Délais de paiement : 11% seulement des entreprises payent à temps leurs fournisseurs

Délais de paiement : 11% seulement des entreprises payent à temps leurs fournisseurs

 

- Depuis 2010, les délais de paiement ont été multipliés par trois

- Le patronat tire la sonnette d’alarme

- Les délais de paiement sont un paramètre-clef pour le rating des entreprises auprès des banques.

 

 

L’allongement continu des délais de paiement constitue une source d’inquiétude nationale. Ce fléau est la première source de mortalité des entreprises au Maroc.

En effet, 40% des défaillances de sociétés résultent des délais de paiement, qui dépassent parfois les neuf mois pour les TPE.

Rappelons que 8.000 entreprises ont mis la clef sous la porte en 2017, ce qui place le Maroc au même niveau que des économies beaucoup plus importantes, pour ne citer que la Chine.

Face à l’Allemagne où 64% des entreprises respectent les délais de paiement légaux, le Maroc fait pâle figure, puisque seulement 11% des entreprises règlent leurs fournisseurs à temps.

Mesurant l’importance de ce sujet crucial, d’autant plus que les crédits interentreprises représentent 35% du PIB, le Groupe Attijariwafa bank a organisé récemment un événement majeur sous le thème : «Ecosystème donneurs d’ordres-fournisseurs : des modèles pragmatiques face aux délais de paiement».

Cette manifestation, rehaussée par la présence de Moulay Hafid Elalamy, ministre de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique, était l’occasion pour établir un diagnostic, apprécier l’apport de la loi 32-10 relative aux délais de paiement publiée en 2011, tout en édictant une série de recommandations à même de remédier à cette problématique qui donne le tournis aux banquiers et aux dirigeants d’entreprises.

 

Une norme aux fâcheuses conséquences

 

«La problématique des délais de paiement se pose partout dans le monde. Les causes culturelles sont prégnantes, car les difficultés s’exacerbent davantage dans les pays du Sud», souligne Mohamed El Kettani, PDG du groupe bancaire panafricain.

Moulay Hafid Elalamy a appelé tous les acteurs, public et privé, à se mobiliser contre une norme inadmissible, qui constitue un péril pour la vitalité de l’économie nationale. Le manque de liquidité des entreprises, causé par l’allongement des délais de paiement, est un handicap pour l’acte d’investir.

«Même si l’Etat a consenti des efforts pour l’apurement des arriérés de TVA dus aux entreprises privées, des efforts restent encore à faire pour réduire les délais de paiement inhérents aux marchés publics», concède le ministre, qui déplore le fait pour une entreprise ou l’Etat de trouver normal le paiement d’une facture avec un retard important. Or, les délais de paiement constituent un paramètre-clef pour le rating des entreprises auprès des banques, sachant que celui-ci détermine le coût, voire l’accès au crédit.

Par ailleurs, dans l’optique de préserver la trésorerie des entreprises, une convention a été signée, en janvier 2018, entre le ministère de l’Economie et des Finances, les banques et les opérateurs économiques marocains afin de mettre en place un système de rachat des créances de TVA sur l’Etat. Du reste, le stock des arriérés de TVA représente près de 30 Mds de DH.

 

Qu’est-ce qui bloque ?

 

Les lois 32-10 et 49-15 portant toutes sur les délais de paiement n’ont pas empêché l’aggravation de la situation. Depuis 2010, les délais de paiement ont été multipliés par trois, selon Hicham Bensaid Alaoui, directeur des risques, de l'information, des sinistres et du recouvrement d'Euler Hermes Acmar.

A en croire Abdelkader Boukhriss, président de la Commission fiscalité de la CGEM, l’efficacité de ces mesures juridiques est compromise par le manque d’application des dahirs et des décrets d’application. Par ailleurs, pour ce qui est de l’allongement des délais de paiement dans les marchés publics, Mohamed El Kettani estime que la solution est dans la digitalisation, qui accroît la transparence.

Dans le même ordre d’idées, certains chefs d’entreprises ont exhorté les institutions financières, notamment les banques, à sanctionner plus sévèrement les mauvais payeurs.

Notons qu’en marge de l’événement, trois protocoles d’accord ont été signés entre Attijariwafa bank d’une part, et Cosumar, la SFI et Maroc PME d’autre part en lien avec le développement des écosystèmes.

 


L’expérience du club des bons payeurs

C’est non sans fierté que Miriem Bensalah-Chaqroun, présidente de la CGEM, a rappelé que le patronat marocain est l’initiateur de la Charte des bons payeurs. En effet, le club des bons payeurs regroupe près de 150 grandes entreprises, soucieuses du paiement dans les délais impartis. «Grâce au paiement à temps, les entreprises de notre club tirent profit des bons prix appliqués par leurs fournisseurs», révèle-t-elle. Dans le même temps, l’on constate que l’allongement des délais de paiement fausse le jeu des prix appliqués à l’Etat et aux administrations publiques. «Certaines entreprises n’hésitent pas à gonfler les prix appliqués à l’Etat afin de minimiser les conséquences fâcheuses inhérentes à l’allongement des délais de paiement des marchés publics», déplore Moulay Hafid Elalamy.


 

M. Diao

 

 

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