Lutte contre l’informel : la carotte fiscale séduit peu

Lutte contre l’informel : la carotte fiscale séduit peu

 

Les entreprises qui ont préféré quitter l’informel ne dépassent pas les 6.000 contre 50.000 qui le regagnent annuellement : 1,5 million d’unités continuent d’opérer dans des activités non organisées.

Les opérateurs non organisés ont peur d’être identifiés, craignant d’être poursuivis non seulement par la DGI, mais aussi par d’autres autorités.

L’effet psychologique fait que l’Administration renvoie une image négative au citoyen.

 

 

L’informel continue de peser lourdement sur l’économie nationale. Selon des la CGEM, il représenterait 20% du PIB. D’autres études font part d’un taux de plus de 30%.

Depuis plusieurs années, le gouvernement multiplie les initiatives au profit des entreprises opérant dans ce secteur, notamment les TPME, pour les inciter à se mettre dans la «légalité».

Parmi les dispositions arrêtées, figurent notamment des dérogations fiscales, comme l’exonération de la cotisation minimale pendant trois ans et de la taxe professionnelle pendant 5 ans.

Pour les régimes spéciaux, des aménagements sont prévus pour les entreprises d’artisanat, d’exportation ou celles qui s’implantent dans des régions dont le développement est très sollicité. Elles bénéficient également d’un taux réduit de l’IS. Malgré ces avantages octroyés, le nombre d’entreprises ayant opté pour le circuit organisé reste largement en deçà des objectifs.

«Les entreprises qui ont préféré quitter l’informel ne dépassent pas les 6.000 contre 50.000 qui le regagnent annuellement : 1,5 million d’unités continuent d’opérer dans des activités non organisées. Celles qui ont choisi de quitter l’informel, l’ont fait plus par contrainte que pour se conformer à la réglementation. Ce sont le plus souvent des importateurs qui ont besoin de factures ou de crédit documentaire pour réaliser leurs transactions ou certaines entreprises qui doivent soumissionner à des appels d’offres», souligne Youssef Oubouali, professeur de droit fiscal.

Pour leur part, les chefs d’entreprises qui exercent dans l’informel avancent plusieurs arguments pour justifier leur choix. Ils citent les autres charges parafiscales comme la CNSS, la taxe professionnelle, les taxes locales et l’assurance maladie : une fois la société créée, ces charges deviennent régulières, impactant le bilan. Ils pensent par ailleurs qu’une fois identifiés et inscrits à la direction des impôts, ils peuvent être traqués à tout moment.

«Les opérateurs non organisés ont un rythme d’activité fluctuant, surtout dans certains secteurs comme l’agriculture, le commerce, le transport, le BTP… Ils ne veulent pas prendre le risque de supporter des charges supplémentaires pour des recettes qui ne sont pas régulières. De plus, ils craignent d’être souvent contrôlés par les agents d’autorité comme ceux de la direction des impôts, de la sécurité sociale, de la douane ou de l’inspection du travail», précise Oubouali.

 

Effet psychologique

 

Le gouvernement doit mener un important travail de sensibilisation et de communication pour lutter contre l’informel. Car il existe un effet psychologique chez les opérateurs du secteur qui incite à éviter tout ce qui est organisé et contrôlé.

«Même à un taux zéro de l’IS, certains opérateurs ne voudront pas basculer vers une activité organisée. C’est une question de culture et d’état d’esprit. Il faut du temps et un travail de longue haleine pour les convaincre. Une image négative s’est installée, qui véhicule des rapports conflictuels entre le citoyen et l’Administration», précise Oubouali.

Le haut-commissariat au Plan (HCP) définit l’informel licite comme toute activité professionnelle ne tenant pas une comptabilité. Plus pragmatique, le droit fiscal reconnaît les opérateurs qui ne tiennent pas de comptabilité pour lesquels il propose le régime des ou encore le régime dérogatoire. Pour des raisons sociales et aussi par manque de moyens, l’administration fiscale est tolérante envers les unités de l’informel.

Un système de comptabilité facilité, moins coûteux à entretenir permettra de séduire ces opérateurs. Le Maroc peut s’inspirer des expériences réussies à l’international. Des pays comme la Turquie, l’Inde ou le Brésil ont pu réduire en moins de dix ans le nombre d’entreprises non organisées

 

Par C. J.

 

 

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