Ecosystèmes industriels : Des taux d’intégration encore faibles

Ecosystèmes industriels : Des taux d’intégration encore faibles

 

Les réalisations importantes du Plan d’accélération industrielle n’ont pas encore atteint la taille appropriée pour avoir des retombées économiques significatives sur la croissance économique. Les activités non agricoles (y compris l’industrie) devraient continuer à s’inscrire dans leur sentier de faible croissance avec 2,5% après 2,2% en 2016.

 

 

Dans le cadre du Plan d’accélération industrielle, 17 conventions ont été signées, il y a une semaine, par le ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Economie numérique, M. H. Elalamy, le ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Boussaid, et par les dirigeants des entreprises concernées. Ces projets devraient générer un chiffre d’affaires de 7,62 Mds de DH pour 14.230 emplois créés (voir p 25). Des chiffres qui s’avèrent d’une grande importance pour un Maroc en quête de rejoindre le peloton des pays émergents. Depuis 2014, le Royaume est mis à l’épreuve sur le plan industriel. Il est tenu plus que jamais de faire preuve d’une grande ténacité pour être compétitif tant sur le plan international que régional. Le leitmotiv est de rompre avec le stéréotype désignant le Maroc comme un pays à vocation agricole. Que l’agriculture détermine la variation du PIB.

Pour briser cette forte corrélation entre le PIB et le comportement des activités agricoles, la stratégie industrielle lancée en 2014 s’est assignée pour objectif de faire jouer au secteur industriel un rôle des plus affirmés dans l’économie nationale. Il est question, en substance, de créer à l’horizon 2020 l’équivalent de 500.000 emplois avec un élargissement de la part du secteur industriel à 23% contre 14% actuellement, et ce tout en renforçant la contribution de ce secteur à l’équilibre de la balance commerciale structurellement déficitaire.

Ces objectifs très ambitieux attisent la curiosité des analystes et économistes à passer chaque année au peigne fin les réalisations issues des différents écosystèmes, dont la première vocation est d’assurer une intégration industrielle.

Succinctement et tout en vous épargnant des détails, l’exécution du Plan d’accélération industrielle a donné lieu à de nombreux contrats de performances dont les résultats se sont révélés remarquables. Ce sont les cas des premiers écosystèmes automobiles (câblage, sièges et intérieur du véhicule, métal) lancés en 2014. Le succès induit de cette opération était complété par le déploiement, en 2016, d’une nouvelle filière déterminante des «moteurs et transmission» qui va contribuer à la réalisation de l’objectif d’une intégration atteignant 80%. Le projet Renault ayant permis la création de plus de 7.000 emplois directs et près de 350.000 emplois indirects avec une production ayant atteint 400.000 véhicules valeur aujourd'hui en est le parfait exemple.

Des réalisations qui donnent du tonus au ministre de l’Indutrie, Moulay Hafid Elalamy. En évoquant l’exonération totale de l’IS en faveur des sociétés industrielles nouvellement créées, mesure-phare de la Loi de Finances 2017, Omar Faraj, Directeur général des impôts, explique que cette mesure préfigure un ensemble de dispositions à l’étude dans le cadre de la refonte de la charte d’investissement : «Projet porté à bras-le-corps par notre dynamique ministre de l’Industrie. Sa pugnacité pour défendre ses idées tourne souvent à de l’harcèlement. J’en sais quelque chose à mon corps défendant». Une reconnaissance de Omar Faraj qui en dit long sur la persévérance de M.H. Elalamy et qui se veut un signal fort du gouvernement quant à la priorité accordée au secteur industriel.

 

Là où le bât blesse

 

Toujours est-il que ces réalisations, tout aussi conséquentes, n’ont pas encore atteint le seuil adéquat pour avoir des retombées économiques significatives sur la croissance économique. Une croissance qui, au demeurant, est toujours drivée par le secteur primaire. D’après les prévisions du HCP, «les activités non agricoles (y compris l’industrie) devraient continuer à s’inscrire dans leur sentier de faible croissance avec 2,5% après 2,2% en 2016».

«La part du secondaire est restée pratiquement stable à 35% de la valeur ajoutée non agricole, dénotant sa faible diversification. Les activités non agricoles constituent le véritable talon d’Achille de l’économie nationale», rappelle à juste titre le haut-commissaire au Plan à l’occasion de la présentation du Budget exploratoire 2018.

D’aucuns considèrent que les prouesses enregistrées, jusqu’ici, ne constituent pas encore une proposition suffisante pour répondre aux demandes sans cesse croissantes des diplômés demandeurs d’emplois.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes, le taux de chômage des diplômés toutes catégories confondues est de l’ordre de 23%. Interrogé sur la faible contribution de l’industrie à la croissance économique, Hicham Bensaid Alaoui, directeur des risques, de l’information des sinistres et du recouvrement à Euler Hermes Acmar n’y va pas de main morte: «Les écosystèmes mis en place tardent à traduire leur impact optimisé en termes de création de valeur ajoutée, car les taux d’intégration industrielle demeurent encore faibles». Toutefois, il reste confiant : «Attendons donc une montée en gamme de l’écosystème industriel marocain dans sa globalité pour permettre de proposer une offre de services à même de développer davantage les taux d’intégration industrielle». Cette faible contribution au PIB, l’économiste Najib Akesbi l’incombe entre autres à un manque de coordination trop criard entre les stratégies structurelles.

A noter également que ces réalisations ne doivent pas cacher un fait important : au cours des dernières années, le Maroc est en train de gagner des avantages comparatifs dans les filières à forte intensité de capital, tels que l’automobile, l’aéronautique…Mais tout en perdant des avantages dans les activités traditionnelles à forte intensité de main-d’œuvre, comme c’est le cas du textile-habillement.

Pour conclure, il est judicieux de rappeler que l’entrepreneur marocain, étant habitué à intervenir dans les valeurs sûres, synonymes de gains rapides, n’est pas encore prêt à faire face aux aléas des risques latents, qu’il juge intrinsèques aux projets industriels. Il faut ainsi donner du temps au temps. ■

 

Par S. Es-siari

 

 

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