Fortement dépendante des donneurs d’ordre européens, elle a intérêt à diversifier ses débouchés. Pour rester performante, la sous-traitance doit relever le défi de la compétitivité de la main-d’œuvre et la maîtrise des chaînes d’approvisionnement.
Par C. Jaidani
Avec le Plan émergence industrielle (PEI) et le Plan d’accélération industrielle (PAI), de nombreuses filières ont connu un développement notoire. L’automobile et l’aéronautique sont devenues de véritables fleurons du secteur industriel et une locomotive pour d’autres segments. Cet essor a généré des écosystèmes intégrés, diversifiés et portés par l’excellence, séduisant de nombreux donneurs d’ordre de dimension internationale. La sous-traitance figure parmi les activités qui ont beaucoup bénéficié de cet envol.
Réalisant plus de 100 milliards de DH de chiffre d’affaires par an, la branche regroupe plus de 3.000 entreprises employant plus de 400.000 personnes. La production approvisionne le marché local, mais en grande partie les marchés étrangers. Il faut rappeler que la sous-traitance bénéficie de nombreux atouts qui lui permettent de lorgner l’international. Il s’agit de la proximité géographique du Royaume, un climat des affaires favorable et qui ne cesse de s’améliorer, une main-d’œuvre disponible et compétente et d’un coût compétitif, sans oublier le renforcement des infrastructures de base.
Les différentes incitations mises par le gouvernement pour séduire les investisseurs sont un autre avantage de taille. Outre des incitations fiscales (exonération de la TVA à l’import et à l’export, réduction du taux de l’IS et celui des taxes locales), l’Etat a créé des zones franches et autres zones industrielles avec un foncier à des prix abordables. Toutefois, de l’avis de nombreux experts, le secteur reste confronté à plusieurs entraves et difficultés qui perturbent son évolution.
«Le Maroc a réalisé des pas de géant pour développer son industrie. Les perspectives d’avenir sont très prometteuses. Au niveau de l’automobile, le potentiel de croissance est très important. Il est encore possible de séduire de nouveaux opérateurs étrangers, particulièrement les sous-traitants pour entamer un nouveau virage axé sur l’innovation. Mais le secteur est dépendant de la fluctuation des prix des matières premières et des intrants à l’international. Le Maroc importe une bonne partie de ses besoins de l’étranger et les chaînes d’approvisionnement ne sont pas stables. La crise ukrainienne a montré leur vulnérabilité. Le Maroc doit relever également le défi de la compétitivité de ses ressources humaines. De nouveaux métiers ont vu le jour et ceux déjà existants connaissent une évolution très rapide. Il est nécessaire de les accompagner par des programmes de formation adéquats», souligne Youssef Idrissi, professeur d’économie industrielle à l’Université Hassan II de Casablanca.
Et de noter que «le secteur a besoin de revoir sa stratégie de développement qui reste focalisée essentiellement sur le marché européen. Cela devrait à terme réduire les marges de croissance de l’activité. Il est temps de s’intéresser de plus en plus aux firmes asiatiques et nord-américaines qui commencent à gagner rapidement des parts de marché au niveau mondial, particulièrement pour le segment de la mobilité de nouvelle génération, comme les véhicules à motorisations électriques ou hybrides». Selon Idrissi, «les constructeurs européens commencent à montrer des signes d’essoufflement et n’arrivent pas à suivre le rythme de croissance de leurs homologues asiatiques, notamment chinois. L’intérêt des marchés hors Europe devrait ouvrir au Maroc de nouveaux horizons, surtout dans les filières qui sont très peu développées localement comme la construction métallique, la chaudronnerie, la fonderie, la transformation des pièces en plastique et composites, décolletage, le traitement des surfaces et finition…».