Fonds Mohammed VI pour l’investissement : le capital investissement marocain fait sa révolution

Fonds Mohammed VI pour l’investissement : le capital investissement marocain fait sa révolution

Mohamed Benchaâboun, Directeur général du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, a fait un important point d’étape sur les réalisations du Fonds à l’occasion de la troisième édition des «Nuits de la Finance» organisée par Finances News Hebdo.

 

Par A. Hlimi

 

 

Le Fonds Mohammed VI pour l’investissement est sur les rails. Les premiers fonds thématiques seront opérationnels d’ici fin juin et, sans surprise, l’engouement des opérateurs a été fort pour le fonds souverain qui a été pensé comme un outil de relance par le Roi en pleine crise pandémique en 2020. Mohamed Benchaâboun, pédagogue comme à son habitude, n’a pas manqué de rappeler, l’objectif, le rôle et les perspectives de développement de cet outil conçu initialement comme un «fonds de fonds» de Private Equity, avant de voir son champ d’actions élargi.

Engouement des investisseurs et des sociétés de gestion

L’appel à manifestation d’intérêt lancé par le Fonds pour sélectionner des sociétés de gestion de capital investissement a attiré un bon nombre d’opérateurs nationaux et internationaux. Ils étaient 46 soumissionnaires et, après un processus rigoureux de sélection, sur la base de critères aussi bien quantitatifs, comme le Track Record, que qualitatifs, comme la qualité des équipes de gestion que le Fonds a rencontrées une par une, 17 Sociétés de gestion (SDG) ont finalement été retenues. A fin avril, ces SDG ont présenté 14 Mds de dirhams d’engagements d’investisseurs, auxquels il faut ajouter les 6 Mds de dirhams mis sur la table par le Fonds.

«Ces sociétés de gestion vont gérer, d'un côté, les fonds sectoriels liés notamment à l’industrie, l’agriculture et le tourisme. Une dizaine de SDG ont été choisies pour cibler spécifiquement les PME qui ont été stratifiées à notre niveau en plusieurs catégories selon la taille du ticket», explique Benchaâboun, qui assure que la couverture du marché du Private Equity sera désormais totale.

Accompagnement des startups

Il y a quelques semaines, Mohamed Benchaâboun a annoncé, à l’occasion d’une rencontre à la CGEM, que le Fonds allait également cibler spécifiquement le segment des startups, avec un produit dédié qui arriverait à la fin du printemps. Aux «Nuits de la Finance», il fait le point sur ce projet : «L’appel d’offres a été lancé il y a quelques semaines et les soumissionnaires ont jusqu’à mi-juillet pour répondre. Nous constatons déjà une dynamique intéressante qui ne nous surprend pas».

 

Ressources humaines : Une denrée rare
Dans son intervention, Mohamed Benchaâboun a beaucoup mis l’accent sur la qualité des équipes de gestion dans le processus de sélection des 17 sociétés de gestion. Leur expérience, leur cloosing et sorties passées, leur capacité à délivrer les TRI (Taux de rentabilité internes) promis préalablement aux investisseurs ont été scrutés. De longs entretiens individuels ont été menés avec chaque équipe et le Fonds exige que les personnes clés soient maintenues dans les structures durant la période d’investissement du Fonds Mohammed VI. Selon son DG, c’est un facteur clé du succès. Lui-même a dû s’entourer de profils de qualité, des Marocains résidant dans le Royaume ou à l’étranger, pour s’assurer du bon fonctionnement des opérations.

 

Commentant la couverture de ce segment par les capital-investisseurs, Benchaâboun fait le constat d’une profondeur de marché inférieure au potentiel du Maroc. Pour lui, par rapport à d’autres pays comparables, le Maroc doit encore fournir des efforts pour mieux se positionner sur ce segment. Il sera ainsi, avec Innov Invest de Tamwilcom, le second opérateur public à investir cette catégorie. Et pour mitiger les risques liés à ce type d’entreprises, le Fonds travaille sur un projet multidimensionnel pour encourager les investisseurs à participer aux levées de fonds. «Sur ce segment, le Fonds s’engage sur le tiers du financement, et nous avons demandé à la CDG de nous accompagner avec un deuxième tiers. Il n’y aura donc qu’un tiers des fonds à lever réellement. Nous opérons également, avec le ministère de la Transition numérique et le ministère des Finances, afin qu’ils nous accompagnent dans la mise en place d’un mécanisme de garantie qui sera prêt au moment où nous aurons finalisé le processus de recrutement des SDG. Ce mécanisme, dit de First Loss, prend en charge les premières pertes qui pourraient survenir à concurrence d’une enveloppe financière pré-établie avec le gouvernement. Ces éléments ont été décrits de manière explicite dans l’appel d’offres que nous avons lancé».

Un rôle important dans les projets d’infrastructure

Le Fonds jouera également un rôle d’investisseur en direct dans de grands projets d’infrastructure du Royaume. Des projets qui demandent un souffle long et où les critères de développement sont tout aussi importants que les critères financiers. «Ce sont des projets qui demandent un investissement important et beaucoup de temps dans leur préparation. Nous y travaillons avec les autorités publiques, qui sont souvent les donneurs d’ordres dans ce cas. Ces projets ont besoin d’une approche innovante de financement et d’accompagnement sur le volet juridique, financier et technique. Notre implication en direct rend les projets réalisables», explique Benchaâboun.

«Pick up the winner»

Témoignant des attentes du Fonds par rapport à l’écosystème du capital-investissement marocain, Mohamed Benchaâboun a insisté sur le rôle dans cette industrie dans la détection de pépites capables de se développer au Maroc, mais aussi dans le reste du monde. «Il faut accompagner les PME et les convaincre qu’elles peuvent exporter leur savoir-faire et que le marché doit être abordé de manière globale en dehors du territoire national. Nos entreprises doivent être convaincues qu’il ne faut pas rester petit. Misez sur les meilleurs, ceux qui ont de l’ambition, «pick up the winner», a-t-il dit. «Prenez-les par la main et poussez-les à sortir à l’international», conclut-il. 

 

Fonds Mohammed VI pour l'investissement : Les 3 principes directeurs
Le Fonds recherche dans ses investissements à la fois une rentabilité financière et un impact économique, social et environnemental. Le reporting des SDG sur les critères ESG est primordial. Le second principe est celui de l’additionnalité. Le Fonds investit dans des domaines peu ou pas couverts par le financement privé pour générer une additionnalité (horizons longs, capital patient, préparation de projets, fixation de normes ESG élevées, etc.). Mohamed Benchaâboun a d’ailleurs souligné que des secteurs comme l’agriculture et le tourisme, peu ou pas couverts jusqu’à présent, le seront avec le concours du Fonds. Lequel vise à mobiliser des financements privés importants pour démultiplier les fonds propres investis. L’objectif principal est d’atteindre un effet de levier de 10 fois pour que le capital initial du Fonds, de 15 Mds de dirhams, puisse financer 150 Mds de dirhams de projets et d’entreprises.

 

 

 

 

 

 

 

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