Fathallah Sijilmassi, Secrétaire général de l’UPM, nous informe que contrairement aux idées reçues, le projet Union pour la Méditerranée (UPM) existe et donne des résultats.
Certes loin de l’idéal, mais il se veut une force de propositions et de réflexion pour une région qui en a vraiment besoin et une jeunesse qui aspire à des jours meilleurs. Aussi, le SG de l’UPM n’est-il pas de l’avis de ceux qui considèrent l’Afrique comme étant absente de la cartographie des mentalités.
Finances News Hebdo : En dépit de la convergence des problèmes des deux rives de la Méditerranée, le projet UPM n’arrive pas encore à aboutir. Quelles sont les contraintes qui persistent ? Pouvons-nous dire que ce projet, à l’instar du processus de Barcelone, est voué à l’échec ?
Fathallah Sijilmassi : Le projet existe. Le projet marche. Simplement, il faut savoir de quoi on parle. Malheureusement, c'est une habitude dans notre région du monde, au sens large du terme, de penser que parce que nous avons créé une institution, tous les problèmes vont disparaître et que le lendemain les choses vont bien fonctionner. Il s’agit d’une vue de l’esprit : l’Union européenne a mis et continue à travailler 60 ans et plus après sa création. Ce que je veux dire par là, il faut qu’on soit dans une logique de construction, de progrès, une logique de lancer un processus. De ce point de vue-là, l’Union pour la Méditerranée est aujourd’hui une organisation qui fonctionne, marche, donne des résultats concrets sur le terrain et qui fait avancer le processus de coopération régional plus nécessaire que jamais. Certes, nous sommes loin de notre idéal et sommes conscients qu’il y a encore du chemin à faire. Mais je crois que la valeur travail est la plus essentielle dans ce processus et, surtout, ne pas se dire : «parce que nous ne sommes pas dans la situation idéale, nous devons tirer comme conclusion que c’est l’échec d’un processus et qu’il faut fermer la boutique». Je pense que si l’UPM n’existait pas aujourd’hui, il aurait fallu la créer, tellement il est évident qu’il y a besoin de faire dialoguer et de rapprocher les deux rives de la Méditerranée avec l’ensemble des pays et des sociétés qui sont concernés par les défis qui se posent. Donc, je suis heureux de vous dire que contrairement à ce que vous pensiez, l’UPM est un cadre utile de coopération régionale et j’en veux pour preuve que la deuxième édition du Forum régional de l’UPM aura lieu les 23 et 24 janvier 2017 à Barcelone.
F.N.H. : Aujourd’hui, on parle de transition en Atlantique. En tant que secrétaire général de l’UPM, quelle en est votre appréciation ?
F. S. : Je pense qu’il est très important de mener des réflexions sur ce monde changeant que nous voyons tous les jours et ne pas rester passifs face à ces évolutions qui ont lieu. Le fait d’avoir deux grandes institutions, des think tanks comme l’OCP Policy Center, et le German Marshall Fund of the United States, qui s’unissent et fédèrent autant de personnalités intéressantes, est une excellente initiative pour que les uns et les autres puissent échanger sur la gestion du changement. On n’est pas là uniquement pour diagnostiquer, mais gérer les évolutions au bénéfice des populations, notamment une jeunesse qui attend des réponses des institutions comme l’UPM et tant d’autres.
F.N.H. : D’après certaines discussions, le continent africain reste absent de la cartographie des mentalités malgré sa résilience face à la crise financière et le potentiel de croissance dont il regorge. Pourquoi à votre avis ?
F. S. : Je ne crois pas. Dans les différents débats auxquels j’ai pu assister, la référence à l’Afrique était forte et répétée. Je crois qu’aujourd’hui, il faut non seulement confirmer la place qu’a l’Afrique dans le concert des nations (naturellement d’ailleurs, parce que ce n’est pas un effort ou une complaisance, mais une réalité), mais il faut aller encore plus loin pour mettre en évidence les opportunités et les potentialités du continent.
F.N.H. : D’ailleurs, on ne cesse de répéter que l’Afrique est appelée à jouer le même rôle qu’a joué l’Asie durant le dernier quart du siècle…
F. S. : A mon avis, elle le joue déjà et notamment dans une vision EuropeMéditerranée-Afrique. Personnellement, je défends beaucoup cette vision qui ne déconnecte pas la Méditerranée de l’Afrique. Il y a des institutions qui peuvent avoir des spécificités régionales, telles l’UMA qui s’occupe du Maghreb, la Ligue arabe du monde arabe, l’UE de l’Europe…, mais la vision est celle de Europe-Méditerranée-Afrique. Ce qui veut dire qu’il n’y a pas de Méditerranée sans Afrique.