Il sera bénéfique pour les PME/TPME.
Le système de classement des entreprises remis en question.
Entretien avec Abdellah El Fergui, président de la Confédération des TPE/PME.
Propos recueillis par M. Diao
Finances News Hebdo : Vous avez mené dernièrement des discussions avec le ministère de l’Economie et des Finances. A-t-il été réceptif à vos revendications ?
Abdellah El Fergui : Les discussions se sont déroulées dans de bonnes conditions. La ministre de l’Économie et des Finances a été compréhensive concernant nos inquiétudes et nos doléances, mais les réalisations sont mitigées. Plusieurs de nos revendications formulées dans le cadre des Assises de la fiscalité ne sont pas encore prises en considération. C’est le cas de l’uniformisation du taux de l’IS et l’attribution de 20% de la commande publique aux PME/TPME. Nous déplorons aussi le manque de concertation de la part du gouvernement sur de nombreux points, à l’image de l’augmentation du Smig de 10% sur deux ans, ou encore l’augmentation des impôts. Cela est pénalisant pour l’entreprise, particulièrement dans une conjoncture aussi difficile. Certes, un accord a été conclu entre le gouvernement et le patronat. Mais la CGEM ne représente pas les PME et les TPME, car ses statuts sont taillés sur-mesure au profit des grandes entreprises. Parmi les points positifs, figure notamment le problème des PME/ TPME qui ont des arriérés fiscaux et qui ne peuvent être retenues pour les marchés publics. Dans ce cas, la DGI peut leur délivrer une attestation contre remise d’une déclaration sur l’honneur par laquelle elles s’engagent à payer les impôts après avoir reçu le règlement. De même, le chiffre d’affaires imposable de l’autoentrepreneur a été revu à la hausse. Cette disposition a fait l’objet d’un amendement présenté par les groupes de la majorité. Il prévoit de relever le chiffre d’affaires annuel au titre des prestations de service réalisées par l’autoentrepreneur ou le contribuable soumis au régime de la contribution professionnelle unique, pour le compte d’un même client, et dont le surplus est soumis à l’impôt sur le revenu par voie de retenue à la source, de 50.000 DH à 80.000 DH.
F.N.H. : Où en est le projet de quota de 20% de la commande publique attribuée aux PME/TPME ?
A. E. F. : Il est urgent d’appliquer le quota. Pour remporter des marchés, les PME ou les TPME ont le secteur privé ou le secteur public. Le premier est très pénalisé par une conjoncture difficile. Les délais de paiement ne cessent de s’allonger, dépassant le plus souvent 90 jours. Pour préserver leurs clients, ces entreprises acceptent malgré elles ces délais, car la commande publique reste une bouffée d’oxygène pour les petits et moyens entrepreneurs. Si l’on applique les 20%, pas moins de 60 milliards de DH seront injectés dans ce tissu économique, avec tout ce que cela peut générer comme valeur ajoutée, création d’emplois ou investissements. La ministre de l’Économie et des Finances a promis que le décret d’application des quotas sur la commande publique sera publié dès le début de 2023. Dans ce cadre, la Banque mondiale a été sollicitée par le gouvernement pour apporter son expertise technique. Sa représentation à Rabat nous a contactés à ce sujet pour livrer notre point de vue, d’autant que nous avons mené des travaux approfondis dans ce domaine.
F.N.H. : Qu’en est-il de la problématique du classement des entreprises qui empêche certaines PME/ TPME l’accès aux marchés publics ?
A. E. F. : Effectivement, le classement des entreprises est un handicap majeur pour de nombreuses PME/TPME pour pouvoir bénéficier de la commande publique, particulièrement celles installées dans les régions. Entre 80 à 90% de ces entreprises sont systématiquement rejetées par les walis ou les gouverneurs pour des marchés lancés par les communes, car elles ne figurent pas dans ce classement. Pour décrocher ce précieux sésame, c’est un véritable parcours du combattant. Imaginez un chef d’entreprise basé à Al Hoceima : il doit faire des allersretours entre sa ville et Rabat pendant une période dépassant parfois les trois ans. C’est beaucoup de désagréments et de perte de temps. Nous avons eu des séances de travail avec le ministère de l’Équipement à ce sujet et avons formulé nos remarques et nos suggestions. Du temps de Abdelkader Amara, ce département avait chargé un bureau de consulting pour élaborer une étude. Nous avons été contactés et avons suggéré que les dossiers de classement des entreprises soient déposés à Rabat, et que les classements inférieurs soient réservés aux régions. Nous sollicitons également un dispositif pour protéger et soutenir les sous-traitants.