- L’installation de la Commission nationale de la commande publique remet en selle les enjeux liés à la gouvernance des achats publics.
- L’institution est dotée de pouvoir décisionnel
- Les investissements publics représentent 17,4% du PIB
Il a fallu près de 2 années après l’entrée en vigueur du décret numéro 2-14-867 relatif à la Commission nationale de la commande publique (CNCP) pour que l’installation officielle de celle-ci soit présidée par le Chef de gouvernement Saad Eddine El Othmani.
Le champ d’action de cette nouvelle entité autonome englobe les marchés publics, les contrats de partenariat public-privé et de gestion déléguée. Elle émerge dans un contexte en proie à l’affirmation constante des sacro-saints principes de la commande publique, en l’occurrence la liberté d'accès, l’égalité de traitement des concurrents, la garantie des droits des concurrents et de transparence dans les choix de l'administration publique pour l'attribution.
Si certains hommes de droit voient d’un bon œil cette institution, maître Abdelghani Nkaira, avocat au Barreau de Casablanca, spécialisé dans les contentieux des marchés publics, ne manque pas de rappeler le contexte actuel marqué par l’inflation des litiges liés aux achats publics devant les tribunaux.
A l’évidence, cette situation n’est ni dans l’intérêt de l’Etat encore moins des entreprises marocaines, notamment les TPE et PME fragilisées par des délais de paiement qui s’allongent en dépit des dispositifs juridiques mis en place.
L’autre fait notoire qu’il convient de mettre en exergue, est l’accroissement continu des investissements publics, facteurs de croissance. Au regard des chiffres officiels, ceux-ci sont passés de 160 Mds de DH en 2011 à 195 Mds de DH en 2018, ce qui revient à 17,4% du PIB.
En phase avec les nouvelles exigences économiques
Les objectifs économiques sont clairement consacrés par le décret n° 2-12-349 relatif aux marchés publics publié en avril 2013 au Bulletin officiel. A ce titre, il y a lieu de citer la préférence nationale et l’obligation pour l’Etat et certaines de ses entités de réserver 20% des marchés à la PME de moins de 200 salariés.
La CNCP, dont l’organisation marque une avancée majeure avec la représentation du secteur privé au niveau de l’organe délibératif (trois membres issus des secteurs des bâtiments et travaux publics, du commerce et de l’ingénierie et conseil) s’inscrit dans la mouvance précitée.
Ceci se matérialise par une prise en compte de la dimension économique des achats publics, qui doivent se faire aux meilleurs prix, sans renoncer à la qualité.
Si cette Commission a la lourde tâche de répondre aux attentes des principaux acteurs de la commande publique, le rôle de son organe délibératif est d’autant plus prépondérant en matière d'instruction des réclamations des concurrents dans un délai de 15 jours (prorogeable à 30 jours), puisque celui-ci statue sur la suite à réserver auxdites réclamations.
Pour rappel, en vertu de l’article 34 du décret 2-14-867, l’organe délibératif peut proposer l’annulation de la procédure lorsqu'il s'agit d'une irrégularité substantielle, la rectification de l'irrégularité ou encore l’irrecevabilité de la réclamation pour manque de fondement juridique valable.
Notons tout de même que les propositions de décisions présentées par l'organe délibératif concernant les réclamations des concurrents sont soumises à la signature du Chef du gouvernement. ■
Les principales missions de la Commission
La CNCP assure les missions de consultation, d'assistance, d'étude et d'examen de toute question qui lui est soumise en matière de commande publique par les services de l'Etat, tout en examinant, comme cela a été mentionné, les réclamations émanant de toute personne physique ou morale de droit privé soit en qualité de concurrent, d'attributaire ou de titulaire d'une commande publique.
De plus, l’entité composée de 13 membres (dont le président) assure la coordination des actions de formation initiale et continue dans le domaine de la commande publique au profit des gestionnaires publics (administration).
Celle-ci donne également son avis sur les projets de réglementation de la commande publique tout en veillant au respect des principes généraux des achats publics (liberté d'accès, égalité de traitement des concurrents, garantie des droits des concurrents et transparence dans les choix de l'administration publique pour l'attribution).
Dans le détail, l’article 30 du décret relatif à la CNCP donne la possibilité à tout concurrent de recourir à la Commission en cas de non-respect des règles de la passation de la commande publique, de présence de clauses discriminatoires, de conditions disproportionnées et de contestation des motifs de l'élimination de son offre. ■
M. Diao