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Règles comptables vs Règles fiscales : l’harmonisation tarde à voir le jour

L’harmonisation tarde à voir le jour

 

Les règles fiscales sont parfois déconnectées de la réalité économique et comptable. Cette non-convergence n’est pas du goût des opérateurs qui la considèrent comme étant pénalisante. La connexion comptabilité/fiscalité est complexe, car ambivalente.

 

Le redressement fiscal chez certaines banques a ressuscité le débat sur la nécessité de l’harmonisation entre les dispositions fiscales et les règles de provisionnement bancaires.

A l’occasion de la présentation des résultats semestriels de l’exercice en cours, deux grands banquiers de la place ont attiré l’attention et attribué ce redressement fiscal, entre autres, au décalage existant entre la réalité économique et celle fiscale.

Une requête qui apparemment ne date pas d’aujourd’hui, vu que cela fait au moins une décennie que la Banque centrale avait sollicité la Direction générale des impôts pour un tel alignement. «C'est un dossier que nous avons ouvert avec la Direction générale des impôts il y a déjà 10 ans. Nous leur avons demandé d’examiner ensemble la convergence des règles prudentielles et des règles fiscales», rappelle à ce titre le gouverneur Abdellatif Jouahri à l’occasion du dernier Conseil de BAM.

L’argentier étaye ses propos par une liste de pratiquement 80 pays où ces règles convergent. Et d’ajouter : «les banques n’ont pas intérêt à surestimer les provisions, car elles sont suivies par la Bourse, par les actionnaires et par l’autorité de contrôle…».

Du coup, la DGI ne peut appliquer les mêmes règles à une banque et à une petite entreprise. Les banques au Maroc disposent de leur propre plan comptable et sont sous la tutelle d’un régulateur.

 

Ambivalence !

 

Cette distorsion entre les dispositions fiscales et les règles de provisionnement des créances en souffrance n’est pas propre aux banques, mais s’étend également aux sociétés de financement et aux compagnies d’assurances. Mieux encore, elle ne se limite pas aux règles de provisionnement, mais aussi à celles de l’amortissement.

Dans un souci d’équité, si le législateur souhaite harmoniser les dispositions fiscales avec celles économiques, il est appelé à le faire pour les secteurs, toutes catégories confondues, et aussi bien en matière de provisionnement que d’amortissement. Cette harmonisation se traduirait par des déductions fiscales qui risquent d’impacter le Budget qui, bon an mal an, ne trouve pas encore la forme.

Interrogé sur l’enjeu d’un tel débat, Hicham Bensaid, directeur des risques et de l’information à Euler Hermes Acmar, confirme qu’il s’agit d’un débat de fond. A son tour, il prétend que c’est incompréhensible pour un opérateur économique que deux entités publiques de tout premier plan, telles que la Banque centrale ou l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale prévoient des dispositions spécifiques (par exemple, provisionnement des créances problématiques sur base statistique), alors qu’un autre pôle étatique, l’Administration fiscale en l’occurrence, adopte un principe tout à fait différent. Il plaide ainsi pour une harmonisation entre les différents organes publics.

A noter que cette déconnexion entre les règles comptables et celles fiscales n’est pas propre à notre pays. Même sous d’autres cieux, elle a souvent fait l’objet d’incessantes discussions. Et le débat n’est pas fini pour autant. La connexion comptabilité/fiscalité est complexe, car ambivalente.

Comment ? Les règles comptables impactent la fiscalité : les traitements comptables entraînent des conséquences sur le calcul de l’impôt et, de cause à effet, sur les recettes fiscales de l’Etat.

Aussi, les règles fiscales impactent-elles la comptabilité dans la mesure où l’administration fiscale n’admet pas la déductibilité des provisions sans objet ou bien des amortissements exagérés.

Aujourd’hui, les banquiers sont un peu confiants et espèrent que le législateur en tiendra compte dans la Loi de Finances 2018. Mais rien n’est moins sûr si l’on tient compte de la réforme en cours de la circulaire de provisionnement des créances sensibles (IFRS9), dont le calendrier va s’accélérer. Serait-il donc possible d’envisager une harmonisation dans l’immédiat ? Ne risque-t-elle pas d’être caduque avec la nouvelle circulaire de provisionnement ? Wait and see ! ■

 

S. Es-siari

 


Sur le même thème :  «Le déphasage entre règles fiscales et règles de provisionnement créent une réelle distorsion chez les banques»


 

 

 

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