Nezha Hayat, présidente de l'AMMC et Karim Hajji, DG de la Bourse de Casablanca. Organisateurs et régulateurs ont été unanimes à reconnaître qu’il y a beaucoup de travail à faire en Afrique pour une intégration réussie.
Le faible taux d’intégration pénalise fortement l’Afrique.
Les principales recommandations issues du quatrième Meeting de l’information financière.
Le continent africain est très faiblement intégré. Et la modeste financiarisation de l’Afrique ne lui permet pas, par conséquent, de financer son développement.
En cela, il semble urgent de canaliser l’épargne afin de pouvoir la libérer dans les économies locales. D’où la nécessité d’aller vers plus de convergence, surtout face à des marchés financiers africains limités et fragmentés. Ce constat a été partagé à l’unanimité par les différents professionnels qui ont pris part aux travaux du 4ème Meeting sur l’information financière qui ont eu lieu vendredi dernier à Casablanca.
Organisé par la Bourse de Casablanca, Maroclear et Finances News Hebdo, cette manifestation, à laquelle ont participé plusieurs personnalités du public, des opérateurs économiques, des experts du marché financier... a abordé un sujet d’actualité : «Intégration économique et convergence des marchés financiers en Afrique». Une actualité où le Maroc joue un rôle central, eu égard notamment aux actions initiées depuis plusieurs années en Afrique par le Roi Mohammed VI, qui a érigé l’intégration sud-sud en l’une de ses principales priorités. En raison, également, du processus en cours d’adhésion du Maroc à la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
L’objectif de cette édition était donc d’échanger autour de la convergence des marchés financiers en tant que levier pouvant permettre une meilleure intégration économique africaine.
Dans son allocution d’ouverture, Nezha Hayat, présidente de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), a d’emblée mis en exergue un défi majeur : «Le chemin de l’intégration économique est long», a-t-elle dit, soulignant qu’il est, entre autres, tributaire d’une véritable volonté politique, d’un cadre réglementaire harmonisé, mais aussi de l’efficience des infrastructures de marché. La tâche est d’autant plus délicate que le taux d’intégration n’est que de 4% en Afrique (vs 30% en Europe et 25% en Asie), indique de son côté, Karim Hajji, Directeur général de la Bourse de Casablanca. La convergence des marchés financiers est donc un processus qui implique une coopération économique renforcée pour créer des blocs homogènes, cohérents et qui ont du poids. Néanmoins, l’intégration des marchés de capitaux est un moyen pour réussir ce tour de force, «car elle permettra de déplacer les capitaux des pays qui ont un excédent structurel - principalement l’Afrique centrale- vers les pays ayant des besoins nets de financement», ajoute Hajji.
En tout cas, devant l’urgence de la situation et face aux énormes besoins du continent, les opérateurs financiers marocains ont pris les devants, s’affranchissant du temps politique forcément long lorsqu’il s’agit de construire des ensembles homogènes et intégrés.
L’AMMC, la Bourse et Maroclear en orbite
Des institutions comme l’AMMC, la Bourse de Casablanca ou encore Maroclear ont ainsi une stratégie régionale bien circonscrite.
L’AMMC, confie Nezha Hayat, déploie une approche régionale différenciée, compte tenu des degrés de maturité différents des places financières africaines.
De son côté, la Bourse de Casablanca, qui vient de prendre la présidence de l’Association des Bourses africaines, travaille actuellement, aux côtés de la Banque africaine de développement, sur l’interconnexion de 6 marchés boursiers africains, à travers une plateforme commune de traitement des valeurs.
Pour sa part, Maroclear a depuis longtemps fait de la coopération sud-sud l’un des axes de sa stratégie de développement. A ce titre, le dépositaire central, qui s’est hissé aux standards internationaux et a signé des mémorandums avec plusieurs pays en Afrique, travaille de plus en plus en synergie avec d’autres institutions locales, comme la Bourse de Casablanca, pour proposer des packages adaptés à chaque pays africain.
Tous ces acteurs se font accompagner par l’Office des changes, qui joue un rôle très important dans ce processus. La possibilité donnée aux OPCVM d’investir 10% de leur actif net en Afrique, mais également aux régimes de retraite (5% de leurs réserves) s’inscrit dans cette veine. «Nous étudions la possibilité d’élargir cette autorisation aux Organismes de placement collectif en capital», précise Hassan Boulaknadal, DG de l’Office des changes.
Toujours est-il que l’élément central pour réussir la convergence des marchés financiers reste, évidemment, les infrastructures technologiques. «En cela, le smart contract peut être très utile pour la mise en place de cet écosystème à moindre coût, d’autant qu’il permet d’automatiser toutes les tâches fastidieuses», fait ainsi savoir Lamya Mrani Alaoui, responsable des services de pricing chez Refinitiv. ■
Les principales recommandations
Des débats, il est ressorti un certain nombre de recommandations visant à permettre une meilleure intégration et convergence des marchés financiers africains. Elles seront consignées dans un Livre Blanc :
• Harmonisation réglementaire.
• Harmonisation des pratiques de marché.
• Accessibilité des données.
• Meilleure pratique de la communication financière afin qu’elle soit adaptée
aux besoins des investisseurs étrangers.
• Communiquer en anglais, au profit des investisseurs étrangers.
• Amélioration de la gouvernance des marchés financiers.
• Favoriser l’interconnectivité des marchés.
• Harmonisation des technologies (systèmes informatiques notamment).
• Penser à faire profiter la Chambre de compensation du Maroc à d’autres pays.
• Créer un comité de veille pour voir où en sont nos concurrents, ce que nous voulons et savoir à quelle vitesse le Maroc souhaite aller vers le reste du continent.
• Inciter les groupes marocains ayant des filiales en Afrique à la double cotation.
Par D. William