Subvention de la farine: un système biaisé ne profitant pas assez aux consommateurs

Subvention de la farine: un système biaisé ne profitant pas assez aux consommateurs

Il engloutit 1,5 milliard de DH par an.

Les boulangers et les minotiers sont favorables à sa révision.

 

Par C. Jaidani

Le pain est un produit de base fortement consommé par les citoyens marocains et occupe une place particulière dans leurs habitudes alimentaires. C’est pour cette raison que l’Etat continue de subventionner le blé tendre. La libéralisation du secteur ou sa décompensation risque de faire augmenter le prix du pain de 1,20 DH la baguette à 2 DH, soit une hausse de près de 67%. Certes, une bonne partie des ménages a la capacité de supporter cette hausse, mais pour les familles nécessiteuses, ce sera difficile.

Parmi les activités les plus concernées par ce produit, figure en premier lieu les boulangers. Il faut rappeler que le rôle de cette branche économique est très sensible du fait de son caractère socioéconomique. A l’instar de plusieurs secteurs d’activité, elle a été impactée par le renchérissement des intrants. A ce sujet, les professionnels ont tiré la sonnette d’alarme et ont appelé le gouvernement à plusieurs reprises à prendre les dispositions nécessaires.

«Nous sommes passés par des moments difficiles lors de la pandémie. De nombreux opérateurs du secteur ont mis la clé sous la porte. Nous avons honoré nos engagements envers les citoyens, mais la plupart des professionnels ont cumulé des dettes. La reprise a été timide, elle ne nous a pas permis de compenser le manque à gagner que nous avons enregistré. Malgré ces contraintes, nous avons continué à vendre le pain au prix fixé par l’Etat il y a dix ans. Pourtant, les intrants et les charges ont connu une flambée record. Nous ne profitons d’aucune aide publique. Seule la farine est subventionnée», souligne Lahoucine Azaz, président de la Fédération nationale de la boulangerie et de la pâtisserie. Et de poursuivre : «il n’y a pas assez de marge dans le pain. C’est grâce aux autres produits que les professionnels arrivent à s’en sortir». Cependant, plusieurs associations de consommateurs estiment que la subvention de la farine ne profite pas assez aux citoyens, estimant que les boulangeries réduisent le poids de la baguette de pain ou sacrifient la qualité pour dégager des bénéfices.

Au final, le consommateur est pénalisé. En face, le système de subvention est très coûteux pour l’Etat. Le budget alloué n’a cessé de progresser au fil des ans. Il a atteint 1,3 milliard de DH en 2020, 1,5 milliard de DH en 2021 et risque de terminer l’année à plus de 1,7 milliard de DH. La subvention unitaire est d’environ 150 DH par quintal de blé, sans compter les autres frais liés au stockage. Le gouvernement n’a pas caché son intention de réviser le système de compensation afin de trouver un autre mécanisme plus juste pour soutenir les ménages vulnérables. L’idée germe depuis le gouvernement Benkirane. Après la libéralisation du secteur des hydrocarbures, il a voulu s’attaquer à la filière blé, du sucre et du gaz. Mais pour des considérations sociales, la décision a été repoussée le temps d’instaurer le registre social unifié (RSU) en vue d’accorder des aides directes aux ménages vulnérables.

«La compensation biaise la transparence, l’éthique et l’équité du secteur. Au cours des années 80 et 90, les opérateurs avaient lancé des projets de minoterie dans le seul but d’obtenir le contingentement et la subvention. Aujourd’hui, 80% des conséquences désastreuses sont dues à la farine subventionnée», souligne Moulay Abdelkader Alaoui, président de la Fédération nationale de la minoterie (FNM). Et d’ajouter que «si ce produit n’existait pas, tout le monde serait gagnant. Toute situation de rente donne lieu à des pratiques malsaines. Nous croyons en le registre social unifié qui aura pour objectif d’attribuer de l’aide à la population précaire. Notre Fédération lancera une étude pour établir un plan comptable sectoriel afin de prouver notre bonne foi, couper l’herbe sous le pied des personnes malhonnêtes et aussi moraliser le secteur».

 

 

 

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