Produits locaux: «Il est crucial que ce label serve de levier pour les PME/ PMI»

Produits locaux: «Il est crucial que ce label serve de levier pour les PME/ PMI»

Les secteurs prioritaires de la stratégie Made in Morocco sont multiples et variés. Mettre en avant la production locale et son label Made in Morocco contribue signifi cativement au développement de l’économie nationale. Entretien avec Adil Lamnini, Managing Partner d’ERA Group Maroc et président de l’Association professionnelle des marques marocaines.

Finances News Hebdo : L’Association professionnelle des marques marocaines (APMM) que vous présidez, met en avant le produit local et le label Made in Morocco à travers sa promotion et son développement. Parlez-nous des actions que vous entreprenez pour mener à bien votre mission ?

Adil Lamnini : L’APMM s’engage activement depuis 2013 dans la promotion des services et des produits locaux et du label Made in Morocco à travers diverses initiatives stratégiques. Nous menons des campagnes de sensibilisation pour informer les consommateurs sur les avantages des produits et services marocains, mettant en avant leur qualité, leur authenticité et leur contribution significative à l’économie nationale. Nous collaborons avec les pouvoirs publics pour renforcer les réglementations favorables à la production locale, en plaidant pour des politiques incitatives et des subventions destinées à soutenir les entreprises marocaines. Nous participons également à des salons et foires internationales afin de renforcer la visibilité des produits marocains sur les marchés étrangers et de nouer des partenariats commerciaux stratégiques. En matière d’innovation et de recherche et développement, nous encourageons les entreprises locales à investir dans ces domaines pour améliorer la compétitivité de leurs produits. Il est également crucial que le Made in Morocco serve de levier pour les PME, PMI et les startups marocaines, car leur dynamisme et leur capacité à innover sont essentiels au développement durable de notre économie. Nous travaillons aussi à la mise en place de labels de qualité et de certifications pour renforcer la confiance des consommateurs envers les produits Made in Morocco. Enfin, nous offrons des formations et des programmes de développement des compétences afin que les entreprises locales disposent d’une main-d’œuvre qualifiée, capable de répondre aux exigences du marché.

 

F. N. H. : Le Maroc a adopté une stratégie Made in Morocco pour les secteurs industriels dits prioritaires. Où en sommes-nous aujourd’hui ?

A. L. : Le Maroc a réalisé des progrès notables dans la mise en œuvre de la stratégie Made in Morocco pour les secteurs prioritaires. Dans l’automobile, nous avons assisté à une augmentation des investissements et de la production locale, positionnant le Maroc comme un hub industriel dans la région. Des entreprises internationales telles que Renault et PSA ont implanté des usines, dynamisant l’industrie automobile locale. Le secteur de l’aéronautique continue de croître grâce à des partenariats avec des géants de l’industrie comme Boeing et Airbus, ainsi qu’à l’amélioration des compétences locales grâce à des programmes de formation spécialisés. L’électronique de spécialité, notamment l’ingénierie, bénéficie également de ces collaborations et de l’innovation technologique. Dans l’agroalimentaire, les produits marocains gagnent en popularité sur les marchés internationaux grâce à leur qualité et à des efforts de marketing bien ciblés. Les produits de la mer et le secteur textile ont également vu une augmentation des exportations, les entreprises locales se conformant aux standards internationaux de qualité. Cependant, il reste des défis à relever, notamment en matière de formation continue, d’innovation et de financement pour soutenir durablement cette dynamique. Nous devons également renforcer les infrastructures pour améliorer la logistique et la distribution des produits locaux. Nous croyons fermement qu’en s’appuyant sur les compétences et les ressources dont dispose le Maroc, qu’il est urgent et indispensable de développer une souveraineté dans le domaine de la mobilité Made in Morocco. Cette démarche s’inscrit dans une vision d’avenir qui vise à offrir à nos citoyens une mobilité moderne, digne et respectueuse de l’environnement. Les récentes déclarations du ministre de l’Intérieur concernant la Stratégie nationale de mobilité urbaine et l’achat de 3.500 bus illustrent la volonté de l’État d’avancer dans ce sens. Cette stratégie ambitieuse, dont l’horizon est fixé à 2040, vise à transformer notre système de transport en un modèle plus durable, inclusif et efficient. Notre pays possède déjà une expertise reconnue dans la fabrication de véhicules. Nous fabriquons des voitures et des avions, et il est tout à fait possible de produire nos propres bus «Made in Morocco». L’implantation de giga factories sur notre territoire démontre notre capacité à relever des défis ambitieux. Nous avons donc tous les atouts nécessaires pour réussir ce challenge et offrir à nos citoyens des transports modernes et dignes. Il est également important de mettre fin à l’importation des vieux bus européens qui ne respectent plus les normes de pollution. Cette opportunité doit être saisie pour positionner nos véhicules dans les énergies renouvelables, en accord avec nos engagements de la COP21. En optant pour des transports propres et durables, nous contribuons à la préservation de l’environnement et à la construction d’un avenir meilleur pour les générations futures. Nous devons tirer parti de l’expérience des opérateurs marocains dans la gestion de la mobilité urbaine. Leur implication sera essentielle pour réussir la transition vers une mobilité durable. En travaillant ensemble, nous pouvons construire un système de transport plus moderne, plus digne et plus respectueux de l’environnement, au service de tous les citoyens marocains.

 

F. N. H. : Soutenir et consolider la production locale passe également par des partenariats public-privé solides. Que faut-il entreprendre dans ce sens ?

A. L. : Il est essentiel de renforcer la collaboration entre les secteurs public et privé. Les pouvoirs publics doivent continuer à créer un environnement propice à la production locale en mettant en place des politiques incitatives, des subventions et des programmes de soutien spécifiques aux secteurs prioritaires. Il est indispensable de développer des infrastructures modernes et efficaces pour faciliter la logistique et la distribution des produits locaux, nécessitant des investissements constants. Le secteur privé doit s’engager dans des projets d’innovation, de recherche et développement pour améliorer la compétitivité de leurs produits. Les entreprises doivent adopter des technologies modernes et les meilleures pratiques de production pour répondre aux exigences du marché mondial. La formation et le développement des compétences sont également des piliers essentiels. Des programmes de formation adaptés sont nécessaires pour garantir une main-d’œuvre qualifiée capable de répondre aux exigences du marché. Des initiatives telles que des partenariats avec des universités et des instituts de formation professionnelle peuvent jouer un rôle clé dans ce domaine. La mise en place de labels de qualité et de certifications renforcera la confiance des consommateurs envers les produits Made in Morocco. Les campagnes de communication doivent continuer à sensibiliser les consommateurs sur les avantages de l’achat local, en mettant en avant la qualité, l’authenticité et les bénéfices économiques et sociaux des produits marocains. Ces éléments sont essentiels pour pérenniser nos acquis et assurer que les générations futures continuent de soutenir et de valoriser la production locale.

 

F. N. H. : Qui dit produits de qualité dit consommation massive. À votre avis, comment peut-on pousser les Marocains à privilégier les produits locaux ?

A. L. : Pour encourager les Marocains à privilégier les produits locaux, il est essentiel de mener des campagnes de sensibilisation continues qui mettent en lumière les avantages économiques, environnementaux et sociaux de l’achat local. Il est important de montrer aux consommateurs que choisir des produits marocains soutient l’économie nationale, crée des emplois et réduit l’empreinte carbone. Nous devons également faciliter l’accès aux produits locaux à travers des points de vente bien répartis et des plateformes de commerce électronique efficaces. Des initiatives telles que les journées sans importations ou les semaines du Made in Morocco peuvent créer un engouement et une prise de conscience collective. Des incitations financières comme des réductions fiscales ou des subventions pour les produits locaux peuvent également jouer un rôle important dans la modification des comportements d’achat. En outre, les campagnes de publicité doivent mettre en avant la qualité, l’authenticité et la diversité des produits marocains. Le rôle des influenceurs et des ambassadeurs de marque est également crucial. En impliquant des sportifs et des personnalités reconnus et respectés pour promouvoir les produits locaux, nous pouvons influencer positivement les comportements d’achat des consommateurs.

 

F. N. H. : Le Maroc s’apprête à accueillir des évènements d’envergure, notamment la Coupe du monde en 2030, aux côtés de l’Espagne et du Portugal. Comment l’organisation de cet événement footballistique peut-elle booster les produits locaux ?

A. L. : L’organisation de la Coupe du monde 2030 représente une opportunité unique pour booster la promotion du Made in Morocco et propulser les produits locaux sur la scène internationale. Cet événement attirera une audience mondiale, offrant une vitrine exceptionnelle pour les produits marocains. Nous pouvons utiliser cette plateforme pour organiser des expositions et des foires commerciales en marge des événements sportifs, où les visiteurs pourront découvrir et acheter des produits marocains. En partenariat avec les autorités, nous pourrions créer des zones dédiées aux produits locaux dans les stades et les villages de supporters, mettant ainsi en avant la richesse et la diversité de notre production nationale. Il est également possible de créer des partenariats avec des entreprises de sponsoring et des médias internationaux pour mettre en avant le label Made in Morocco. Des campagnes publicitaires ciblées durant la Coupe du monde peuvent accroître la notoriété des produits marocains et attirer de nouveaux marchés. De plus, l’accueil de visiteurs du monde entier offre une occasion unique de démontrer la qualité et l’hospitalité marocaine, renforçant ainsi l’image de marque du pays et de ses produits. Nous pourrions aussi organiser des événements culturels et gastronomiques pour mettre en avant la richesse de notre patrimoine et promouvoir nos produits. La tenue de la Coupe d’Afrique en 2025 nous offre également une opportunité en or de réaliser une répétition générale. C’est l’occasion idéale pour rassurer les instances sportives internationales, affirmer notre leadership continental, et surtout insuffler la dynamique et l’énergie nécessaires pour nous propulser vers la Coupe du monde de 2030. Enfin, il est essentiel de travailler avec les autorités pour garantir que les infrastructures mises en place pour le mondial bénéficient également à la promotion et à la distribution des produits locaux à long terme. En développant des réseaux logistiques et de distribution performants, nous pourrons soutenir durablement l’exportation de nos produits et renforcer la position du Maroc sur les marchés internationaux. Il est à noter que l’Espagne a pu multiplier son revenu moyen par habitant par quatre lors de la Coupe du monde de 1982, et qu’elle a pu profiter d’infrastructures de premier plan, ce qui lui a permis de prendre sa place sur l’échiquier économique européen et mondial. Le Maroc pourrait tirer des enseignements de cette expérience ibérique pour maximiser les retombées économiques et promotionnelles de cet événement historique. Pour concrétiser cette vision, nous lançons un appel solennel à toutes les forces vives du pays pour l’organisation des assises du Made in Morocco. Ces assises seront l’occasion de réfléchir sur notre stratégie de nation branding pour les cinq prochaines années. Ce momentum décisif doit être inscrit dans l’agenda du gouvernement et du patronat. C’est stratégique et crucial, car cela s’inscrit dans les fondements mêmes de la vision royale, la mise en place d’un nouveau modèle de développement, et surtout la valorisation du capital humain, matériel et immatériel de notre Royaume. Le Made in Morocco, c’est maintenant ou jamais.

 

 

 

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