ENTRETIEN : «Il y a une grande attente du continent par rapport au retour du Maroc au sein de l’UA»

ENTRETIEN : «Il y a une grande attente du continent par rapport au retour du Maroc au sein de l’UA»

Cherkaoui roudani

Ce retour est encouragé par l’émergence d’une conscience africaine faisant face aux tentatives sépa­ratistes. Le Royaume dispose d’importants atouts géostratégiques et économiques, qu’il met déjà au service des pays africains. Le discours de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Kigali (Rwanda) est une feuille de route et un appel universel à la mobilisation générale pour faire face aux défis et enjeux aux­quels l'Afrique fait face. Cherkaoui Roudani, député et analyste en géostratégie, retrace les challenges futurs du Maroc au sein de l’UA.

 

Finances News Hebdo : Qu’est-ce qui jus­tifie le souhait formulé par le Maroc de réin­tégrer le concert de l’Union africaine (UA) ?

Cherkaoui Roudani : Je précise que c'est une décision et en aucun cas une demande. La réin­tégration du Maroc dans le concert de l'UA se fera sur le plan institutionnel, car notre pays a toujours joué un rôle de premier plan dans le continent africain. D’ailleurs, le Maroc est le 2ème investisseur dans le continent et le premier en Afrique du Sahel. Outre l'importance accordée constitutionnellement à l'africanité du Royaume du Maroc, les visites de Sa Majesté à l'étranger ont été souvent en Afrique. Il y a un autre point très important, le nombre de pays qui continuent de reconnaître la pseudo «RASD» est très faible par rapport aux années 80 et 90. Ceci dit, il y a une conscience africaine qui a émergé dans le continent en faisant face aux tentatives séparatistes. De ce fait, le Maroc avec son projet qui se concrétise véritablement sur le terrain africain, a toute sa place comme pays fondateur de cette organisation.

 

F.N.H. : Quel serait l’apport de ce retour pour le continent ?

Ch. R. : Ce retour institutionnel à la famille africaine est d'une importance géostratégique et écono­mique. Les capacités marocaines en termes de lutte contre le terrorisme lui ont permis d’asseoir pragma­tiquement une notoriété d’un pays capable de réus­sir des combats dans un environnement contaminé. Nul ne peut douter de la force et de l'engagement sempiternel du Maroc dans le renforcement de la place de l'Afrique dans l'ordre mondial. Les accords de Skhirate entre les antagonistes libyens ainsi que la présence de la diplomatie marocaine dans la solution des conflits africains illustrent la position stratégique du pays comme un interlocuteur cré­dible et viable. Dans ce sens et sans aucun doute, le Royaume du Maroc jouera un rôle prépondérant dans la métamorphose que connaîtra le continent dans les prochaines années. N'oublions pas aussi que le Maroc est un modèle mondialement reconnu et, à n’en point douter, il sera précurseur d'une intégration africaine efficace assumant toutes ses responsabilités mondiales.

 

F.N.H. : Dans ce contexte, quelles seraient les principales difficultés auxquelles le Maroc sera confronté ?

Ch. R. : Je pense que l'expression «principales difficultés» est un peu bilieuse; je préfère le mot challenges car le retour institutionnel du Maroc au sein de la famille africaine a toujours été une sollicitation de nombreux pays du continent pour que le Maroc regagne la place qui est la sienne. Avant tout, il y a une grande attente du continent par rapport à ce retour. La signature de plus de 28 pays africains demandant la suspension de la chimérique et pseudo «RASD» des instances de l’UA est une détermination affichée pour que le Maroc regagne sa place qui est la sienne au sein de la famille africaine. Cette attente est une donnée qui va nécessiter le renforcement des moyens d'actions et davantage d'implication marocaine tant au niveau économique qu'au politique dans le continent. Les relations stratégiques que le Maroc entretient avec le monde occidental vont nécessiter une réadapta­tion globale pour que nous arrivions à jouer le rôle qui nous incombe dans un continent à la merci des donateurs et bailleurs de fonds. L'intérêt affectif et humain porté toujours par Sa Majesté au continent est un secret de Polichinelle. Il n'hésitera pas, à chaque fois que l'occasion se présente, à mobiliser le savoir-faire ainsi que l'expertise marocains pour donner un fort élan au développement économique et social du continent.

 

F.N.H. : Que retenir du discours royal pro­noncé lors de ce 27ème sommet des Chefs d’Etat de l’UA ?

Ch. R. : Le discours de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Kigali (Rwanda) est une feuille de route et un appel universel à la mobilisation générale pour faire face aux défis et enjeux auxquels l'Afrique fait face. Bien évidemment, d'autres challenges se présentent et qui sont, me semble-t-il, inhérents à la réalité africaine. Ils doivent être pris en compte pour asseoir une vision globale en repensant l’ave­nir des relations solides locales et régionales. Le prochain sommet de la COP22 qui sera organisé à Marrakech, sera une occasion de réitérer la voix africaine défendant les intérêts d’un continent qui s’enlise dans les conséquences désastreuses des changements climatiques. Avec l'enchevêtrement des intérêts dans une Afrique dans laquelle certaines régions sont déboussolées, il me semble important de les démêler afin que nous puissions restructurer nos relations stratégiques avec l'ensemble sur le long terme.

Propos recueillis par I. Bouhrara

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