«La campagne agricole 2017/2018 démarre dans des conditions inquiétantes»

«La campagne agricole 2017/2018 démarre dans des conditions inquiétantes»

 

Le déficit hydrique empêche plusieurs agriculteurs de commencer les travaux du sol et in fine l’emblavement des terres. Pour les secteurs en cours d’organisation, une nouvelle impulsion s’avère nécessaire. Le point avec Ahmed Ouayach, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader).

 

 

Finances News Hebdo : Comment jugez-vous les conditions actuelles pour le démarrage de la campagne agricole ?

 

Ahmed Ouayach : La campagne 2017/2018 démarre dans des conditions inquiétantes compte tenu du retard des pluies. Un déficit important est enregistré par rapport à la moyenne nationale de cette période. Cette situation a engendré une baisse des réserves des barrages comparativement à l’année dernière. Déjà à cette époque, le stock en eau n’était pas assez suffisant.

En plus des zones Bour qui seront les plus touchées, les grands périmètres irrigués ne seront pas épargnés, notamment Doukkala, Tadla, El Haouz , Souss Massa et Moulouya. C’est une situation préoccupante pour tous les exploitants petits ou grands.

Nous gardons notre optimisme, en espérant l'arrivée rapide des pluies, pour constituer nos réserves en eau et alimenter les nappes phréatiques et permettre l'installation des cultures d'automne dans de très bonnes conditions. Comme citoyens responsables et solidaires, nous considérons comme priorité l'alimentation en eau potable des populations, la sauvegarde du cheptel et des plantations.

Au niveau des préparatifs, il faut reconnaître que les autorités concernées notamment le département de l’Agriculture, ont fait ce qui est nécessaire en matière d’approvisionnement du marché en intrants. Les semences sont disponibles en quantités suffisantes à des prix subventionnés qui les rendent compétitifs. Toutes les mesures ont été prises pour alimenter le marché en engrais.

Mais le retard des pluies empêche plusieurs agriculteurs de commencer les travaux du sol et donc l’emblavement des terres. Il faut rappeler que la filière céréalière occupe plus de 70% de la superficie agricole utile.

 


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F.N.H. : Le Plan Maroc Vert (PMV) célèbre cette année son dixième anniversaire. Quelle est votre évaluation de cette stratégie surtout pour les petits exploitants ?

 

A. O. : Le PMV est un plan de développement économique et social qui s’inscrit dans la durée. En toute logique, cette stratégie a atteint tous les objectifs qui lui ont été tracés depuis le départ. Nous constatons cette évolution au niveau de plusieurs filières comme les fruits et légumes, le lait, viandes rouges ou autres. Dans certains projets, elle a acquis une avance remarquée.

Mais le PMV reste impacté par les aléas climatiques et les disponibilités en eau de plus en plus rares. Il est à préciser qu’à son début, ce plan s’adressait à tous les agriculteurs, toutes les filières et toutes les régions. Si une filière est bien organisée, les résultats ne tardent pas à suivre. Pour d’autres régions ou secteurs en cours d’organisation, une nouvelle impulsion est nécessaire pour rattraper le retard relatif enregistré.

Lorsque les petits exploitants sont organisés en coopératives, groupement d’intérêt économique ou en associations, ils profitent largement des aides du PMV. Concernant les autres qui opèrent dans un circuit non structuré, les résultats sont aléatoires. Durant les moments difficiles, nous savons que nous pouvons toujours compter sur l'aide des pouvoirs publics sous forme d’actions sociales, comme le plan d’urgence antisécheresse, le ravitaillement en eau et en aliment de bétail.

Cela n’empêche que le département de tutelle doit revoir ses actions au profit de cette population fragile en lançant des nouvelles mesures plus adéquates et mieux adaptées. La petite agriculture qui constitue l'essentiel de notre tissu productif, qui assure notre sécurité alimentaire, doit être considérée comme la priorité des priorités.

Nous pensons à des formules encore plus novatrices en matière de financement et d’assurance agricole.

 

F.N.H. : La filière céréalière est le véritable baromètre du secteur agricole national. Comment jugez-vous son évolution et son programme de modernisation ?

 

A. O. : La restructuration profonde de la filière céréaliculture est une action prioritaire. Des changements sont à prévoir au niveau de toutes les composantes de la chaîne de valeur: production, commercialisation et transformation. Il s’agit en premier lieu de dresser un diagnostic sans complaisance, crédible et détaillé des lacunes et des faiblesses de l’activité.

Chaque décision doit être prise d’une manière prudente, concertée et maîtrisée, car c’est une filière très sensible. Il est question de renforcer le mode de fonctionnement des organisations professionnelles qui encadrent l'activité céréalière.

 

F.N.H. : Où en sont les négociations avec l’Union européenne sur le volet agricole ?

 

A. O. : Les négociations sur le volet agricole entre Rabat et Bruxelles sont permanentes. Aujourd’hui, il n’y a pas de grandes divergences à l’horizon. Seules quelques agitations de la part de nos concurrents directs concernant certains produits précis sont à signaler. D’autres perturbations surviennent de temps à autre mais elles sont plutôt d’ordre politique.

Dans l’ensemble, il y a un terrain d’entente et de respect mutuel entre les deux parties. Nous demeurons vigilants pour défendre nos droits et protéger les accords que nous considérons dans l'intérêt des parties les plus concernées. ■

 

Propos recueillis par C. Jaidani

 

 

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