Communales et régionales 2015 : Les enjeux économiques s’invitent aux élections

Communales et régionales 2015 : Les enjeux économiques s’invitent aux élections

Elections

C’est un véritable test pour la majorité gouvernementale actuelle et le PJD. Effet de proximité oblige, les partis politiques tablent sur les maux des citoyens au quotidien pour séduire. Les candidats font appel aux réseaux sociaux pour plaire, mais le porte-à-porte a toujours la cote.

Dans certains pays, le maire d’une ville ou le président d’une commune ou d’une région est plus populaire que certains ministres. Son pouvoir et sa notoriété dépassent le niveau local pour prendre une connotation nationale ou internationale. L’expérience de la gestion locale de certaines villes ou communes est un cas d’exemple.

Est-ce le cas au Maroc ?

Les enjeux économiques sont les questions les plus posées lors des élections communales et régionales 2015. C’est l’argument- phare de toutes les formations politiques en lice. Sur le plan politique, ces élections représentent un véritable test pour la majorité gouvernementale actuelle, surtout le PJD, en prélude des élections législatives de 2017.

«L’effet de proximité est le principal facteur qui distingue les communales des législatives.

Les élus doivent capitaliser sur tout ce qui peut toucher les citoyens dans leur quotidien, notamment l’accès aux services publics, l’emploi, le transport, l’environnement, etc.», affirme le politologue Mohammed Belmlih.

Cette échéance électorale se déroule dans des circonstances

un peu particulières. Le spectre de l’absentéisme pèse toujours sur ce scrutin. Le désintérêt des citoyens pour la politique est de plus en plus croissant. «Le phénomène est quasi général, on l’a vu dans les élections européennes et dans d’autres lieux. Le Maroc ne peut échapper à la règle», souligne Belmlih. Ces élections devraient être le reflet de l’expérience du scrutin de liste et aussi de l’unicité de la ville.

Beaucoup d’encre a coulé sur le sujet. Le scrutin de liste, censé offrir beaucoup de poids aux partis politiques, n’a pas donné l’effet escompté. Tous les conseils de ville du pays sont composés de membres issus de plusieurs formations. Pour gouverner, le président doit composer avec d’autres formations; sa majorité est fragile. Dans certaines villes comme Casablanca, le président doit séduire une partie de l’opposition pour faire passer des projets, et ce malgré le refus de sa majorité. Mais il se pose une question : un parti politique peut-il imposer un programme ou du moins sa philosophie dans une ville donnée ?

Chaque commune ou ville a ses propres spécificités et ses propres contraintes, comme l’a laissé entendre Abdelali Hamieddine, membre du Secrétariat général du PJD :

«Chaque élu doit avoir sa propre vision, selon l’état des lieux de sa circonscription et en tenant compte, bien entendu, de l’esprit du parti».

La nouvelle Charte communale confie beaucoup de pouvoir au président d’arrondissement pour lui donner plus de marge de manoeuvre, tout en réduisant la tutelle de l’intérieur et des autres départements.

Mais dans les faits, c’est le contraire qui prévaut. Le wali ou le gouverneur a plusieurs cartes pour contrer l’action du président ou du conseil. Le fait d'être l’ordonnateur principal des dépenses lui permet de bloquer parfois des projets ou des décisions.

«Il y a parfois une mauvaise interprétation des textes quant aux attributions du wali ou du maire, surtout lorsque ces attributions sont croisées. Il est primordial que le travail de l’un soit complémentaire de l’autre», a expliqué Fouad Adil, conseiller au conseil de la ville de Casablanca.

Un autre fait saillant dans la gestion communale est que les élus ne disposent que d’une intervention limitée dans le cadre du Schéma directeur ou dans les grands projets stratégiques. «C’est l’Agence urbaine qui étudie et élabore le projet, et c’est le ministère de l’Intérieur qui le valide après la réalisation des plans d’aménagement. Les élus n’ont aucun effet sur ces projets, alors qu’ils touchent de près les citoyens», affirme Adil.

Cette omniprésence de la tutelle est dictée par des considérations techniques, administratives et aussi de contrôle.

«Le niveau de maturité dans la gestion communale n’a pas encore atteint le degré escompté. Malgré les efforts consentis, la bonne gouvernance n’est pas bien ancrée dans toutes les communes. Des dérapages existent, et certains élus ont des objectifs purement personnels. Le contrôle à outrance de l’administration est toujours nécessaire», indique Mohamed Amrani, professeur universitaire.

Quant à l’unicité de la ville, les avis divergent. L’un des avantages de ce système est qu’il a permis une répartition égale des dépenses locales dans tout le territoire de la ville. Auparavant, le centre était mieux loti du fait du niveau élevé des recettes de ses communes, alors que les quartiers périphériques étaient marginalisés faute de moyens. Mais ce constat est critiqué par d’autres élus. «L’unicité de la ville donne de larges pouvoirs au président, qui peut, pour des raisons électorales, soutenir les communes qui lui sont favorables et marginaliser celles qui lui sont hostiles», souligne Amrani.

Malgré les difficultés liées à la gouvernance de la ville, il est clair que le système a donné un certain dynamisme et une meilleure visibilité des projets. Mais c’est dans le monde rural que les circonscriptions n’arrivent pas à se positionner comme acteur majeur pour le développement local. Ces entités n’ont pas d’autonomie financière. Elles restent donc à la merci des subventions de la tutelle. Les budgets alloués arrivent à peine à couvrir les charges d’exploitation.

Charaf Jaidani

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