Marchés publics : En béton, ce nouveau texte

Marchés publics : En béton, ce nouveau texte

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Le CCAG-T (Cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux) clarifie les dispositions de l’ancien décret qui restent très ambigües pour les opérateurs. Il veille à remédier aux différentes lacunes persistantes.

 

Moderniser le giron de l’achat public, simplifier les procédures, lutter contre les pratiques illicites… tel est le leitmotiv des différentes réformes afférentes aux marchés publics. Elles ont toutes pour point nodal la liberté d’accès à la commande publique, l’égalité de traitement des concurrents, la simplification des procédures et surtout la bonne gouvernance en limitant, un tant soit peu, les conflits d’intérêts et les mesures anti-corruption.

Valeur aujourd’hui, les marchés publics n’arrivent pas à se dépêtrer de leur léthargie. Globalement, les taux de réalisation des marchés publics sont en deçà de 70%, de nombreux chantiers étant inexplicablement à l’arrêt et un grand nombre de dossiers en contentieux. Aussi, l’investissement public est-il loin de réaliser les objectifs qui lui sont assignés en matière de croissance économique et surtout de création d’emplois.

Les raisons invoquées sont liées au timing et au retour sur investissement qui, souvent, prend plusieurs années. Ce qui constitue un manque à gagner pour l’Etat et les opérateurs économiques. «Les réformes de textes règlementaires se succèdent, mais ils ne peuvent être efficients que s’ils sont utilisés à bon escient», explique Youssef Chouri, consultant en marchés publics au sein de la Serec, invité récemment à la Chambre britannique de commerce au Maroc.

«Même si les crédits budgétaires alloués à l’investissement public sont en évolution constante et malgré leur importance, ils demeurent non seulement insuffisants mais, de surcroît, mal gérés», corrobore Y. Chouri. A ce titre d’ailleurs, il est utile de rappeler que la commande publique représente environ 20% du PIB; elle constitue un domaine d’activité de l’entreprise nationale, notamment de la PME (près de 90% du tissu industriel national).

Mieux encore, un secteur comme celui du BTP réalise 70% de son chiffre d’affaires dans le cadre des marchés publics, un autre comme celui de l’ingénierie en effectue 80%. Bref, l’Etat est le premier acheteur et il suffit d’analyser la baisse de la dépense publique durant ces cinq derniers mois de blocage politique et son impact sur l’évolution du PIB pour s’en convaincre. C’est dire l’importance de la commande publique dans le développement économique du Royaume.

CCAG-T : un nouvel état d’esprit

Pour remédier aux lacunes relatées ci-dessus, le décret n°2-14-394 du 13 mai 2016 approuvant le CCAG-T (publié au BO n°6470 du 2 juin 2016), est entré en vigueur le 1er octobre 2016. Il abroge de fait le décret n° 2-99-1087 du 4 mai 2000.

Le principe de la non réactivité des lois et règlements exige que les marchés engagés avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis aux dispositions de l’ancien décret jusqu’à leur liquidation totale. Le présent CCAG-T fixe les conditions d’exécution des marchés de travaux et arrête les droits et les obligations du maître d’ouvrage et de l’entrepreneur.

D’après Y. Chouri, le nouveau CCAG-T est désormais en interaction avec les textes qui cadrent les marchés publics au Maroc. Il répond aux doléances des opérateurs dans la mesure où il se décline en trois axes qui s’avèrent judicieux pour la commande publique. Dans un premier temps, il clarifie les dispositions de l’ancien décret qui restent très ambigües pour les opérateurs. Secundo, il introduit de nouvelles dispositions telles que la protection des employés de l’entrepreneur, la protection de l’environnement et l’action de formation dans les chantiers. Autre apport du CCAG-T et qui n’est pas des moindres : la mise en place de nouveaux outils de gestion (plan d’implantation de l’ouvrage, plan d’assurance qualité registre du marché).

Quoique les deux CCAG-T ont le même champ d’application, force est de constater qu’ils n'ont pas le même esprit. Plusieurs dispositions du nouveau décret favorisent un climat de collaboration et un esprit de partenariat en édictant des mesures concrètes pour garantir les droits et les obligations des intervenants dans toute la chaîne des marchés des travaux.

Entre autres nouveautés juridiques visant la bonne administration de la commande publique, il y a le décret relatif aux délais de paiement et intérêts moratoires. Ledit décret est entré en vigueur le 1er janvier 2017. Toute dépense résultant de l’exécution d’un marché passé pour le compte de l’Etat doit être ordonnancée et payée dans un délai n’excédant pas 60 jours à compter de la constatation du service fait (45 jours au niveau de l’ordonnateur et 15 jours au niveau du comptable assignataire). Le défaut d’ordonnancement et de paiement des sommes dues dans les délais de 60 jours donne droit au titulaire du marché, sans formalités préalables, au paiement des intérêts moratoires lorsque le retard incombe exclusivement à l’administration.

Last but not least : la mesure en faveur des PME pour l’accès aux marchés publics. Le maître d’ouvrage est tenu de réserver 20% du montant prévisionnel des marchés qu’il compte lancer au titre de chaque année budgétaire. Il peut également décider l’allotissement du marché pour permettre aux PME d’accéder aux commandes publiques.

Toutes ces nouveautés ne doivent pas occulter la disparité et la diversité des textes qui dérangent les opérateurs à plus d’un titre. Parce que si certains établissements sont assujettis au décret des marchés publics, d’autres disposent d’un règlement qui leur est propre. Ce qui entraîne la confusion chez les opérateurs qui, dans certaines conditions, ne savent plus sur quel pied danser. Un document unique est donc souhaitable.

Une question reste toutefois posée : la transparence rime-t-elle toujours avec l’efficacité ? Pas toujours, parce que la prestation pourrait être moins coûteuse en procédant à un simple achat (sans recours à l’appel d’offres). ■

S. Es-siari

Quelques nouveautés juridiques

Le décret n°2.14.272 du 14 mai 2014 stipule que :

 •Il peut être accordé des avances pour financement des marchés publics dont le montant initial est égal ou supérieur à 500.000 DH (TTC) et le délai de réalisation est égal ou supérieur à 4 mois (excepté les prestations ayant fait l’objet de sous-traitance).

•Peuvent également en bénéficier une seule fois les marchés-cadres si leur minimum est égal ou supérieur à 500.000 DH (TTC), les marchés renouvelables sur la base du montant global de la première année et le montant de la tranche principale ou ferme pour les marchés à tranches conditionnelles.

Pour les marchés allotis si le montant du lot est égal ou supérieur à 500.000 DH (TTC) ou sur la base du montant de chaque lot pour l’attributaire de plusieurs lots si le montant global de ces lots est égal ou supérieur à 500 000 DH (TTC).

Ces avances sont fixées à 10% pour les marchés dont le montant est inférieur ou égal à 10 MDH (TTC) et à 5% pour le montant du marché supérieur à 10 MDH (TTC).

Les avances en matière de marchés publics sont plafonnées à 20 MDH (TTC).

 

 

 

 

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