◆ Capharnaüm médical et politique autour de ce médicament à bas coût.
◆ Le Maroc reste droit dans ses bottes et continue d’utiliser la chloroquine pour le traitement des patients atteints de la Covid-19.
Par D. William
Jamais un traitement n’a suscité autant de polémiques. En pleine pandémie du coronavirus, les scientifiques se déchirent sur l’efficacité de ce traitement. Enjeux médicaux, financiers, politiques… tout se mêle dans un formidable brouhaha qui laisse pantoise l’opinion publique.
Dans ce débat public bien pourri, même la toute puissante Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est prise les pieds dans le tapis, montrant, de par ses tergiversations, la forte influence que peuvent avoir des revues scientifiques, à l’instar du Lancet, sur ses décisions.
Le Lancet justement, la Rolls Royce des revues scientifiques, qui a publié une étude observationnelle polémique flinguant sans retenue le traitement à base de chloroquine cher au professeur Didier Raoult, l’a finalement retirée, entamant fortement sa crédibilité. Trois des quatre auteurs de cette fameuse étude se sont finalement rétractés, estimant qu’ils ne pouvaient plus se «porter garant de la véracité des sources des données primaires». Et ce, d’autant que la société les ayant collectées (Surgisphere), dirigée par le quatrième auteur, a refusé de donner l’accès à la base de données. En réalité, le Lancet s’est fait lamentablement flouer par la petite société américaine Surgisphere, une coquille vide qui a orchestré une escroquerie médicale à dimension internationale.
Résultats : l’OMS, qui, au lendemain de la publication de l’étude, a suspendu l’utilisation de l’hydroxychloroquine dans le cadre de l’essai Solidarity, a quelques jours plus tard changé de fusil d’épaule pour reprendre ses essais cliniques.
Le Maroc, une ligne constante
Le Maroc, à l’instar de certains pays comme le Sénégal, est resté loin de ces cafouillages et vives polémiques. Il a adopté la chloroquine depuis le début de la pandémie, et s’y est tenu. On ne change pas une équipe qui gagne, dit-on. Le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, n’a pas dit autre chose lors de ses différentes sorties : «au moment où l'Organisation mondiale de la santé avait appelé à suspendre les essais cliniques au niveau mondial, le Maroc est resté attaché à sa décision initiale, dont la pertinence a été démontrée quelques jours après».
«Le Maroc a assumé cette responsabilité en raison de l'efficacité de ce médicament, qui peut être prouvée», fait-il savoir, assurant que les patients guérissent lorsqu'ils utilisent la chloroquine dès les premières phases de la maladie. D’ailleurs, pour Ait Taleb, «le nombre des décès au Royaume est parmi les plus faibles au monde et c'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas remettre en question l'efficacité de ce médicament». En cela, le ministre a d’ailleurs promis que des rapports du comité scientifique concernant les cas traités à la chloroquine et la durée de traitement seront publiés.
Même son de cloche du côté de Mohamed El Youbi, directeur de l'épidémiologie et de lutte contre les maladies au ministère de la Santé. Contacté par nos soins, El Youbi confirme que «la chloroquine a été recommandée dès le début de la pandémie par le comité scientifique et technique composé de médecins de référence et en phase avec les progrès scientifiques réalisés à travers le monde».
«Ce comité était convaincu depuis le départ de l’efficacité du protocole thérapeutique utilisé, et les résultats probants obtenus lui ont donné raison», ajoute-t-il.
Clairement, le Maroc a foi en ce médicament devenu l’objet de toutes les attentions dans le monde scientifique, et dont le paquet ne coûte que 12 DH.
Dans ce sens, les dispositions nécessaires ont été prises pour l'importation de la matière brute du sulfate d'hydroxychloroquine afin d'éviter la rupture de stock et assurer le traitement aux patients.
Mais le protocole thérapeutique n’explique pas, à lui seul, la bonne gestion de la pandémie au Maroc.
«Ce traitement a été accompagné du confinement et de l’intensification des dépistages. Ces trois facteurs ont permis de limiter la propagation de l’épidémie», conclut El Youbi. ◆