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Droit de grève: la promulgation d’une loi-cadre devient une urgence

Droit de grève: la promulgation d’une loi-cadre devient une urgence

La grogne des enseignants devrait inciter le gouvernement à accélérer le projet de loi.

 

Par C.Jaidani

Le droit de grève est garanti par la Constitution. Le texte suprême stipule toutefois qu’«une loi réglementaire en fixe les modalités et les conditions d’exercice». Depuis l’indépendance, les gouvernements se sont succédé, mais aucun n’a osé mettre un projet de loi dédié sur le surcuit législatif. En 2019, l’Exécutif, les syndicats et le patronat avaient trouvé un terrain d’entente sur ce sujet sans que cela ne soit concrétisé par la promulgation d’une loi. Actuellement, avec la grève des enseignants et le blocage que connaît le secteur, il devient urgent de trouver un cadre juridique pour bien organiser les mouvements sociaux.

«75% des grèves observées au Maroc ont pour origine le nonrespect de la loi et l’absence de dialogue. L’Exécutif pratique la fuite en avant. Il hésite à prendre des décisions courageuses bien qu’il dispose d’une majorité confortable pour passer facilement le projet de loicadre sur la grève. Le blocage du secteur de l’éducation doit le pousser à tirer les enseignements qui s’imposent», souligne Houcine Yamani, secrétaire général d’un syndicat affilié à la Confédération démocratique du travail (CDT). Rappelons que le protocole d’accord du 22 avril 2022 consacre l’institutionnalisation du dialogue social. Il s’agit d’un pack comprenant la révision des salaires, le code du travail ainsi que l’établissement d’une loicadre sur le droit de grève.

Sur ce dernier point, les syndicats avancent quelques réserves sur ce texte. «Selon les normes du projet de loi sur la grève, il est impossible d’organiser un mouvement social car il existe beaucoup de conditions. Par exemple, il faut dresser la liste des grévistes avec leur CIN et recueillir au moins la signature de 70% des salariés. Il faut aussi donner un préavis afin que le patron et les autorités puissent prendre leurs dispositions. Pour des raisons de sécurité et d’ordre public, les autorités peuvent interdire le mot d’ordre de grève. Ces contraintes sont contraires aux conventions internationales signées par le Maroc, et aussi au principe des droits de l’Homme», indique Yamani.

Pour sa part, le patronat plaide, depuis de nombreuses années, pour la refonte du texte de loi régissant le droit de grève. Il prône une législation encadrant la relation entre employeurs et employés. Les mouvements sociaux «sauvages» portent atteinte à l’entreprise et, par ricochet, à l’économie nationale. La CGEM est consciente que le texte doit préserver les intérêts de tous les acteurs, et ce pour l’intérêt du pays. «Nous sommes d’accord sur environ 70% de la mouture du texte. Nous avons des réserves sur certains aspects. Le gouvernement veut réduire les divergences et chercher un compromis, car c’est une loi très sensible. Nous ne pourrons nous prononcer sur le projet qu’une fois soumis au Parlement. Le patronat et les syndicats vont réagir dans le cadre de la Chambre des conseillers. Chacun devrait apporter les amendements qu’il juge nécessaires», affirme Hicham Zouanat, président de la Commission sociale de la CGEM. Pour le moment, les discussions sur ce sujet sont en stand-by, le temps de gérer le conflit avec les enseignants.

«Si cette loi avait été promulguée il y a quelques années, le gouvernement aurait déjà un cadre juridique pour justifier les retenues sur salaire des enseignants, se prononcer sur la création des coordinations, sur l’organisation des grèves, leur durée… Il faut prendre en considération que dans la plupart des secteurs à caractère vital, il y a un service minimum. Mais pour les enseignants, le mot d’ordre est général et l’arrêt des cours dans les écoles a trop duré. Le rattrapage est devenu compliqué et le coût social très lourd. Il est donc essentiel de bien encadrer le droit de grève par un cadre juridique adéquat», explique Zouanat.

Selon une source du département de l’Emploi, le projet de loi sur la grève est programmé pour l’actuelle législature et sera abordé à partir du début de l’année 2024. Comme c’est une loi organique issue de la Constitution, elle doit être déposée à la Chambre des représentants, et passer ensuite à la Chambre des conseillers, comme la Loi des Finances. Mais normalement, les lois sociales passent directement par la deuxième Chambre. 

 

 

 

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