T3-2018, une tendance qui devrait se poursuivre à notre sens, tout en contribuant à la mutation du secteur des télécoms».
Plusieurs raisons expliquent cette croissance fulgurante : multiplication des terminaux connectés, modernisation des réseaux et croissance de l'usage de la vidéo, au moment où la fonction téléphone est devenue quasi-accessoire. En clair, les Marocains sont en train de changer radicalement leur manière de communiquer et le monde est évidemment plus connecté.
Mutation du secteur
Concentrons-nous désormais sur le mobile, vers lequel les utilisateurs se tournent massivement et pour lequel les perspectives sont captivantes. Sur un horizon moyen long terme et en comparaison avec la France, pays ayant une certaine avance dans le domaine de la Data, le Maroc semble disposer d’un profil de croissance intéressant.
La recherche d’AGR nous explique en effet qu’«à horizon 2025, le consensus des prévisions relatif au taux de pénétration de la Data mobile se rapproche du cap de 100%, porté par la forte dynamique du marché des smartphones au Maroc. Sur la période 2017-2025E, le parc Internet ADSL devrait doubler à 2,67 millions de lignes, soutenu par la digitalisation accélérée de l’économie marocaine».
Les analystes sont ainsi convaincus que «la mutation majeure du secteur des télécoms au Maroc devrait s’opérer au niveau de la consommation de la Data».
En France qui nous sert de repère, la consommation de Data a été multipliée par 38, contre 27 pour le monde sur la période 2011-2018. Dans ces conditions, le Maroc devrait poursuivre à l’avenir la même dynamique observée au sein des pays développés.
«En effet, le Royaume semble toujours bien positionné pour multiplier sa consommation de Data par au moins 3 sur la période 2017-2025E. La transformation digitale de l’économie marocaine, le changement des habitudes de consommation et la structure favorable de la pyramide des âges sont autant de facteurs qui soutiennent un tel scénario», renchérissent-ils.
Un écosystème de plus en plus interdépendant avec la Data
L’expansion attendue de la Data au Maroc en termes de taux de pénétration, mais surtout en termes de consommation, est justifié par l’ouverture de l’écosystème sur la donnée. Dit autrement, les différents services offerts aujourd’hui par la Data constitueront l’essentiel du quotidien des consommateurs, des acteurs économiques. On parle en l’occurrence du e-commerce, du e-Banking, de la I-TV, des Smart-Home et des Smart-Cities, etc.
Parallèlement, la nouvelle génération de consommateurs sera en quête de plus de débit. L’analyse de la pyramide des âges au Maroc révèle que 26% de la population a moins de 15 ans contre 19% pour la France. Ceci laisse présager l’arrivée d’une nouvelle génération consommatrice de Data, avec une meilleure familiarité avec l’écosystème digitalisé et une exigence élevée en termes de qualité de débit.
Pour illustrer, un utilisateur de la Data mobile refuserait aujourd’hui une connexion Internet gratuite si celle-ci est de mauvaise, voire même de qualité moindre. A l’opposé, ce même utilisateur serait disposé à payer relativement plus cher une connexion Internet offrant une qualité meilleure. ◆
Effort d’investissement
Historiquement, le secteur des télécoms est perçu comme étant une activité de service, dont le cœur de métier est la voix. Par conséquent, les opérateurs limitaient leurs investissements au développement du réseau relatif à la voix. Toutefois, l’émergence de la Data et de l’Internet haut et très haut débit semble changer la donne. Ces activités, dont les besoins en volume connaissent une croissance exponentielle, nécessiteraient des investissements autrement plus lourds pour leur déploiement. «Il s’agit de plusieurs dizaines de milliards de dirhams à travers notamment les fibres optiques, les câblages spécifiques, les nouvelles technologies et les travaux d’infrastructure pour le déploiement du réseau. A cet effet, l’effort d’investissement constitue désormais le nerf de la guerre au sein du secteur des télécoms au Maroc», soulignent les analystes.