L’embargo russe d’un an décrété sur les produits alimentaires occidentaux constitue une belle opportunité pour booster les exportations marocaines vers cette destination. Le Maroc devra déployer des actions concrètes et urgentes pour gagner des parts de marché. Augmenter la fréquence des lignes maritimes entre le Maroc et la Russie est une solution parmi d'autres pour accroître les tonnages exportés.
Outre la morosité de la conjoncture économique mondiale persistante, la menace terroriste de l’Etat islamique, l'offensive d'Israël sur Gaza ainsi que la propagation du virus Ebola, 2014 a également été marquée par une nouvelle crise qui risque de perturber davantage le contexte mondial.
C’est en effet le conflit russo-ukrainien qui monopolise aujourd’hui la scène internationale. Et pour cause, les retombées de la crise sur le commerce mondial sont conséquentes. Les relations commerciales entre la Russie et l’Union européenne d’une part ainsi que les Etats-Unis d’autre part sont empreintes d’incertitudes. Le conflit a débouché sur l’adoption par ces derniers de sanctions contre la Russie qui a, à son tour, riposte en décrétant l’embargo d’un an sur les produits alimentaires occidentaux. Une perte considérable pour l’Europe estimée à environ 12 milliards d’euros étant donné que 46% des importations russes proviennent de l’UE. Cette nouvelle donne ouvre une brèche pour la conquête de ce marché. L’embargo russe est donc une opportunité à saisir par le Maroc pour booster ses exportations. L’occasion aussi d’améliorer la situation de son commerce extérieur qui a enregistré au terme du premier semestre 2014 une légère amélioration du déficit commercial à 116,7 Mds de DH.
Des échanges commerciaux trop faibles
Le constat est clair : les échanges commerciaux entre le Maroc et la Russie demeurent faibles et ce malgré les actions déployées de part et d’autre par les différents organismes, aussi nombreux soient-ils, dédiés à l’export. En chiffres, les exportations vers la Russie s’établissent à 2 Mds de DH, soit moins de 1% du volume total, tandis que les importations s’élèvent à 16 Mds de DH, soit environ 5%. Selon Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des relations internationales (IMRI) «Au niveau des exportations, la gamme des produits fabriqués au Maroc est très limitée et manque de compétitivité. Quant aux importations, c’est surtout le pétrole qui est le plus introduit ainsi que quelques biens d’équipement». Incontestablement, la compétitivité des entreprises marocaines et leur capacité à exporter vers le marché russe des produits à haute valeur ajoutée reste la solution idoine pour atténuer le déficit de la balance commerciale du Maroc. Preuve en est, le Maroc exporte vers ce marché essentiellement des fruits et des légumes soit des produits à faible valeur ajoutée.
L’agrume marocain prisé par les Russes
La Russie est le premier client du Maroc pour les agrumes. C’est dans les années 60 que l’OCE les a introduit sur ce marché. Et il s’avère qu’ils sont appréciés par le consommateur russe. Il est en de même, mais dans une moindre mesure, des légumes frais tels que les tomates. Khalid Bounajma, Secrétaire général de l’Association des conditionneurs d’agrumes du Maroc (Ascam), nous a confirmé que le marché russe est la principale destination des agrumes marocains.
«Le volume des agrumes exporté, principalement de la clémentine, est passé de 120.000 tonnes en 2012 à 290.000 tonnes en 2013. Nous avons suralimenté le marché avec une offre supérieure à la demande», précise-t-il. A propos de l’impact de l’embargo russe sur le secteur, Khalid Bounajma regrette qu’il n’y ait toujours pas de visibilité. Alors qu’attendent les pouvoirs publics pour dynamiser les exportations? D’après les professionnels, aucune action n’a été déployée jusqu’à présent. A ce rythme, le Maroc risque d’être dépassé par les autres pays aussi en compétition notamment la Turquie, l’Argentine, l’Egypte, le Chili… Ceci étant rappelé, il est vrai que la situation de tension entre la Russie et l’UE offre de belles opportunités pour le Maroc. Mais, encore faut-il que les produits marocains répondent aux exigences du marché et que le gouvernement redouble d’efforts en matière de promotion à l’export. Plusieurs mesures sont donc à déployer pour continuer à être dans la compétition et pouvoir ainsi grignoter des parts de marché surtout dans les légumes et les fruits qui ont des qualités gustatives appréciées dans le monde. Jawad Kerdoudi évoque également le problème logistique : «les lignes maritimes entre le Maroc et la Russie ne sont pas très nombreuses, d’où la nécessité d’y remédier si l’on veut augmenter sensiblement les tonnages exportés», conclut-il.
L.B