Orange Maroc voit d'un bon œil la mutualisation des infrastructures télécoms, ouvrant la voie à un ralliement des joint-ventures annoncées par Maroc Telecom et inwi.
C'est une première dans les annales de la tech marocaine. Réunis pour la première fois sur un même panel au Gitex Africa, les trois grands opérateurs télécoms nationaux - Maroc Telecom, inwi et Orange Maroc - ont mis en sourdine leur rivalité historique pour parler d’un enjeu clé : la mutualisation des infrastructures télécoms.
Un débat sans grandes annonces concrètes, mais révélateur d’un tournant stratégique et des discours convergents, alors que les 3 opérateurs s'évitent habituellement dans ce type d'exercices de communication commun. Le Maroc est présenté comme un nœud névralgique du trafic numérique continental. Entre l’Atlas Offshore et les nouveaux câbles en développement vers l’Afrique, le Royaume joue déjà un rôle clé dans la connectivité régionale.
«Le Maroc est un hub régional au service de l'Afrique», rappellet-on auprès de l'opérateur historique, insistant sur le rôle des télécoms dans la diplomatie économique marocaine. Le Maroc est en effet le premier investisseur africain en Afrique de l’Ouest, et le numérique y est vu comme un levier majeur de souveraineté.
Mutualisation des infrastructures
Sur le terrain, les opérateurs télécoms font face à une explosion de la demande. «Le volume de données a été multiplié par dix», confie un dirigeant d’inwi, évoquant une cadence d’investissement «rarement observée auparavant». Deux projets emblématiques illustrent l’effort fait par la filiale du groupe Al Mada sur le territoire national : la couverture 4G de plus de 3 millions de Marocains dans des zones reculées, et l'interconnexion de 240 établissements universitaires avec 20.000 points WiFi pour un million d’étudiants.
Des projets complexes techniquement, coûteux, mais vitaux pour réduire la fracture numérique. L’annonce récente de la création de joint-ventures entre Maroc Telecom et inwi marque une forme de réconciliation dans un secteur longtemps fragmenté. Orange Maroc, qui dispose d’un actionnariat institutionnel important (CDG, Ocapital, Groupe Orange), se dit quant à lui «totalement ouvert» à la mutualisation.
C'est la première fois que le groupe s'exprime officiellement. Sa DG rappelle que 3.000 tours mobiles sont déjà partagées, et qu’un projet ambitieux de mutualisation de la fibre (FTTH) est en phase de test avec le soutien de l’ANRT. «Ce n’est plus un sujet, c’est une obligation», résume-telle. Optimiser les coûts, accélérer le déploiement, réduire l’empreinte carbone : les raisons convergent entre les 3 opérateurs.
Au-delà de l’infrastructure, les opérateurs s’accordent : la finalité reste le service. «L’infrastructure n’est pas une fin en soi», martèle un intervenant. Développer des solutions souveraines de cybersécurité, héberger les données sur le continent, ou encore digitaliser des secteurs clés comme l’agriculture ou la santé : les chantiers sont vastes. Mais la coopération technique doit désormais se traduire en modèles économiques pérennes et équitables, au bénéfice des usagers africains dans leur diversité. Dans leurs interventions, les opérateurs montrent qu'ils sont prêts à parler d’une même voix. Il n’y a plus qu'à concrétiser.