Entreposage : maillon décisif de la compétitivité logistique

Entreposage : maillon décisif de la compétitivité logistique

Sans plateformes logistiques capables d’absorber les flux, tout avantage maritime se dilue dans des files d’attente ou des détours coûteux.

L'enquête nationale conduite récemment par l’AMDL évalue le stock d’immobilier logistique à plus de 20 millions de m², répartis entre quelque 13.000 entrepôts. Pourtant, la surface moyenne plafonne à 1.360 m², et 60% des sites n’atteignent même pas 1.000 m², un format peu compatible avec les besoins industriels de masse. Résultat: les grands chargeurs, faute de bâtiments «grade A», se replient sur des solutions improvisées qui grèvent la productivité et la traçabilité.

Des pôles d’excellence émergent

À la pointe nord, Medhub poursuit l’extension de la zone logistique de Tanger Med : de nouveaux modules de 40.000 m² à hauteur libre de 11 m sont livrés en flux tendu pour l’automobile et le e-commerce. Dans le Grand Casablanca, une plateforme «nouvellegénération», primée lors des Moroccan Logistics Awards 2024, illustre la montée des standards techniques (sprinklers, racks automatisés, toiture photovoltaïque), mais demeure une exception.

De même, la Souss-Massa Free Zone et d’autres ZAI multiplient les lots mixtes usine-entrepôt pour rapprocher production et stockage. Mais dans ce paysage, la chaîne du froid représente l’angle mort le plus critique. La capacité d’entreposage frigorifique ne couvre qu’environ 4% des volumes périssables produits chaque année. Des initiatives apparaissent, à l’image du site Agricold (25.000 palettes) doté d’une centrale solaire couvrant 40% de ses besoins électriques.

Agadir accueillera également, dès fin 2025, un entrepôt frigorifique de nouvelle génération financé par un opérateur américain (9,3 millions de $). Pour alléger la pression routière, l’ONCF développe trois dry-ports reliés à Casablanca, Fès et Marrakech, et prévoit d’en créer d’autres le long des futurs axes ferrés vers Nador et Béni Mellal. Cette maille ferroviaire, financée en partie par la BEI et l’IFC, doit abaisser de 25% le coût moyen d’acheminement conteneurisé intérieur, tout en décongestionnant les ports.

Quelles pistes pour une stratégie d’entreposage «compétitive» ?

La dispersion actuelle interdit les économies d’échelle. La priorité est donc à des clusters logistiques intégrés (au moins 50 ha) à proximité immédiate des échangeurs autoroutiers-ferroviaires. Tanger Med a montré qu’un loyer compétitif (<45 DH/m²/mois) devient viable quand le taux d’occupation dépasse 85%.

Par ailleurs, le ministère du Transport et de la Logistique finalise un référentiel unique pour les nouveaux permis, assorti d’un bonus fiscal de 10% sur l’impôt sociétés pendant cinq ans pour les entrepôts certifiés A. Aussi, la généralisation du WMS cloud interopérable avec PortNet doit permettre de passer d’un suivi palette à palette à une traçabilité unité de vente, condition sine qua non pour l’e-commerce et le contrôle sanitaire.

Les ZAI récentes imposent une fibre redondante et pré-câblent la 5G indoor. Si ces leviers sont actionnés, le prix moyen du stockage pourrait reculer de 17%, tandis que le temps d’accès portuaire descendrait sous la barre des six heures pour 80% des expéditions industrielles. À cette condition seulement, le gisement de valeur créé par Tanger Med, Nador West Med et la future LGV sud se convertira en marges exportatrices et non en files d’attente. Un défi d’ingénierie… et de gouvernance.

 

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