Circulaire 19-G, traitement des actifs immobiliers, risques systémiques…, le cadre réglementaire du secteur bancaire est en constante mutation. Tour d'horizon.
Par A.H
Le secteur bancaire reprend ses forces après une période d'inflation réglementaire caractérisée, entre autres, par les milliards de dirhams engloutis dans la première application de la norme IFRS9 et dont le gros des impacts est désormais digéré.
L’implémentation de cette norme a induit, rappelons-le, un impact négatif de plus de 13 milliards de dirhams sur les capitaux propres comptables du secteur bancaire. Son lissage va se poursuivre jusqu'en 2022, et une période de transition semble actuellement actée et mise à profit pour un retour en force des banques sur le marché des capitaux, tendance qui devrait se poursuivre en 2020, profitant des taux bas. Cela ne soulage pas pour autant le calendrier réglementaire chargé qui les attend.
La réforme de la classification des créances, plus connue sous le nom de circulaire 19/G, est l'un des grands sujets pour lesquels se prépare le secteur. Bank Al-Maghrib, souhaitant différer son entrée en vigueur pour éviter les contraintes potentielles d'une mise en œuvre simultanée avec IFRS9, en a profité pour mener les consultations avec la profession bancaire.
Cette réforme a pour objectif de renforcer la solidité des banques et de promouvoir des règles saines en matière de gestion du risque de crédit, en convergence avec les normes internationales.
Concrètement, BAM souhaite l'élargissement de la notion de défaut en intégrant de nouveaux critères, notamment les dépassements persistants, l'introduction d’une classe intermédiaire de risque dite «créances sensibles» et la définition des critères qualitatifs et quantitatifs minimums de classification des créances parmi cette classe de risque ainsi que les modalités de constitution des provisions.
Troisièmement, Bank Al-Maghrib souhaite une revue des dispositions liées aux créances restructurées portant notamment sur la définition des restructurations, la période d’observation et le traitement comptable. La Banque centrale a retenu une entrée en vigueur en 2 étapes pour cette réforme : fin 2022 pour les dispositions régissant les créances en souffrance et fin 2024 pour les dispositions régissant les créances sensibles.
Libérer les bilans des actifs immobiliers
Les banques ont, semble-t-il, abusé des techniques de dations en paiement et ventes en réméré pour éteindre les dettes bancaires du secteur immobilier. Ce qui leur fait porter un risque de liquidité. Risque que Bank Al-Maghrib souhaite limiter en l'encadrant.
Un premier projet de texte réglementaire a été élaboré et a fait l’objet d’une première consultation auprès des acteurs bancaires. Sur la base des conclusions de la consultation, Bank Al-Maghrib a engagé des travaux d’ajustement du cadre proposé, tout en menant une étude d’impact des règles retenues. La réforme s’appliquera en particulier aux anciens stocks d’actifs immobiliers acquis en dations par les banques, auprès de promoteurs en difficulté.
On parle d'un stock aux alentours de 18 milliards de DH, ce qui représente 1,5% du total des actifs des banques. Cette réforme, tout comme l'est celle de l’IFRS9, se fera de manière progressive via des dispositions transitoires. L'idée est d'appliquer des ajustements sur 5 ans, tout en étant plus strict sur les nouveaux flux de dations. Aérer les bilans bancaires et les irriguer de liquidités est un sujet de place pour les 5 années à venir.
Ces sujets réglementaires doivent être traités en parallèle des problématiques de conformité imposées souvent de l'extérieur. La loi FATCA en est un exemple (loi extraterritoriale américaine contre l’évasion fiscale). La tendance est lourde et le «KYC», qui consiste en une meilleure connaissance du client, devient un enjeu majeur pour les institutions financières. Les différentes amnisties et régularisations fiscales programmées cette année par l'Etat représentent des opportunités pour les banques de renflouer leurs dépôts, mais elles augmentent sensiblement le risque de non-conformité et le devoir de vigilance des banques. ◆