Délais de paiement : Traitement de choc

Délais de paiement : Traitement de choc

Photo : Sohaib Zefri, © FNH



 

Entre 2017 et 2018, les délais de paiement de l’Etat sont passés de 58 à 39 jours et ceux des établissements et entreprises publiques réduits de 78 à 64 jours.

L’accélération des déblocages des dotations budgétaires et des actions d’apurement des crédits TVA ont contribué à consolider l’exemplarité de l’Etat en la matière.

La CGEM a mis en place une série de mesures afin de réduire les délais de paiement entre entreprises privées.

 

Par M. Diao

 

Le diagnostic sur les délais de paiement est connu de tous. Les crédits interentreprises représentent près de 400 Mds de DH, ce qui équivaut à près de 40% du PIB. 40% des défaillances d’entreprises sont liés au fléau des retards de paiement.

Les délais moyens de paiement clients des TPE tournent aujourd’hui autour de 250 jours. Cette situation pour le moins critique pour l’économie nationale n’a pas laissé indifférent le Roi Mohammed VI, qui en août 2018, a attiré l’attention sur la nécessité pour les administrations publiques et les collectivités territoriales en particulier, de s’acquitter de leur dû aux entreprises.

Depuis lors, sous l’impulsion de Mohamed Benchâaboun, ministre de l’Economie et des Finances, et de ses homologues des Départements de l’Intérieur et de l’Education nationale, un réel saut quantitatif et qualitatif a été constaté à travers plusieurs mesures concrètes (circulaires, mise en place de la plateforme Ajal, etc.) dont les résultats sont  perceptibles aujourd’hui.

«Entre 2017 et 2018, les arriérés de crédits TVA sont passés de 40 Mds de DH à moins de 10 Mds de DH», rappelle l’argentier du Royaume lors de l’événement de grande envergure, organisé à Rabat récemment par la CGEM en partenariat avec plusieurs entités publiques (TGR, DGCL, DEPP) impliquées dans cette question autrement cruciale pour le développement du pays.

 

Quand le public fait preuve d’exemplarité

En matière de règlement à temps, force est de constater que le privé a beaucoup à apprendre du public. «Entre 2017 et 2018, les délais de paiement de l’Etat sont passés de 58 à 39 jours et ceux des établissements et entreprises publiques (EEP) s’est réduit de 78 à 64 jours», précise Benchâaboun, qui a fait d’importantes annonces allant dans le sens de la pérennisation de la dynamique enclenchée par le secteur public en matière de réduction des délais de paiement. Sachant que l’accélération des déblocages des dotations budgétaires et des actions d’apurement des crédits TVA ainsi que la mise en place de structures dédiées au suivi des délais de paiement au sein de certains EEP, ont contribué à consolider l’exemplarité de l’Etat en la matière.

De plus, un mécanisme de suivi trimestriel des délais de paiement dédié aux EEP a été mis en place. En mai 2019, l’Etat et les collectivités locales mettront en place un dispositif de dépôt électronique des factures. Sous la férule du ministre de l’Intérieur, des comités locaux de suivi des délais de paiement verront également le jour sous la supervision d’un comité central.

Le ministère des Finances s’emploiera également à accélérer le travail de l’Observatoire des délais de paiement afin de lui permettre de jouer son rôle de force de propositions et de forum d’échanges et de concertation.

A l’évidence, ces mesures sont de nature à renforcer la confiance entre les partenaires public et privé. Ce qui est de bonne guerre d’autant plus que la commande publique, pan important de l’économie, représente en 2019 près de 200 Mds de DH, ce qui équivaut à 19% du PIB. 70% du chiffre du secteur du BTP découle de la commande publique.

Par ailleurs, notons que d’après Noureddine Bensouda, la réforme portant sur les délais de paiement de l’Etat n’a pas impacté négativement les finances publiques par un accroissement conséquent du montant des intérêts moratoires payés. Pour preuve, en 2018, 15,5 millions de dirhams (MDH) ont été payés contre 18,5 MDH en 2017 et 12,5 MDH en 2016, dont 95% concernent les retards de paiement des marchés publics.

L’autre engagement de taille réitéré par le département de l’Economie et des Finances est la non-constitution d’arriérés de TVA au titre de l’année 2019. Au-delà de ces annonces, des résultats du secteur public et des engagements pris, la rencontre intitulée : «La réduction des délais de paiement, une responsabilité collective» a mis en perspective les enjeux de l’implication de tous les acteurs issus des secteurs public et privé dans une logique de concertation permanente pour aller de l’avant.

 

Sortir de la spirale infernale

«Nos us et coutumes se sont transformés dangereusement. Ne pas payer sa facture est tout à fait normal dans le business», s’offusque Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Economie numérique, qui a rappelé à juste titre que : «L’entreprise ne perd pas de l’argent en remboursant ses dettes à temps».

Les différents intervenants qui se sont succédé à la tribune, ont tous souligné l’urgence de faire évoluer les mentalités dans le monde des affaires ainsi que le changement de certaines pratiques au sein de l’administration qui ne compte toujours des cadres qui ne jouent pas le jeu.

«En dépit des résultants encourageants annoncés, notre secteur assez particulier compte beaucoup d’entreprises qui pâtissent de l’allongement des délais de paiement des EEP», assure El Mouloudi Benhamane, président de la Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics (FNBTP).

 

La CGEM n’est pas venue les mains vides

«La question des délais de paiement est devenue une affaire critique dans notre pays», martèle Salaheddine Mezouar, président de la CGEM, qui se positionne comme une réelle force de propositions afin d’améliorer sensiblement les délais entre entreprises privées.

«Le rôle de la CGEM qui a mis en place une charte de bon payeur à laquelle ont adhéré près de 150 grandes entreprises, assure un rôle de sensibilisation  et  de communication sur le sujet qui nous regroupe», assure Hammad Kassal, président de la commission financement et délais de paiement au sein du patronat, qui faudrait-il le rappeler, a mis en place un site Web dont la vocation est de canaliser les réclamations de toutes les entreprises concernant les délais de paiement. L’objectif étant d’apporter des solutions concrètes aux doléances en la matière. La CGEM propose également aux entreprises de jouer un rôle de médiation pour les problèmes afférents aux retards de règlement.

Le patronat n’est pas avare en recommandations pour le secteur privé, car celui-ci propose, entre autres à ce que le secteur bancaire mette en place un crédit document domestique. Des recommandations vont également dans le sens de l’instauration de l’affacturage inversé, plus avantageux en termes de taux.

Par ailleurs, du côté de la CGEM, l’on estime également que l’Etat doit mettre sur pied un système incitatif pour les bons payeurs, tout en amenant les entreprises privées bénéficiant de subventions de régler à temps leurs fournisseurs. ◆

 

 

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