PPP : Une nouvelle loi, de nouvelles ambitions

PPP : Une nouvelle loi, de nouvelles ambitions

autorouteLe décret d’application des contrats de partenariat public-privé sera bientôt publié. Retour sur l’esprit et la finalité d’une loi appelée à révolutionner le mode d’emploi et de financement de grands projets structurants du pays.

‘‘La publication du texte d’application de la Loi 986-12 relative aux contrats de partenariat public-privé n’est qu’une question de quelques jours». L’annonce a été faite par le directeur des Entreprises publiques et de la privatisation (DEPP), Samir Tazi, à l’entame d’une conférence de presse organisée récemment au siège de la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc (CFCIM). Le numéro un de la DEPP a saisi l’occasion pour lever certaines équivoques liées à l’esprit et à la finalité de la mise en place au Maroc du principe de partenariat public-privé. Le PPP, insiste-t-il, n’est pas une privatisation du service public. Ce dernier sera toujours fourni sous la responsabilité du secteur public. La maîtrise du processus donnant lieu à des projets de PPP demeure dans le giron de l’Etat, aussi bien en cours de réalisation qu’en cours d’exploitation. Puis, ajoute Samir Tazi, contrairement à ce que d’aucuns laissent entendre, la finalité derrière le PPP n’est pas de réduire l’effort de l’investissement public. Le Maroc, rappelle-t-il, a fait le choix de la croissance via la demande, et partant, à travers le développement de l’investissement public. De 2005 à 2015, l’effort d’investissement public a plus que doublé (2,6 fois), passant de 110 milliards à 186 milliards de DH. Un effort fourni tout en préservant la soutenabilité budgétaire. Le PPP, affirme Tazi, va permettre d’amplifier l’investissement public. Autre précision évoquée par l’invité de la CFCIM : il ne s’agit pas de réaliser des projets non viables. Le recours au PPP, a-t-il souligné, se fera quand il s’agit de projets présentant une viabilité économique et financière nécessaire, répondant aux priorités sectorielles. 

 

Risque partagé

Loin de ressembler ou de se confondre avec la gestion déléguée, le PPP s’inscrit dans une parfaite logique de complémentarité. Mieux encore, la loi relative aux contrats de PPP ouvre un espace juridique plus large que celui réservé à la gestion déléguée. Parmi les éléments de différenciation cités par le directeur de la DEPP, notons celui de la rémunération du service public qui peut être supporté de manière totale ou partielle par le secteur public. Le texte prévoit également la notion de partage du risque entre le secteurs public et privé, notamment dans le montage financier des projets. «Le risque sera transféré à la partie à même de supporter le risque à moindre coût», explique Samir Tazi.

 

Quid de l’apport de cette nouvelle loi ? 

D’abord, la loi couvre un champ d’application large. Le texte, dixit Tazi, s’applique à l’ensemble des secteurs d’activités (Etat et établissements publics). Seules les collectivités territoriales n’y sont pas encore intégrées, car il va falloir attendre la sortie des lois organiques des communes, provinces et préfectures, comme le stipule le texte constitutionnel. «Mais nous avons l’assurance du ministère de l’Intérieur qui nous a promis d’élargir le champ d’application du PPP aux collectivités locales», annonce Tazi. Ce dernier rassure que tout sera fait pour éviter de choisir le PPP à tout bout de champ. En effet, la nouvelle loi oblige les personnes publiques à procéder à une évaluation préalable, une monétarisation des avantages du projet, avant de recourir au PPP. L’objectif étant de s’assurer que le mode PPP est adapté au projet, comparativement aux autres modes. De ce fait, la loi prévoit l’examen de plusieurs aspects : la complexité du projet, le coût global, la performance attendue, etc. L’évaluation des projets se fait à travers une commission interministérielle qui, de son côté, soumettra son avis au ministre des Finances. C’est ce dernier qui se prononcera in fine, puisque les contrats PPP peuvent durer de 5 à 50 ans, avec ce que cela suppose comme engagements financiers et budgétaires à long terme. 

Par ailleurs, la loi privilégie la voie de la concurrence à travers des mécanismes spécifiques. À titre d’exemple, à la différence des marchés publics, la loi sur le PPP donne la possibilité d’opter pour un montage commun avec le privé, dans une logique d’optimisation. De la même manière qu’il serait possible pour une personne physique de présenter une offre spontanée (projets innovants). S’agissant des modalités d’attribution, si le principe du moins disant est requis sur le terrain des marchés publics, la loi PPP introduit la notion de l’offre économiquement avantageuse, avec la possibilité de mettre en place des critères de préférence nationale, en vue de favoriser l’émergence de groupes nationaux.

 

Quelques projets PPPables

Avant même que le décret d’application du PPP ne voie le jour, certains départements ministériels ont exprimé le souhait de mener des projets de grande envergure selon une démarche PPP. Parmi ces projets, on peut citer ceux des nouvelles lignes ferroviaires desservant Beni Mellal, Tétouan et Agadir, l’extension de la ligne grande vitesse Oujda-Marrakech, le nouvel aéroport de Marrakech et celui de Tit Mellil. C’est le cas également des ports de Kénitra Mehdia, Dakhla et Jorf Lasfar, du trançon autoroutier reliant Fès à Nador, l’autoroute continentale de Casablanca. Deux autres projets de dessalement de l’eau de mer sont d’ores et déjà soumis à une évaluation préalable, l’un à Souss-Massa, le second à Azemmour-Bir Jdid. Notons également deux projets de CHU à Laayoune et à Béni Mellal, ainsi que de nouveaux campus universitaires à Marrakech.

 

Wadie El Mouden

L’Actu en continu

Hors-séries & Spéciaux