Avec une note de 37 sur 100, le Royaume recule d’un point par rapport à 2023 et se classe désormais au 99ème rang mondial de l’Indice de perception de la corruption (IPC). Un classement qui traduit l’absence de progrès significatifs, malgré les engagements gouvernementaux. Transparency Maroc dénonce une situation préoccupante, aggravée par le retrait de certaines réformes essentielles et le manque d’initiatives concrètes pour endiguer ce fléau.
Par C. Jaidani
Transparency Maroc a dévoilé le 11 février à Rabat les résultats de l'Indice de perception de la corruption (IPC) au titre de l'année 2024. Le Royaume a obtenu une note de 37 sur un total de 100, soit un recul d'un point comparativement à 2023. Ce score le place au 99ème rang mondial, alors qu'il était à la 97ème une année auparavant, perdant ainsi 26 places par rapport à 2018. Il se classe en deçà de la moyenne mondiale de l'IPC qui est de 43.
Par région, cet indice a atteint en Europe 64, 44 en Asie Pacifique, 42 en Amérique, 38 dans la région Mena et 33 en Afrique subsaharienne. Par pays, le meilleur score revient au Danemark avec 90. Il est suivi par la Finlande avec 88 points, la Nouvelle Zélande (85) et Singapour (84). Les trois pires scores sont attribués respectivement au Sud Soudan (8), Somalie (9) et Venezuela (10). Dans le monde arabe, les Emirats Arabes Unis sont en pole position avec 68 points, pointant à la 23ème place mondiale. Il sont suivis par le Qatar, l'Arabie Saoudite et Oman qui sont respectivement à la 25ème, 38ème et 50ème places mondiales.
L'Algérie occupe le 107ème rang, l'Egypte et la Mauritanie exaequo à la 130ème et l'Irak à la 140è place. «Nous nous attendions au recul de l'IPC au Maroc. La corruption devient endémique; sa progression a commencé depuis 2018. Le gouvernement s'est engagé à faire de la lutte contre le phénomène l'une de ses priorités. Mais malheureusement rien n'a été fait. Même les dispositions anti-corruption prévues par la Constitution n'ont pas été mises en œuvre. Bien au contraire, certaines dispositions ne peuvent que l'encourager, comme le retrait du projet de loi sur l'enrichissement illicite ou celui de l'exploitation du domaine public, et ce contrairement à la convention anti-corruption ratifiée par le Maroc», déplore Ahmed Bernoussi, secrétaire général par intérim de Transparency Maroc.
«Il existe également de nombreux acquis qui ont été écartés, comme la révision du code de la procédure pénale dans lequel il est stipulé que la société civile et les citoyens ne peuvent pas porter plainte contre les personnes ayant une responsabilité publique soupçonnées de corruption. Cette initiative a restreint également les attributions du pouvoir judiciaire, car le procureur du Roi ne peut engager une investigation après le dépôt d’une plainte que s'il reçoit l'aval du président du ministère public ou suite à un rapport d'une institution publique comme le Conseil de la concurrence, l'Instance nationale de la probité et de lutte contre la corruption (INPLCC) ou les inspections générales des ministères. Il est donc apparent qu'on limite les voies de recours pour lutter contre la corruption», indique Bernoussi.
Les responsables de Transparency Maroc ont indiqué lors de la présentation du rapport sur l’IPC qu’ils ont invité, à maintes reprises, le gouvernement à réunir la Commission nationale de lutte contre la corruption en vue de faire une évaluation de l'état d'avancement de la stratégie dédiée, mais en vain. Ils rappellent que cette commission ne s'est réunie que deux fois en 8 ans, alors qu'il est stipulé juridiquement qu'elle doit le faire deux fois par an. Azzedine Akesbi, membre de Transparency Maroc, a noté dans son intervention que «le régime politique d’un pays a un effet déterminant sur l’IPC. Les pays autoritaires, au nombre de 59 Etats, ont une note moyenne de 29.
En revanche, les pays qui ont une démocratie avancée, comme ceux de la Scandinavie, ont un score moyen de 73. Ils sont au total 24 dans le monde. A contrario, 47 pays ont une démocratie défectueuse, obtenant un score moyen de 37. La catégorie à régime politique hybride rassemble 37 Etats, avec une note moyenne de 59». Akesbi a précisé par ailleurs que l’IPC est également liée à la présence d’une société civile forte, libre dans ses actions, ne subissant aucune contrainte.