La TPE est la première victime des délais de paiement, avec un délai clients de 264 jours en 2017.
Le montant cumulé du crédit interentreprises privé est 8 fois supérieur à celui du public.
C’est un boulet que traînent les chefs d’entreprises depuis des années. L’allongement des délais de paiement demeure au sommet des priorités du patronat et du ministère des Finances, lesquels travaillent d’arrache-pied pour tenter d’y remédier, ou du moins d’en limiter les dégâts, pour la TPME surtout.
Inforisk, le spécialiste marocain du renseignement commercial sur les sociétés marocaines et maghrébines, vient de publier une étude sur les délais de paiement au titre de l’année 2017.
Les résultats sont alarmants : en moyenne, il faut compter 264 jours pour être payé, soit 8,8 mois, contre une norme réglementaire de 3 mois. Le constat fait par le spécialiste est que la problématique des retards de paiement est avant tout une question de taille d’entreprises avant d’être une question de secteur.
Quel que soit le secteur d’activité, les TPE ont des délais largement supérieurs aux autres catégories d’entreprises. Elles sont la première victime des délais de paiement, avec un allongement de plus de 66 jours des délais clients depuis 2010, alors que la grande entreprise (GE) est la seule catégorie d’entreprises où la courbe des délais de paiement est inversée. Dit autrement, les délais fournisseurs sont supérieurs aux délais clients. Les délais clients GE étaient en effet de 98 jours en 2017 contre
128 jours pour les délais fournisseurs, soit un solde négatif de -30 jours.
En terme sectoriel, deux en particulier affichent les délais les plus longs (toutes tailles confondues). Il s’agit du BTP et de l’immobilier. Parallèlement, selon l’échantillon pris dans l’étude, les TPE du secteur du commerce présentent les délais les plus longs, soit 314 jours (10,5 mois).
D’un autre côté, l’étude fait ressortir un lien de corrélation évident entre délais de paiement et défaillances d’entreprises. En effet, 40% des défaillances sont le fait des retards de paiement.
Là encore, la TPE en est le souffre-douleur. Dans le commerce par exemple, la part des TPE défaillantes est de 35%, 16% dans le BTP et 22% dans l’immobilier. A côté des retards de paiement, la rupture du cycle de trésorerie et la sous-capitalisation chronique ont des impacts négatifs.
Tous les bons ingrédients pour des mortalités précoces. C’est ce qu’expliquait d’ailleurs Amine Douiri, directeur études & communication chez Inforisk, il y a quelques semaines sur nos colonnes : «la très grande majorité des défaillances d’entreprises enregistrées en 2017 -plus de 8.000- concernait des TPE qui n’avaient pas réussi à passer le cap de la ‘vallée de la mort’». C’est-à-dire, 3 ans après la création. ■
Crédit interentreprises privé : 37% du PIB !
Le montant cumulé du crédit interentreprises privé au Maroc est de 423 milliards de DH en 2017, soit 37% du PIB. D’une année à l’autre, le montant a progressé de 7% et est 8 fois supérieur à celui du public. En effet, sous l’impulsion de l’Etat, les délais de paiement publics se sont fortement améliorés en 2017. Ils se situent à une moyenne de 58 jours contre 150 jours l’année d’avant. Le véritable enjeu des délais de paiement concerne donc le crédit interentreprises privé.
D’après Dun&Bradstreet, le Maroc, avec un taux de retard de paiement supérieur à plus de 90 jours de 16,5%, est le plus mauvais pays au monde, derrière… les Philippines !
Par Y.S