Loi sur la protection du consommateur : Faut-il s’attendre à un recours massif à l’article 149 devant les tribunaux ?

Loi sur la protection du consommateur : Faut-il s’attendre à un recours massif à l’article 149 devant les tribunaux ?

Cet article est prononcé en cas de licenciement ou de situation imprévisible pour différer le paiement d’un crédit.

Le demandeur doit prouver qu’il a été sérieusement impacté par la crise économique.

 

Par C. Jaidani

 

La crise de la Covid-19 a impacté sérieusement l’économie nationale. Elle a engendré des faillites en série d’entreprises opérant dans les secteurs touchés directement et un bond du taux du chômage. Plusieurs citoyens se sont retrouvés du jour au lendemain sans revenu et, par conséquent, incapables de subvenir à leurs besoins quotidiens et d’honorer leurs engagements contractuels. C’est le cas des personnes qui ont contracté un crédit bancaire.

Face à ce constat, le gouvernement a décidé un report des échéances (crédit consommation et crédit acquéreur) jusqu’à la date du 30 juin 2020. Passé ce délai, les personnes concernées ont reçu des mises en demeure de la part des organismes de financement les invitant à régulariser leur situation. Après une période de précontentieux, les banques ont fait appel à la justice pour régler leurs litiges. Les tribunaux du Royaume regorgent de plus en plus de cas de non-paiement d’échéances.

Le volume de ce genre d’affaires va se multiplier davantage au fil du temps, avec la montée de l’insolvabilité. Pour défendre leurs clients, les avocats évoquent l’article 149 de la loi sur le protection du consommateur, et parfois l’article 243 du Dahir sur les obligations et les contrats (DOC) qui permette au juge de prendre des mesures en faveur des débiteurs qui ont des difficultés financières. Selon Fatima Azzahra Ibrahimi, avocate au Barreau de Casablanca, «l’article 149 de la loi sur la protection du consommateur stipule que l’exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement ou de situation sociale imprévisible, suspendue par ordonnance du président du tribunal compétent».

L'ordonnance peut décider que «durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt». L’emprunteur peut dès lors obtenir la suspension des échéances pour une durée maximale de deux ans. Il peut également solliciter le tribunal pour que, pendant ces deux années, les sommes non réglées ne soient pas soumises aux intérêts. Fatima Azzahra Ibrahimi précise que le débiteur doit prouver qu’il a été sérieusement impacté. A cet égard, elle donne comme exemple un jugement prononcé dernièrement par le tribunal de première instance de Kénitra stipulant le report du paiement de six mois. Il s’agit d’un commerçant qui a prouvé que son activité a été perturbée par une baisse drastique des ventes lors de la période du confinement. Il est de ce fait dans l’incapacité de payer ses dettes.

En revanche, un employé d’une compagnie de transport aérien, dont le secteur a été fortement impacté par la crise de la Covid-19, a vu sa demande de report des échéances refusée par le tribunal de première instance de Casablanca. Malgré le fait qu’il a prouvé que son employeur a procédé à une réduction de son salaire du fait de l’absence des primes et autres gratifications, le juge n’a pas donné suite favorable à sa doléance, estimant qu’il est dans la capacité de régler ses dettes à temps.

Il faut dire que les arguments présentés par les parties concernées ont un poids déterminant dans la décision de la justice. «Il faut s’attendre à un recours massif à l’article 149 de la loi sur la protection du consommateur. et ne pas espérer que les juges prennent en considération systématiquement un environnement de crise sanitaire pour prononcer des jugements sur la base uniquement de cet article», explique Ibrahimi.

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