L’assurance Takaful, qui devrait obligatoirement accompagner les futurs financements participatifs, irrite plusieurs opérateurs qui attendent de pied ferme l’adoption de ses textes. La mise en place de financements participatifs, notamment Mourabaha et Ijara, suppose la disponibilité de produits d’assurance conformes à la Sharia. A ce jour, aucun produit de ce genre n’existe sur le marché. Même les entreprises d’assurances ne sont pas encore agréées pour commercialiser le produit Takaful.
Ceci dit, le Takaful est essentiel pour l’octroi de crédits, en particulier les prêts immobiliers auxquels sont systématiquement adossées les couvertures d’assurance. L’idée de recourir dans un premier temps à l’assurance conventionnelle en attendant que le dispositif conforme à la Charia se mette en place, peut être abandonnée et ne fait pas l’unanimité sur le marché.
Pour sa part, l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) va entamer prochainement des discussions avec la profession sur les textes d’application, avant de les soumettre pour avis de conformité au Conseil supérieur des ouléma. Par ailleurs, dans une compagnie Takaful, les activités vie et non-vie doivent être séparées en deux entités distinctes, contrairement aux assurances conventionnelles. Et pour un opérateur qui décide de se lancer dans les deux segments, cela suppose de doubler les investissements, puisque le capital de départ pour une compagnie Takaful est fixé à 50 millions de DH. Tout porte à croire donc que les entreprises qui ont manifesté un intérêt pour le Takaful, devraient s’orienter vers l’activité vie dans un premier temps.
Marché des capitaux : ça traîne
Au-delà de l’assurance Takaful qui n’est pas encore bouclée, les banques participatives auront besoin également d’un marché des capitaux participatifs pour financer leur activité et leur liquidité. Ce chantier suscite beaucoup d’inquiétudes parce qu’il n’avance pas au rythme souhaité.
L’opération d’émission d’un sukuk souverain, initialement annoncée pour la fin du premier semestre 2017, devrait être décalée pour la rentrée, selon les anticipations des professionnels. Même si les sukuks donneront un rôle vital pour les établissements en leur permettant notamment de constituer un matelas de liquidité, ils ne seront pas incontournables en démarrage d’activité. En effet, selon les spécialistes, les fonds propres de démarrage des banques et les dépôts de la clientèle devraient être suffisants pour lancer la machine.
Les contrats types retardent la marche
Pour compléter le puzzle de l’écosystème de la finance participative, en plus du marché des capitaux et de l’assurance participative à mettre en place, il s’agit de finaliser le chantier des contrats types.
En effet, la mise en place de toute opération de financement nécessite la signature de contrats entre la banque et son client. Mais, contrairement à la pratique bancaire classique, les contrats des produits participatifs ne peuvent pas être élaborés par la banque elle-même du fait qu’ils doivent être conformes aux modèles approuvés par la Commission Sharia de la finance participative. Or, à ce jour, ces modèles sont toujours en cours d’élaboration par les services de la Banque centrale avant qu’ils ne soient soumis pour avis à ladite commission. À ce stade donc, les banques agréées sont condamnées à attendre, car la circulaire de la Banque centrale précise bien qu’«il n’est pas permis de présenter les contrats des produits participatifs, la réalisation des opérations et la prise des garanties les concernant qu’après avis de la Commission Sharia de la finance participative».
En définitive, malgré l’ouverture des premières agences, les futurs clients ou autres curieux ne peuvent bénéficier, pour l’heure, d’aucune prestation bancaire. Le rôle des banques à présent se limite uniquement au conseil en vulgarisant la finance participative et familiarisant les clients avec cette nouvelle activité. Sans plus. ■
Y.S